Question de Mme BLONDIN Maryvonne (Finistère - SOC) publiée le 22/07/2010

Mme Maryvonne Blondin attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la circulaire en date du 14 mai 2010 relative aux demandes de changement de sexe à l'état civil par les personnes transsexuelles ou transgenres.

Comme elle l'avait souligné à l'occasion de la discussion de sa question orale (832) le 18 mai 2010, le législateur français s'est, jusqu'alors, toujours refusé à encadrer juridiquement le statut des personnes transsexuelles et transgenres, laissant au seul juge le soin de définir, par sa jurisprudence, les dispositifs permettant la reconnaissance juridique de leur nouveau sexe.

Si la très grande majorité des magistrats exige aujourd'hui une opération de conversion sexuelle, souvent assortie d'expertises médicales humiliantes et coûteuses, avant de prononcer la modification de la mention de sexe à l'état civil, d'autres acceptent de prononcer ladite modification en dehors de toute intervention chirurgicale. Ainsi, par un arrêt rendu le 26 octobre 1998, la cour d'appel de Rennes a admis que, lorsqu'une personne a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect de la vie privée justifie que son état civil mentionne désormais le sexe dont elle a l'apparence. La cour d'appel d'Aix-en-Provence s'est prononcée dans le même sens par un arrêt rendu le 9 novembre 2001.

La circulaire émise par Mme la garde des sceaux le 14 mai 2010 répond en partie à cette question et vise à uniformiser la pratique en précisant que les magistrats « [pourront] donner un avis favorable à la demande de changement d'état civil dès lors que les traitements hormonaux ayant pour effet une transformation physique ou physiologique définitive, associés, le cas échéant, à des opérations de chirurgie plastique (prothèses ou ablation des glandes mammaires, chirurgie esthétique du visage...), ont entraîné un changement de sexe irréversible, sans exiger pour autant l'ablation des organes génitaux ».

Une interrogation importante subsiste cependant quant à la signification, dans cette circulaire, du terme « irréversible ». Aucune des transformations citées dans le texte n'est irréversible à l'exception stricto sensu de la glande mammaire, laquelle peut d'ailleurs être secondairement remplacée par une prothèse.

Elle lui demande donc de bien vouloir préciser ce qu'elle entend par « transformation irréversible », de telle manière qu'il ne puisse y avoir aucune ambiguïté dans l'interprétation que le magistrat fera de cette circulaire.

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Réponse du Ministère de la justice et des libertés publiée le 30/12/2010

La notion de changement de sexe irréversible évoquée dans la circulaire du 14 mai 2010 fait référence à la recommandation n°  1117 du Conseil de l'Europe relative à la condition des transsexuels, citée par le rapport de la Haute autorité de santé « Situation actuelle et perspectives d'évolution de la prise en charge du transsexualisme en France » de novembre 2009. Cette notion est d'ordre médical et non juridique et, selon certains spécialistes, le caractère irréversible peut résulter de l'hormonosubstitution, ce traitement gommant certains aspects physiologiques, notamment la fécondité, qui peut être irréversible. Il appartient aux personnes concernées d'en rapporter la preuve, notamment par la production d'attestations de médecins reconnus comme spécialistes en la matière (psychiatre, endocrinologue et, le cas échéant, chirurgien) et qui les ont suivies dans le processus de conversion sexuelle. Le procureur fonde ensuite son avis, au cas par cas, sur les pièces médicales produites par le demandeur.

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