Question de M. SIGNÉ René-Pierre (Nièvre - SOC) publiée le 09/09/2010

M. René-Pierre Signé attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État qui dans une déclaration à la presse, le 6 juillet 2010, a semblé remettre en cause les exonérations des cotisations patronales dans le secteur des services à la personne et d'aide à domicile.

Ce secteur regroupe un ensemble d'activités indispensables pour de très nombreuses familles en France. Ces services permettent aux personnes âgées, en perte d'autonomie, handicapées ou malades, de vivre chez elles le plus longtemps possible en leur apportant une aide quotidienne.

De plus, une telle intervention du Gouvernement sur les exonérations dont bénéficient les services à la personne laisse malheureusement présager d'autres interventions de même type sur les associations en général. À Château-Chinon, la levée de l'exonération de charges à travers l'application de la ZRR (zone de revitalisation rurale) reviendrait à augmenter les charges du centre social de 70 000 €. Les conséquences sur son fonctionnement et donc sur les missions qu'il exerce sur le territoire seraient fortement affectées.

Ces mesures qui entraîneraient une grave amputation des budgets des services à la personne, le plus souvent assurées par les centres sociaux, fragiliseraient ces centres et leurs compétences seraient réduites, sauf à faire supporter cette nouvelle charge par les bénéficiaires du service, malheureusement âgés et en situation financière précaire.

Le secteur souhaiterait que ces mesures, dûment analysées quant à leurs conséquences, soient reportées d'autant que le maintien à domicile évite, ou pour le moins retarde, une hospitalisation beaucoup plus onéreuse.

- page 2304


Réponse du Ministère chargé de l'outre-mer publiée le 16/02/2011

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2011

M. René-Pierre Signé. Ma question porte sur la remise en cause des exonérations de cotisations patronales dans le secteur des services à la personne, qu'il faut maintenant distinguer des services d'aide à domicile.

Ce secteur regroupe un ensemble d'activités indispensables pour de très nombreuses familles en France. Les services à la personne permettent notamment à des personnes âgées, en perte d'autonomie, handicapées ou malades de vivre chez elles le plus longtemps possible, grâce à l'apport d'une aide quotidienne.

Une telle remise en cause par le Gouvernement des exonérations de cotisations patronales dont bénéficient les services à la personne laisse malheureusement présager d'autres décisions du même type au détriment des associations et des centres sociaux qui offrent des services à domicile.

Ces mesures de réduction des exonérations, si elles devaient être généralisées, auraient des effets désastreux sur les services proposés et sur ceux qui en bénéficient – en général des personnes âgées –, fragilisant leur médiocre budget et les obligeant à supporter le coût d'un soutien qui leur paraît indispensable et qui l'est bien souvent. Elles pourraient aussi amener les personnes concernées à renoncer à des soins qui leur permettaient de reculer la date redoutée de l'hospitalisation.

Ces récents choix budgétaires, madame la ministre, effectués dans un contexte économique déjà difficile, sont mal perçus dans un secteur qui souffre déjà financièrement, notamment du fait de la professionnalisation nécessaire des salariés, et risquent d'entraîner des suppressions d'emplois, voire de structures.

Afin d'éviter une telle situation, un geste du Gouvernement est fortement attendu.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de François Baroin, qui m'a demandé de vous répondre sur cette question précise des services à la personne.

Le Gouvernement a eu l'occasion d'expliquer à de nombreuses reprises les raisons de cette réforme.

C'est une réforme indispensable au vu de nos objectifs en matière de finances publiques, puisque la suppression de l'abattement de quinze points et de la franchise de charges pour les organismes agréés représente une économie centrale pour le budget de l'État en 2011, de 460 millions d'euros. Elle participe donc pleinement de notre stratégie de réduction des déficits.

C'est une réforme juste et équilibrée puisqu'elle ne remet pas en cause les exonérations destinées aux personnes fragiles – personnes handicapées, personnes dépendantes, personnes âgées, parents d'enfants handicapés –, qui relèvent de textes distincts. Le coût de ces dispositifs d'exonération totale de charges, qui trouvent leur justification dans la situation particulière des personnes concernées, s'élève à 1,6 milliard d'euros. Non concernés par la réforme, ils sont intégralement préservés.

Enfin, pour l'ensemble des ménages qui ont recours aux services à la personne, le Gouvernement ne touche pas aux avantages fiscaux – crédit et réduction d'impôt de 50 % –, qui représentent près de 4 milliards d'euros : ces avantages n'ont pas été soumis au « rabot » de 10 %. Le maintien de ces dispositifs fiscaux permet de garantir que le travail déclaré reste plus intéressant que le travail au noir.

Sachez encore que, pour les organismes agréés – qu'ils soient privés ou publics, comme les centres sociaux ou les associations –, toutes les prestations effectuées auprès de personnes âgées ou handicapées restent exonérées de charges à 100 %. Les autres activités ou les prestations effectuées auprès de publics non fragiles bénéficieront des allégements généraux de charges, qui compensent en grande partie le surcoût lié à la réforme.

Monsieur le sénateur, les aides au secteur des services à la personne ont progressé de 50 % en cinq ans, et représentent en 2011 plus de 6,6 milliards d'euros : le soutien à ce secteur reste donc massif et à la hauteur des enjeux que vous indiquez.

En ce qui concerne le cas particulier des organismes situés en zone de revitalisation rurale, ou ZRR, le Gouvernement a été particulièrement à l'écoute des parlementaires sur ce sujet lors des débats sur le projet de budget pour 2011 et attentif à la situation particulière de ces territoires et des structures qui y sont implantées. Il a décidé d'écarter la réforme qui prévoyait la suppression des exonérations de charges. Les zones de revitalisation rurale continueront donc de bénéficier des dispositifs de soutien existants, ce qui correspond à un effort très important, d'environ 120 millions d'euros.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Madame la ministre, je vous rappelle que les sénateurs avaient voté le maintien de l'abattement de 15 % sur les cotisations sociales dues par les particuliers employeurs. À la suite de ce vote, le ministre du budget avait demandé une seconde délibération, ce qui avait permis à la majorité de supprimer cet abattement. Cette mesure est censée déboucher sur une économie de 460 millions d'euros, ce qui est dérisoire au regard des enjeux. Parallèlement, 460 millions d'euros ont été alloués aux chômeurs de longue durée : vous creusez un trou pour en boucher un autre, reprenant ainsi à votre compte une pratique inaugurée par un certain personnage que je ne nommerai pas, ne voulant pas être désobligeant…

Vous prétendez que les personnes les plus lourdement handicapées ne seront pas touchées, mais la grille AGGIR –autonomie gérontologie groupe iso-ressources – a été modifiée et il faut désormais, pour bénéficier des aides, être vraiment complètement handicapé. Or beaucoup de gens sont dépendants sans pour autant être lourdement handicapés, et ce sont précisément ces personnes qui sont intéressées par le maintien à domicile, cette solution n'étant pas envisageable pour les handicapés les plus lourds. Rester à domicile, cela signifie retarder l'hospitalisation, qui est la perspective la plus redoutée et la plus redoutable : on sait bien que, en général, on entre dans un service de long séjour hospitalier pour ne plus en sortir.

À l'heure où le Président de la République évoque la mise en place d'une cinquième branche, la branche dépendance, la mesure en question est d'autant plus malvenue. Au titre d'une politique de rigueur qui ne dit pas son nom, vous retirez au secteur de l'aide à domicile 460 millions d'euros qui permettaient le maintien de personnes dépendantes dans leur logement : cela ne va pas dans le sens de la sollicitude que vous affichez à l'égard de cette population !

Telles sont les raisons pour lesquelles je m'élève contre cette mesure, dont les conséquences doivent être bien évaluées : il convient d'en mesurer le prix, madame la ministre, et non simplement le coût.

- page 1365

Page mise à jour le