Question de M. MICHEL Jean-Pierre (Haute-Saône - SOC) publiée le 09/06/2010

Question posée en séance publique le 08/06/2010

Concerne le thème : La justice, le point sur les réformes

M. Jean-Pierre Michel. Madame la ministre d'État, je souhaite vous interroger sur l'application de la réforme de la carte judiciaire, en particulier sur ses conséquences immobilières.

Au cours de l'année dernière, presque la moitié des tribunaux qui devaient être supprimés l'ont été. Je passe sur les conséquences dommageables de cette évolution pour les justiciables, notamment pour ceux d'entre eux dont le domicile est éloigné du siège du tribunal d'instance.

Les transferts se sont opérés dans de très mauvaises conditions et les services ont été éparpillés. C'est le cas dans mon département.

La situation sera encore plus difficile au 1er janvier 2011, puisque la réforme devra avoir été entièrement mise en œuvre à cette date. Des dizaines de tribunaux de grande instance auront alors été supprimés et devront être accueillis par d'autres situés dans le même département.

Dans quelles conditions ce transfert va-t-il s'effectuer ? Madame la ministre d'État, avez-vous aujourd'hui des solutions pérennes à proposer ? J'en doute : comme l'a souligné le rapport de la Cour des comptes, quatre ou cinq années s'écoulent entre la décision de construire un nouveau tribunal et son inauguration. Avez-vous donc des solutions provisoires ? Quel sera le coût de ces opérations ? Je n'attends pas une réponse exhaustive de votre part aujourd'hui, mais je souhaiterais que vous m'adressiez des explications écrites aussi détaillées que possible.

Enfin, madame la ministre d'État, je me demande si, dans cette période de nécessaires économies budgétaires, les crédits de votre ministère pourront supporter les coûts d'un tel programme immobilier, même s'il est étalé dans le temps. Ne serait-il pas plus raisonnable de surseoir à l'application complète de cette réforme, qui a été très mal conçue, sans aucune concertation, en attendant que notre économie se porte mieux qu'aujourd'hui ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)


Réponse du Ministère de la justice publiée le 09/06/2010

Réponse apportée en séance publique le 08/06/2010

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur le sénateur, la réforme de la carte judiciaire avait pour objet de moderniser l'organisation de notre justice en termes d'implantation territoriale. Ce travail a été largement effectué, et il n'est pas de bonne politique de remettre en cause une réforme quand les décisions ont été prises et, de surcroît, validées par le Conseil d'État. Il me revient maintenant de les mettre en œuvre dans les meilleures conditions possibles.

Cette année, vingt et un tribunaux de grande instance ont été fermés dans le cadre de la dernière phase de la réforme de la carte judiciaire. Le processus est donc largement engagé, et il n'est ni possible ni souhaitable d'arrêter ou de reculer.

Les différentes étapes des regroupements sont suivies par la chancellerie au plus près des cours et des juridictions concernées. Comme vous le savez, j'ai demandé à M. le secrétaire d'État à la justice de se déplacer personnellement sur chaque site pour dresser un état de la situation, regroupement par regroupement, qu'il s'agisse de l'immobilier ou des personnels.

Sur le plan immobilier, le regroupement des juridictions représente une centaine d'opérations très diverses, allant de la simple densification jusqu'à la reconstruction.

Sur le plan social, nous avons beaucoup avancé, puisque des solutions conformes aux souhaits des personnels sont mises en œuvre pour les 263 fonctionnaires et les 123 magistrats des tribunaux de grande instance concernés. Il est également procédé à un certain nombre d'aménagements technologiques.

Le coût global de la réforme est estimé à un peu plus de 21 millions d'euros pour l'accompagnement social, à 20 millions d'euros pour l'aide à la réinstallation et à 386 millions d'euros sur cinq ans pour l'immobilier. Ces montants seront respectés et sont inscrits au fur et à mesure dans les budgets.

Je vous communiquerai les informations détaillées que vous souhaitez, mais il n'est pas question d'interrompre la mise en œuvre de la réforme. Au demeurant, cela soulèverait beaucoup de difficultés, puisqu'un certain nombre de personnels ont d'ores et déjà obtenu une nouvelle affectation conforme à leurs attentes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour la réplique.

M. Jean-Pierre Michel. Je remercie Mme la ministre d'État de sa réponse.

Dans mon département, la situation est claire : deux tribunaux de grande instance ont été supprimés et transférés dans de très mauvaises conditions à Vesoul et à Lure. Les justiciables ne se déplacent plus pour entendre les décisions les concernant.

Quant au tribunal de grande instance de Lure, il doit être accueilli à Vesoul. Si M. le secrétaire d'État à la justice s'est effectivement rendu en Haute-Saône – les parlementaires du département n'ont pas été conviés aux réunions organisées à cette occasion, ce qui est pour le moins étonnant –, il s'est bien gardé d'interroger les magistrats du tribunal de grande instance de Lure et les avocats du barreau local, car il se doutait bien de leur réaction. À Vesoul, il s'est contenté de visiter, en compagnie des élus municipaux, l'ancien hôpital, que la ville souhaite vendre. Y installer le tribunal de grande instance coûterait très cher, mais le maire de Vesoul n'étant autre qu'un de vos collègues du Gouvernement, peut-être cette opération pourra-t-elle se réaliser…

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