Question de Mme TERRADE Odette (Val-de-Marne - CRC-SPG) publiée le 13/10/2010

Question posée en séance publique le 12/10/2010

Concerne le thème : L'accès au logement

Mme Odette Terrade. Monsieur le secrétaire d'État, j'orienterai ma question, en lien avec le débat des retraites, sur la problématique de l'accès au logement des retraités.

Un récent rapport sur l'état du mal-logement en France de la fondation Abbé Pierre rappelle que tous les seniors ne sont pas riches et bien portants comme Mme Bettencourt : 600 000 personnes âgées vivent actuellement avec une allocation de solidarité de 628 euros, ce qui les place sous le seuil de pauvreté, comme 8 millions de nos concitoyens aujourd'hui dans notre pays.

Comment se loger avec si peu de ressources ? Votre réforme des retraites va accentuer ce dysfonctionnement par un mécanisme très simple : l'allongement des durées de cotisations, cumulé avec le report de deux années de l'âge légal de départ à la retraite, va conduire à une diminution du montant des pensions.

Pourtant, nous savons très clairement que seule une politique publique volontaire en matière de revenus et, donc, de pensions, peut concrètement favoriser l'accès au logement.

C'est loin d'être le cas aujourd'hui : les prix des logements ont doublé en moins de dix ans et les loyers ont augmenté de 30 % à 50 % pendant la même période ! À l'évidence, les ressources des ménages n'ont pas suivi un tel rythme. Ainsi, l'association Consommation, logement et cadre de vie, la CLCV, et la fondation Abbé Pierre estiment à plus de 500 000 le nombre de ménages qui présentent des impayés de loyers de deux mois ou plus, soit une augmentation, sur quatre ans, de 96 % dans le parc privé et de 58 % dans le secteur public. Ce chiffre ne tient pas compte de la faible revalorisation des aides personnalisées au logement, qui est à l'origine d'une diminution de plus de 11 % de la solvabilisation.

Cette perte de pouvoir d'achat s'inscrit dans le cadre d'une politique du logement délétère, caractérisée notamment par la diminution continue des aides à la pierre, par la prochaine ponction des organismes d'HLM de l'ordre de 340 millions d'euros par an et l'obligation qui leur est faite de vendre leur patrimoine.

Aujourd'hui, il manque 900 000 logements, selon la fondation Abbé Pierre.

Il est clair que votre gouvernement mène une politique en rupture avec les valeurs qui sont au cœur de la République : la fraternité et la solidarité.

Aujourd'hui, c'est à chacun selon ses moyens ! Notre retraite, nous l'obtiendrons individuellement, par la voie de la capitalisation et non de la répartition. Et nous pourrons nous loger, sous l'unique condition d'être solvables et propriétaires !

Oui, les logements sont chers ! Oui, les retraités non fortunés pourront de moins en moins se voir garantir un droit au logement ! Cela est d'autant plus vrai que leur situation spécifique nécessite bien souvent des aménagements particuliers.

Je vous interroge donc, monsieur le secrétaire d'État : quand ce gouvernement va-t-il entendre, notamment en ce jour de manifestations, la voix du peuple ? Plus précisément, quelles mesures comptez-vous prendre pour faciliter l'accès au logement de ces populations fragilisées que même les bailleurs sociaux hésitent à accueillir dans leur contingent ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

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Réponse du Secrétariat d'État au logement et à l'urbanisme publiée le 13/10/2010

Réponse apportée en séance publique le 12/10/2010

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, la question que vous posez est essentielle dans un pays où la démographie – vous en discutez en ce moment même dans le cadre du débat sur les retraites – fait que l'on y vit plus longtemps, et c'est tant mieux !

Un certain nombre de questions se posent, notamment sur l'accès au logement.

J'apporterai trois éléments de réponse à votre question.

D'abord, si nous souhaitons recentrer les missions du monde HLM sur le logement des plus modestes, c'est justement pour répondre à la question que vous avez évoquée du vieillissement de la population.

De la même façon, si le Gouvernement souhaite accélérer l'accession à la propriété, c'est parce que cette dernière est aussi un moyen de permettre à nos concitoyens de préparer et de sécuriser leur retraite. Telle est la réalité ! Telle est la politique que nous menons !

J'ai récemment demandé à Mme Boulmier un rapport sur l'adaptation de l'habitat au défi de l'évolution démographique. En la matière, nous avons pris un certain nombre de décisions, notamment dans le cadre du grand emprunt, qui consacre 1,25 milliard d'euros pour adapter nos logements à la précarité énergétique et y réaliser des travaux dans la perspective du vieillissement de la population.

Ensuite, les aides personnalisées au logement ont augmenté de 6 % ces trois dernières années, justement pour faire face à la problématique que vous avez évoquée, à savoir les difficultés de logement d'un certain nombre de nos compatriotes, notamment des personnes âgées.

Enfin, concernant les 340 millions d'euros que vous avez évoqués – et je m'adresse également à M. Repentin, qui me semble pourtant bien connaître ce dossier –, je veux rappeler une vérité : non, ce ne seront pas les locataires qui paieront cette contribution. (Ah ! sur les travées du groupe CRC-SPG.)

La raison en est très simple : nous avons décidé que l'augmentation des loyers, qui relevait auparavant d'un « conseil » de l'État et qui était indexée à l'indice de référence des loyers, ou IRL, sera plafonnée dans une fourchette de 1 % maximum par an. Donc, les bailleurs sociaux ne pourront pas répercuter sur les locataires la contribution en question ! (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour la réplique.

Mme Odette Terrade. Monsieur le secrétaire d'État, vous n'en serez pas étonné, je ne partage pas vos analyses ! Certes, nos concitoyens vivent plus longtemps, mais pour beaucoup d'entre eux, on le sait, avec souvent nettement moins d'argent.

Je voudrais bien voir que les 340 millions d'euros à la charge des offices HLM ne seront pas pris sur le dos des locataires !

On sait déjà que ce seront forcément les locataires qui paieront. Leur contribution a même été évaluée à 80 euros par an. Comment vont-ils faire ? Ils n'ont pas le choix… .

En affaiblissant la capacité de construction des offices, cette mesure va également provoquer une hausse des loyers. En outre, les files d'attente des demandeurs vont s'allonger.

Il en est de même du montant des APL. Alors que le revenu maximum pour obtenir cette aide était de 2,4 SMIC en 1977 pour une personne, il n'était plus que de 1,07 SMIC en 2007. Nous voyons donc bien que la politique du logement s'effrite.

Comment accepter que la politique de logement social soit financée par la seule contribution des locataires HLM quand la nation entière subventionne le bouclier fiscal, qui représente aujourd'hui 640 millions d'euros réservés aux 19 000 foyers les plus aisés ?

Monsieur le secrétaire d'État, vous comprendrez que nous ne soyons pas d'accord avec vos réponses. Vous tournez le dos à une république solidaire, alors que, à l'inverse, le groupe CRC-SPG se prononce pour un grand service public du logement qui garantisse à tous le droit au logement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

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