Question de M. BOURDIN Joël (Eure - UMP) publiée le 21/05/2010

Question posée en séance publique le 20/05/2010

M. le président. La parole est à M. Joël Bourdin. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Joël Bourdin. Tout d'abord, je tiens à vous féliciter, madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, pour la manière dont vous vous êtes engagée dans le rôle d'ambassadeur de l'euro, relayant avec bonheur l'action propre du Président de la République (Manifestations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.), afin de faire évoluer la gouvernance économique européenne. (Plusieurs sénateurs du groupe socialiste miment le geste du violoniste.)

Je vous sais gré d'avoir réussi à vaincre la réticence de la Banque centrale européenne à faire le lien entre les financements de l'économie et la politique monétaire. La tâche est rude, tant est ancré, dans les pays de la zone euro, l'esprit d'indépendance en ce qui concerne leurs politiques économiques et budgétaires.

Naguère, nous avons consacré l'euro monnaie commune, en oubliant qu'il n'est pas tombé du ciel et que sa valeur comme son utilité résultent d'engagements économiques et budgétaires européens qui n'ont pas été tenus. Ils ont même été ignorés ! C'est freudien, dirait Michel Onfray…

M. Jean-Pierre Sueur. Très mauvaise référence !

M. Joël Bourdin. Les créateurs d'une monnaie unique fondée sur la convergence n'ont eu de cesse de disperser leurs politiques économiques avec des objectifs disparates.

Certains ont pratiqué une politique de stabilisation des salaires, comme l'Allemagne, qui a le souci permanent, dans un esprit de pacte social, de la compétitivité ; d'autres ont délibérément choisi, comme l'Espagne, de se laisser bercer par une politique inflationniste, en laissant filer les salaires nominaux et se développer les crédits à la consommation.

La France s'est située entre ces deux extrêmes. Inéluctablement, on allait à la catastrophe – nous avons été plusieurs à l'écrire avant 2008 – et, immanquablement, une remise en ordre serait nécessaire. On en est là !

C'est un peu tard, mais on doit se féliciter que les gouvernements osent évoquer la coordination de leurs politiques économiques. La remise en ordre est laborieuse. Nous sommes au printemps et il ne faut pas s'étonner que le régime minceur appliqué aux budgets fasse florès ! (Sourires.)

À cet égard, l'Allemagne se distingue : elle ne cache pas que le modèle allemand est le modèle type de ralliement.

M. le président. Votre question, monsieur Bourdin !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est laborieux !

M. René-Pierre Signé. Très laborieux !

M. Joël Bourdin. L'Allemagne se distingue encore par son initiative technique visant à interdire les ventes à terme de titres.

Aussi, depuis hier, on a la douloureuse impression qu'à nouveau on improvise ici ou là.

Ma question est simple.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, enfin !

M. Joël Bourdin. Quand va-t-on organiser la coordination européenne ? Quand allez-vous, gouvernements de la zone euro, parler d'une seule voix, défendre les mêmes principes, prendre les mêmes engagements ? Quand va-t-on cesser de finasser et de faire le bonheur des arbitragistes internationaux ? (Marques d'impatience sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Robert Hue. Une minute de dépassement !

M. Joël Bourdin. Quand va-t-on sortir de ce système de communication nationale néfaste ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 21/05/2010

Réponse apportée en séance publique le 20/05/2010

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur Bourdin, vous le savez certainement, Jean Monnet disait que l'Europe se construit et avance dans les crises.

M. Didier Boulaud. À croire que vous avez provoqué celle-ci pour faire avancer l'Europe !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est la crise permanente !

Mme Christine Lagarde, ministre. La crise économique et financière que nous venons de traverser a permis à l'Europe de découvrir un certain nombre de failles et de proposer d'y remédier.

Vous posez la question de la gouvernance économique. À l'occasion de la crise grecque et, plus récemment, à l'occasion de la crise financière qu'a vécue notre monnaie commune, l'euro, il est nettement apparu que certains mécanismes nous manquaient. Cela nous incite à examiner la question de la gouvernance économique et à faire des propositions.

M. le Président de la République et M. le Premier ministre m'ont demandé de représenter notre pays au sein du groupe de travail convoqué demain après-midi par M. Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, et précisément chargé de mettre au point ces propositions de modifications en matière de gouvernance économique.

Il s'agit d'avoir des mécanismes d'alerte qui fonctionnent un peu mieux, un peu plus vite, et qui reposent sur un pacte de stabilité et de croissance comportant non seulement l'indicateur des déficits et des dettes, mais également un indicateur de la compétitivité économique. Il s'agit aussi d'envisager la convergence de nos modèles économiques, à laquelle vous faisiez référence, monsieur Bourdin.

M. Didier Boulaud. Ça fait huit ans que la droite est au pouvoir ! Qu'est-ce que vous avez fait ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Nous devons en outre mettre en place des mécanismes de sanctions.

Certains proposent la modification des traités. Nous avons attentivement examiné la chose et il nous semble – je parle sous l'autorité du Premier ministre – que nous pouvons parfaitement pratiquer à traité constant. Aujourd'hui, on trouve dans les traités des mécanismes adéquats : les avertissements, sur le fondement de l'article 136 ; la privation de fonds communautaires tels que les fonds de cohésion ; les mécanismes d'accès à la banque européenne d'investissement. Ce sont là autant de sanctions propres à rappeler à chacun ses obligations dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance.

M. Didier Boulaud. Vous avez tout laissé filer pendant huit ans !

Mme Christine Lagarde, ministre. La stabilité signifie évidemment l'effort budgétaire, c'est-à-dire la lutte contre les déficits publics, évoquée par le Premier ministre, et qui nous a réunis autour du Président de la République, avec le président de votre commission des finances et votre rapporteur général.

M. Didier Boulaud. C'est du baratin !

Mme Christine Lagarde, ministre. Il s'agit aussi d'essayer de pratiquer la croissance ensemble. Pour ce faire, nous devons travailler sur les objectifs « Europe 2020 » et nous efforcer de rapprocher nos modèles économiques.

Ceux qui ont des déficits de balance des paiements trop importants doivent les réduire, grâce à une politique budgétaire rigoureuse et à des réformes de fond.

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Les pays en excédent doivent également faire une part du chemin nécessaire ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'Union centriste.)

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