Question de M. PATRIAT François (Côte-d'Or - SOC) publiée le 21/05/2010

Question posée en séance publique le 20/05/2010

M. le président. La parole est à M. François Patriat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. François Patriat. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Ce matin, les représentants des régions et des départements de France n'ont pas souhaité, à juste titre, participer à la conférence des déficits publics, et cela pour deux raisons : d'une part, les collectivités locales ne contribuent pas au déficit ; d'autre part, les décisions étaient déjà prises.

En effet, les collectivités locales votent des budgets en équilibre, faisant apparaître un déficit qui ne représente qu'1 % du déficit de l'État et correspond à des dépenses d'investissement pour l'avenir de nos territoires. (Très bien ! sur les travées socialistes.)

Elles votent donc des comptes en équilibre, alors qu'elles doivent faire face à de grandes difficultés.

M. René-Pierre Signé. Eh oui !

M. François Patriat. En premier lieu, elles doivent assumer des charges résultant de transferts de compétences mal financés, mal compensés.

En deuxième lieu, elles doivent répondre à l'appel de l'État pour financer des investissements qui sont hors de leurs compétences, qu'il s'agisse du grand emprunt, des autoroutes, des lignes à grande vitesse, du plan Campus… Cette semaine encore, elles ont été sollicitées à trois reprises.

En troisième lieu, leurs ressources sont peu évolutives, peu dynamiques.

Néanmoins, en un an, les collectivités locales empruntent ce que l'État emprunte en une semaine !

Ce matin, elles n'ont pas participé à la conférence des déficits parce que le Gouvernement veut régler non pas les comptes de l'État, mais le compte des collectivités locales ! Je le répète, les décisions étaient déjà prises ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

M. François Patriat. Première décision : la suppression de la taxe professionnelle. De ce fait, les communes, les départements et surtout les régions sont dotés d'un budget affecté sans ressources dynamiques. La perte d'autonomie fiscale est réelle. Les budgets locaux en subissent déjà les conséquences.

Deuxième décision : le gel des dotations accordées aux collectivités. À l'issue de cette conférence, j'ai de surcroît appris que le soutien aux collectivités serait modulé en fonction de leur « degré de bonne gestion ». Qui déterminera ce degré ? Que sera la bonne gestion ? (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. Guy Fischer. Ce sera à la tête du client !

M. François Patriat. Et vous voulez en plus faire voter à la hussarde une réforme des collectivités locales entraînant une perte de légitimité démocratique !

Depuis le mois de mars, nous avons demandé sans succès un rendez-vous au chef de l'État.

M. le président. Monsieur Patriat, votre question !

M. François Patriat. Nous souhaitons l'instauration d'un vrai dialogue entre l'État et les collectivités locales, de façon à mettre en place une réelle décentralisation, qui permettra à la nation de sortir des difficultés auxquelles elle est actuellement confrontée.

M. François Trucy. Y a-t-il une question ?

M. François Patriat. Par ailleurs, et je m'adresse là à Mme Lagarde, le Gouvernement vient de notifier à Bruxelles le fait que, dans les deux années à venir, des prélèvements obligatoires supplémentaires d'un montant de 40 milliards d'euros seront opérés en France. Vous nous parlez de croissance, mais nous savons bien que ce sont en réalité les Français qui paieront ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 21/05/2010

Réponse apportée en séance publique le 20/05/2010

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur Patriat, la meilleure façon de nouer un dialogue est d'y participer ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.) De ce point de vue, il est vraiment regrettable que les représentants de certaines collectivités locales n'aient pas été présents ce matin !

M. Jean-Louis Carrère. Il n'y a pas de vrai dialogue avec vous !

M. Guy Fischer. Les dés sont pipés !

Mme Christine Lagarde, ministre. Pour ce qui concerne votre dernière remarque, je précise que les prélèvements obligatoires supplémentaires figurent dans un document transmis à Bruxelles au mois de janvier dernier et communiqué, bien entendu, aux commissions des finances des assemblées. Cette augmentation des prélèvements obligatoires résulte évidemment de l'élargissement des bases, compte tenu de la croissance prévue pour l'année. (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean-Marc Todeschini. Ah, à la croissance ! Tout va bien !

M. Charles Gautier. Elle est où, la croissance ?

M. Didier Boulaud. On la cherche ! (M. Didier Boulaud mes ses mains en visière, feignant de scruter l'horizon.)

Mme Christine Lagarde, ministre. Par conséquent, il ne s'agit pas à proprement parler d'augmenter les prélèvements obligatoires.

Je tiens maintenant à vous expliquer très précisément la façon dont le Gouvernement articule sa politique budgétaire. Celle-ci n'a pas changé d'un iota. Au fur et à mesure du retour de la croissance, les mesures adoptées afin de favoriser la relance de l'économie sont rapportées.

Par ailleurs, plusieurs méthodes peuvent être choisies pour réduire les déficits publics, cette réduction constituant un impératif national : comme l'a dit ce matin M. le Premier ministre, il y va de la crédibilité du pays tout entier et de sa croissance.

M. Jean-Marc Todeschini. Puisque M. le Premier ministre est présent, il pourrait le dire lui-même !

Mme Christine Lagarde, ministre. Il y va également, comme j'ai pu moi-même le constater à l'occasion de discussions à Bruxelles concernant d'autres pays, de l'indépendance nationale.

Dans ces conditions, il est évident que chacun d'entre nous doit participer à la réduction des déficits.

Quelle politique budgétaire pratiquer pour y parvenir ?

Une première option est d'augmenter massivement les impôts, ce qui signifie brider la croissance.

M. Didier Boulaud. Mais quelle croissance ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Très clairement, le Gouvernement ne souhaite pas y recourir.

La deuxième option consiste à réduire la dépense publique. C'est manifestement dans cette direction que nous devons nous engager, volontairement, délibérément et tous ensemble.

M. Didier Boulaud. Commencez par vous !

Mme Christine Lagarde, ministre. La troisième option vise à apporter à notre économie les réformes propres à reconstituer son potentiel de croissance qui a été détruit lors de la crise économique.

M. Didier Boulaud. Que faites-vous depuis huit ans ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Patriat, je regrette d'autant plus votre absence ce matin que vous auriez pu prendre connaissance de deux rapports.

Le premier est celui qui a été remis par MM. Champsaur et Cotis, et qui établit de manière irréfutable que, depuis trente ans, tout le monde a contribué aux déficits publics.

M. Didier Guillaume. Ce n'est pas vrai !

M. Didier Boulaud. En tout cas, pas au même rythme !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas ce que vous dites dans les départements !

M. Jean-Louis Carrère. Les champions, c'est quand même vous !

Mme Christine Lagarde, ministre. « Tout le monde », cela signifie l'État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'Union centriste. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

À la lecture de ce même rapport, vous auriez constaté que les collectivités territoriales concourent beaucoup plus que l'État à l'augmentation des déficits publics, respectivement pour 2,7 et 1,9 points.

M. Didier Boulaud. C'est faux ! C'est un rapport truqué fait par vos copains !

Mme Christine Lagarde, ministre. Je vous conseille également la lecture du rapport que vient de fournir M. Bruno Durieux, qui explique très clairement que le remplacement de la taxe professionnelle par la contribution économique territoriale fournit une dynamique bien meilleure à l'ensemble des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'Union centriste.)

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