Question de Mme DEMONTÈS Christiane (Rhône - SOC) publiée le 01/10/2010

Question posée en séance publique le 30/09/2010

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Christiane Demontès. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Monsieur le ministre, nos compatriotes sont de plus en plus nombreux à exprimer leur inquiétude et leur mécontentement face à la réforme des retraites que vous allez leur imposer.

Mme Éliane Assassi. Ils ont raison !

Mme Christiane Demontès. Ce que vous appelez une réforme, et qui n'est qu'une série d'ajustements comptables, s'avère injuste, brutal, inéquitable et inefficace.

Injuste, parce que le recul de l'âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans et celui auquel on peut percevoir une pension à taux plein de 65 à 67 ans pénalisent les salariés qui ont commencé à travailler tôt, ceux qui ont travaillé longtemps, ceux qui ont alterné périodes de travail et périodes de chômage ou de travail à temps partiel – je pense particulièrement aux femmes, monsieur le ministre.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Christiane Demontès. Maintenir le droit au départ à la retraite à 60 ans pour ces derniers, tout en permettant à ceux qui le souhaitent et qui le peuvent de poursuivre leur activité serait juste. Maintenir l'obtention d'une pension à taux plein à 65 ans serait juste.

Le projet de loi que vous présentez est brutal. En effet, contrairement à ce qui se pratique dans tous les autres pays, en France, l'application de ces ajustements se fait sur une durée très courte. Sur un sujet nécessitant dialogue, concertation, construction avant toute décision, vous, ou plutôt le Président de la République, décidez de passer en force !

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Christiane Demontès. Ce projet de loi est inéquitable : 85 % des efforts exigés le sont des salariés, alors que les revenus du capital n'y contribuent qu'à hauteur de 15 %.

Un sénateur du groupe socialiste. Ce sont leurs amis ! Ils sont ailleurs !

M. Bernard Vera. Bien sûr !

Mme Christiane Demontès. Le capital doit être mis à contribution, monsieur le ministre. Il faut augmenter les prélèvements sociaux sur les bonus et les stock-options, et remettre en cause la défiscalisation des plus-values sur les cessions de filiales.

Ce projet de loi est inefficace : il ne règle rien en matière d'équilibre financier de notre régime de retraite, malgré le scandaleux siphonage du Fonds de réserve pour les retraites, le FRR.

Mme Nicole Bricq. C'est vrai !

Mme Christiane Demontès. Il ne règle pas non plus la question de l'emploi des seniors et des jeunes. Vous ne les rencontrez donc pas, monsieur le ministre, ces gens condamnés au chômage parce que leur entreprise estime qu'ils coûtent trop cher ?

Je sais ce que vous me répondrez : il s'agit de sauver notre système de retraite par répartition.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Louis Carrère. C'est un mensonge !

Mme Christiane Demontès. Avez-vous mesuré l'inquiétude grondante de nos concitoyens, en particulier des plus jeunes d'entre eux, qui n'ont plus aucune confiance dans l'avenir ?

M. Alain Gournac. La question !

M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.

Mme Christiane Demontès. Monsieur le ministre, quel message d'espoir peuvent-ils encore espérer de vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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Réponse du Ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique publiée le 01/10/2010

Réponse apportée en séance publique le 30/09/2010

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

M. René-Pierre Signé. Il aura du mal à répondre !

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous débattrons de ces questions pendant plus de quinze jours dans cette enceinte, nous pourrons ainsi les approfondir.

M. David Assouline. Nous débattrons beaucoup plus longtemps !

M. Éric Woerth, ministre. Si les discussions durent au-delà, ce sera tant mieux : je suis favorable au débat ! Je suis d'ailleurs persuadé, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous ferez vivre ce débat.

M. Jean-Louis Carrère. Heureusement, nous n'avons pas Accoyer ! (Approbations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Éric Woerth, ministre. Vous nous reprochez, madame Demontès, de procéder à des « ajustements comptables ». Dans votre bouche, ce n'est pas très aimable...

Pourtant, la France ne peut pas se contenter d'un système de retraite qui accumule les déficits.

M. Jean-Louis Carrère. La faute à qui ?

M. Éric Woerth, ministre. Ce n'est sans doute pas ce que vous souhaitez.

En raison de la crise, les déficits anticipés de nos régimes de retraites seront réalisés vingt ans plus tôt que prévu.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas vrai !

M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement doit bien apporter une réponse appropriée ! Il s'y emploie.

M. Jean-Louis Carrère. C'est faux, vous mentez sans cesse !

M. Éric Woerth, ministre. La première des justices d'un régime de retraite est d'être en équilibre.

M. Didier Boulaud. La justice, c'est de faire payer les riches !

M. Éric Woerth, ministre. Un système de retraite en déséquilibre rendrait plus fragiles les personnes qui le sont déjà, c'est-à-dire celles qui n'ont pas pu mettre de l'argent de côté, et elles sont très nombreuses en France. (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Le système de retraite français est basé sur la répartition, autrement dit sur la solidarité entre les générations.

M. Jean-Louis Carrère. Vous voulez tuer le système par répartition !

M. Éric Woerth, ministre. Madame Demontès, il est logique de considérer que ce sont en premier lieu les travailleurs qui le financent.

Votre logique évoque un système par capitalisation. Dans ce cas de figure, vos propos pourraient être exacts. Mais nous, nous voulons un système par répartition,…

Mme Christiane Demontès. Ce sont toujours les mêmes qui paient, arrêtez !

M. Jean-Louis Carrère. Votre conception de la répartition, c'est tout pour vous, rien pour les autres !

M. Éric Woerth, ministre. … financé par les actifs : ce sont les actifs de l'année qui payent les retraites. C'est notre pacte social et notre lien social ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous vous y connaissez en lien social !

M. Éric Woerth, ministre. C'est sur ce principe, dans le droit fil du système élaboré par le Conseil national de la Résistance, que notre réforme du système des retraites est fondée.

Cette réforme est profondément juste.

M. Jean-Louis Carrère. Juste comme notre justice !

M. Éric Woerth, ministre. Ainsi, les personnes qui ont commencé à travailler très jeunes ont la faculté de partir plus tôt.

Madame Demontès, lorsque les socialistes ont institué la retraite à 60 ans en 1982, le fait que les personnes ayant commencé leur activité professionnelle à 14 ans travaillent 46 ans ne vous gênait pas ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) À l'époque, vous n'aviez pas envisagé cette question ; nous, nous y répondrons ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

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