Question de M. KERDRAON Ronan (Côtes-d'Armor - SOC) publiée le 05/08/2010

M. Ronan Kerdraon interroge M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur les conséquences du document d'orientation sur le budget pluriannuel de l'État sur la période 2011-2013. Il annonce la réduction de la participation de l'État dans les budgets des missions locales.

Pourtant, ces dernières ont été confortées par le Gouvernement dans leur rôle de « pivot » dans l'accompagnement des jeunes, chez qui le chômage est particulièrement élevé.

Le plan de relance a apporté 51 millions d'euros de crédits supplémentaires à ces structures. Il apparaissait alors comme un palliatif, beaucoup de structures fonctionnant déjà en conciliant une forte charge de travail et un effectif réduit. Cette annonce brutale et immédiate suscite donc de nombreuses craintes : d'une part, les personnels des missions locales risquent d'être licenciés, faute de financements ; d'autre part, le bon fonctionnement de ces structures est amené à être entravé, faute d'une volonté politique réelle de garantir la pérennité du service public de l'emploi.

Il lui demande par conséquent quelles mesures il entend mettre en oeuvre pour inscrire l'action des missions locales et de leurs agents dans la durée.

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Transmise au Secrétariat d'État chargé de l'emploi


Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce extérieur publiée le 03/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 02/11/2010

M. Ronan Kerdraon. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question porte sur l'avenir des missions locales pour l'emploi des jeunes. Celles-ci sont – faut-il le rappeler ? – des pivots dans l'accompagnement d'un public dont le taux de chômage est particulièrement élevé, atteignant 23,7 %, comme cela a été souligné pendant le débat sur les retraites.

Ces structures œuvrent chaque jour pour permettre une meilleure insertion professionnelle, donc une meilleure insertion sociale. De fait, elles sont indispensables.

Madame la secrétaire d'État, votre collègue Laurent Wauquiez a annoncé très récemment que les financements pour 2011, hors plan de relance, seraient reconduits. Comment le croire alors que les grandes orientations du projet de loi de finances pour 2011 indiquent le contraire ?

Certes, le plan de relance a apporté 51 millions d'euros de crédits supplémentaires à ces structures. Mais il s'agissait d'un palliatif, nombre d'entre elles fonctionnant déjà en conciliant une forte charge de travail et un effectif réduit.

Le document d'orientation sur le budget pluriannuel de l'État sur la période 2011-2013 et le projet de loi de finances pour 2011 ont suscité de nombreuses craintes, que votre collègue n'a pas su lever. Il ne suffit pas de flatter ; encore faut-il apporter des garanties sur le long terme !

Or, dans le même temps, Pôle emploi va mal.

Des agents en contrats précaires voient leur CDD renouvelé parfois jusqu'à sept fois, pour être ensuite remerciés ! Dans mon département, à Loudéac, une personne se trouve dans cette situation. Et vous annoncez dans le même temps la suppression de 800 postes par an dès 2011. Je vous passe les témoignages très cruels des demandeurs d'emploi injustement radiés.

Pour faire face à cette situation, plutôt que de continuer à soutenir les structures de proximité, qui doivent déjà combler les carences de Pôle emploi et dont l'action est ciblée sur une tranche de population en grande difficulté, vous décidez de réduire la participation de l'État dans leurs budgets !

Les moyens supplémentaires accordés dans le cadre du plan de relance n'ont pas suffi à faire progresser l'insertion professionnelle de ces jeunes. Jean-Patrick Gille, député d'Indre-et-Loire et président de l'Union nationale des missions locales, a bien résumé les choses : « on se doutait que ces crédits ne seraient pas pérennisés, mais on s'attendait à ce qu'ils soient retirés progressivement ».

Non seulement vous supprimez ces crédits brutalement, mais, pis, vous décidez de sacrifier plus généralement une grande partie des dispositifs d'aide à l'emploi indispensables. Belle équation ! De moins en moins de personnels, de moins en moins d'outils, pour un service public de l'emploi plus efficace ? C'est le monde à l'envers !

Les contrats d'accompagnement formation seront supprimés à la fin de 2012. Il n'est plus possible aujourd'hui d'engager un jeune en contrat d'initiative emploi par le biais d'un « CIE jeunes », et les collectivités territoriales, parce qu'elles sont étranglées, n'adhéreront plus aux contrats d'accompagnement dans l'emploi passerelle, les « CAE passerelle ».

Conclusion, vous êtes en train de sonner le glas des contrats aidés.

Comment cela se traduira-t-il sur les missions locales ?

Je prendrai le cas de la mission locale de Saint-Brieuc, dont je suis le président. Elle a connu en trois ans 40 % d'augmentation de la fréquentation de jeunes demandeurs d'emploi. En 2009, la structure s'occupait de 3 000 dossiers ; aujourd'hui, elle en gère 3 800. Pourtant le nombre de conseillers n'a pas augmenté. La mission sera peut-être même obligée de licencier dans l'année qui vient.

Un conseiller gère en moyenne 150 jeunes. Il s'agit souvent d'un public peu qualifié et en réelle demande d'accompagnement, ce qui représente deux ou trois rendez-vous par semaine. C'est intenable.

Par ailleurs, vous réduisez le champ d'action des acteurs des missions locales. C'est incompréhensible.

Quels objectifs assignez-vous aux missions locales ? Faire mieux avec toujours moins ?

Le bon fonctionnement de ces structures est entravé faute d'une volonté politique réelle de garantir la pérennité du service public de l'emploi.

Quel sera le devenir de ces missions locales qui font leurs preuves au quotidien dans l'accompagnement des jeunes demandeurs d'emploi ?

Madame la secrétaire d'État, quelles garanties le Gouvernement compte-t-il apporter pour prévenir les risques de licenciement et garantir le bon fonctionnement du service public de l'emploi ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur Kerdraon, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser Laurent Wauquiez, qui ne peut être présent dans cet hémicycle ce matin et m'a chargée de vous répondre.

Vous rappelez avec raison le rôle majeur que jouent les missions locales pour accompagner les jeunes dans l'accès à l'emploi, en particulier dans le contexte de crise que nous avons connu.

Je peux vous assurer que le soutien de l'État en faveur de ces missions locales ne faiblira pas. Laurent Wauquiez l'a confirmé lors de la dernière journée nationale des missions locales qui s'est tenue à Bercy le 30 septembre dernier et a signé un protocole avec l'ensemble des associations d'élus – l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France, l'Association des régions de France –, cofinanceuses avec l'État des missions locales.

Dans le cadre de ce protocole, l'État s'engage à maintenir dans le projet de loi de finances pour 2011 les financements de la mission « Emploi » en direction des missions locales. Néanmoins, ce maintien des crédits doit, à l'évidence, être une incitation à rechercher la performance maximale de chaque mission locale au profit des jeunes accompagnés.

Le renforcement continu par l'État des moyens des missions locales, à travers l'ouverture de la prescription des contrats aidés, une cotraitance rénovée en 2010 avec Pôle emploi, ainsi que le choix de poursuivre au-delà des cinq ans initialement prévus le programme CIVIS, ou contrat d'insertion dans la vie sociale, témoigne de la reconnaissance par le Gouvernement du rôle de « pivot » – vous l'avez très justement évoqué – des missions locales.

Dans ce cadre, le renforcement temporaire effectué par le plan de relance, en 2010, constituait une réponse à la crise exceptionnelle traversée par le pays.

Lors des dix réunions interrégionales avec les présidents et directeurs des missions locales qui ont été organisées par l'Union nationale des missions locales, l'UNML, et le Conseil national des missions locales, le CNML, avec la participation des services du ministère de l'emploi entre avril et juin 2010 pour accompagner le déploiement de cet effort exceptionnel lié à la crise, l'accent a été mis sur le caractère non reconductible des crédits du plan de relance. C'est d'ailleurs le cas de l'ensemble des crédits de la mission « Plan de relance de l'économie ».

Le maintien de moyens pérennes aux missions locales met ces dernières en situation de tenir toute leur place au sein du service public de l'emploi, ainsi que vient de le souligner un récent rapport de l'Inspection générale des finances.

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.

M. Ronan Kerdraon. Madame la secrétaire d'État, je ne suis pas forcément convaincu par la réponse que vous venez de m'apporter.

L'insertion est une réelle chance pour ceux qui n'en ont pas. Or le Gouvernement prend le prétexte d'une prétendue reprise pour supprimer les postes d'insertion.

Chez moi, en Bretagne, ce sont 800 postes qui sont ainsi concernés. Le risque est grand de compliquer le parcours déjà difficile de l'insertion. Nous assistons donc à un véritable désengagement de l'État.

Certes, le Gouvernement a signé un protocole. Laurent Wauquiez, je le sais, a beaucoup complimenté les missions locales et a tenté de les rassurer. Il leur a affirmé qu'elles n'étaient ni des satellites ni des succursales, mais qu'elles se situaient au cœur de la bataille pour l'emploi, qu'elles constituaient la colonne vertébrale de la politique en faveur de l'emploi. Je partage tout à fait cette analyse, mais je souhaiterais qu'elle fasse l'objet d'une traduction concrète.

J'éprouve donc encore quelques inquiétudes.

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