Question de Mme PAYET Anne-Marie (La Réunion - UC) publiée le 22/04/2010

Mme Anne-Marie Payet attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur la nécessité d'un meilleur encadrement juridique des compléments alimentaires.
Depuis quelques années, les rayons des pharmacies, parapharmacies ou magasins de diététique proposent en vente libre un grand nombre de produits communément appelés compléments alimentaires. Avec le développement des nouvelles technologies et la popularité grandissante de ces produits, Internet a permis l'essor de la vente en ligne des compléments alimentaires.
Ces produits sont régis par une réglementation concernant leur fabrication et leur commercialisation (directive européenne 2002/46/CE du 10 juin 2002 transposée en droit français en mars 2006). Ils sont définis comme « des denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique ».
Cependant, les compléments alimentaires sont fondamentalement différents des médicaments. Ils ne sont d'ailleurs pas soumis aux mêmes règles d'autorisation de mise sur le marché (AMM) que ces derniers et ne peuvent donc pas prétendre prévenir, soulager, traiter ou guérir des maladies. Leur fabrication est certes contrôlée mais pas leur efficacité, ni leur toxicité. Certaines substances, bien qu'interdites à la vente, figurent dans la composition des compléments alimentaires disponibles en pharmacie. En effet, les compléments alimentaires contiennent des substances pouvant parfois interagir entre elles ou avec des médicaments et le manque d'information ou de contrôle de ces produits en cas de grossesse ou d'allaitement, de maladie chronique ou de traitement de longue durée peut avoir des effets néfastes sur la santé du consommateur.
Les compléments alimentaires semblent aujourd'hui devenir le remède miracle à tous les problèmes de santé. Ils sont autant utilisés pour guérir des maladies du cœur et des artères, de peau ou de poids, que pour améliorer des performances physiques et sportives. Ainsi, certains culturistes, soucieux de gonfler leur masse musculaire, ingèrent toujours plus de ces produits au risque de se masculiniser de manière irréversible pour les femmes et de devenir impuissants ou stériles pour les hommes. Un trafic de compléments alimentaires et dopants a été démantelé en mars dernier à La Réunion.
Dès lors, plusieurs règles de base s'imposent. Chaque patient devrait informer systématiquement son médecin traitant en cas d'absorption de ces produits. De même, l'étiquetage des compléments alimentaires parfois lacunaires devrait être plus fourni en conseils d'hygiène de vie et d'information sur les risques encourus. Enfin, et puisque les compléments alimentaires sont une notion fourre-tout, il serait pertinent d'opérer une classification officielle de ces produits afin d'éviter la confusion entre les réels compléments alimentaires et les produits dopants.
Elle lui demande de bien vouloir lui faire connaître la position que le Gouvernement entend prendre sur ce dossier.

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Transmise au Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation


Réponse du Secrétariat d'État chargé de la fonction publique publiée le 17/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 16/11/2010

Mme Anne-Marie Payet. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'un meilleur encadrement juridique de la vente et de l'utilisation des compléments alimentaires.

Depuis quelques années, les rayons des pharmacies, parapharmacies ou magasins de diététique proposent en vente libre un grand nombre de ces produits. Avec la popularité grandissante et le développement des nouvelles technologies, Internet a permis l'essor de la vente en ligne des compléments alimentaires. Le marché a doublé depuis l'an 2000, selon le syndicat de la diététique et des compléments alimentaires.

Ces produits sont régis par une réglementation concernant leur fabrication et leur commercialisation, inscrite dans la directive européenne du 10 juin 2002, laquelle a été transposée en droit français en mars 2006. Ils sont définis comme « des denrées alimentaires dont le but est de compléter un régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique ».

Cependant, les compléments alimentaires restent mal connus et sont souvent assimilés, à tort, à des médicaments. Ils ne sont d'ailleurs pas soumis aux mêmes règles d'autorisation de mise sur le marché et ne peuvent donc pas prétendre prévenir, soulager, traiter ou guérir des maladies. Leur fabrication est certes contrôlée, mais pas leur efficacité ni leur toxicité. Certaines substances, bien qu'interdites à la vente, figurent dans la composition des compléments alimentaires disponibles en pharmacie. En effet, les compléments alimentaires contiennent des substances pouvant parfois interagir entre elles ou avec des médicaments. Le manque d'information ou de contrôle de ces produits, en cas de grossesse ou d'allaitement, de maladie chronique ou de traitement de longue durée, peut avoir des effets néfastes sur la santé du consommateur.

Les compléments alimentaires semblent aujourd'hui devenir le remède miracle à tous les problèmes de santé. Ils sont autant utilisés pour guérir les maladies du cœur et des artères, de la peau, le surpoids ou les troubles de la mémoire, que pour améliorer des performances physiques et sportives. Certains culturistes, soucieux de gonfler leur masse musculaire, ingèrent toujours plus de ces produits, au risque, pour les femmes, de se masculiniser de manière irréversible et, pour les hommes, de devenir impuissants ou stériles.

Dès lors, plusieurs règles de base s'imposent. Chaque patient devrait informer systématiquement son médecin traitant en cas d'absorption de ces produits. De même, l'étiquetage des compléments alimentaires, parfois lacunaire, devrait être plus fourni en conseils d'hygiène de vie et d'information sur les risques encourus.

Enfin, et puisque les compléments alimentaires sont une notion fourre-tout, il serait pertinent d'opérer une classification officielle de ces produits afin d'éviter la confusion entre les réels compléments alimentaires et les produits dopants.

Dans leur livre La vérité sur les complémentaires alimentaires, Sue Cyneber et le docteur Jacques Fricker affirment que de nombreux compléments alimentaires sont inutiles, voire dangereux. Certains de ces produits peuvent compenser des déficiences nutritionnelles mais, en général, la population française ne souffre pas d'insuffisance de vitamines. Nous ne constatons pas de carences, disent ces auteurs, mais des doses légèrement inférieures aux apports nutritionnels conseillés.

Bref, la plupart du temps, nous n'avons pas besoin de compléments alimentaires qui ne peuvent pas remplacer une alimentation équilibrée. L'UFC-Que Choisir a publié, en novembre 2008, une étude sur la vitamine C et portant sur trente-trois produits appartenant à trois familles de compléments alimentaires. Certains comprimés sont surdosés, dépassant jusqu'à quatre fois la dose journalière réglementaire. Un surdosage répété peut entraîner des calculs urinaires, des problèmes digestifs et favoriser le vieillissement des cellules.

C'est pourquoi je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir me faire connaître la position que le Gouvernement entend adopter sur ce dossier.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser M. Frédéric Lefèbvre, qui est en train de s'installer dans ses nouvelles fonctions et qui m'a demandé de vous répondre à sa place, un exercice auquel je me plie très volontiers.

Les compléments alimentaires font l'objet d'un cadre réglementaire européen spécifique. Une directive de 2002 les définit et les intègre dans le droit alimentaire. À ce titre, ils sont soumis aux obligations générales du droit alimentaire de conformité, de sécurité et de loyauté de l'information.

Le dispositif national applicable à ces produits, introduit en 2006, complète le cadre européen en prévoyant des procédures d'autorisation pour leur commercialisation en France. Chaque complément alimentaire mis sur le marché est examiné par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Depuis la mise en place de ce dispositif, elle a ainsi étudié 38 000 demandes de commercialisation, dont 15 % ont fait l'objet d'un refus.

À ce stade, la DGCCRF vérifie notamment, sur la base des données scientifiques les plus récentes, qu'aucun ingrédient susceptible d'être préjudiciable à la santé n'a été introduit dans ces produits. La liste des ingrédients autorisés est établie par voie d'arrêté. À ce jour, seul un arrêté reprenant la liste des vitamines et minéraux autorisés ainsi que leurs teneurs maximales dans les compléments alimentaires a été publié. Des arrêtés établissant la liste des autres substances admises, dont les extraits de plantes, sont en cours d'élaboration sur la base des autorisations rendues par la DGCCRF. La publication de ces textes renforcera la transparence des règles applicables à ce secteur. Cela va dans le sens de votre préoccupation.

En matière d'étiquetage, une directive de 2002 prévoit les règles essentielles visant à bien informer le consommateur sur la composition de ces produits et les conditions d'un emploi sûr. Des précautions d'emploi complémentaires vont être prises pour les populations à risque seront intégrées, le cas échéant parmi les conditions d'emploi des ingrédients dont les listes vont être publiées prochainement.

Par ailleurs, il est interdit, pour les compléments alimentaires, comme pour toute autre denrée alimentaire, de faire état de propriétés de prévention, de traitement ou de guérison des maladies humaines. Les allégations concernant les bénéfices pour la santé sont soumises au règlement n° 1924/2006 concernant les allégations nutritionnelles et de santé portant sur les denrées alimentaires, lequel prévoit une procédure d'évaluation et d'autorisation européenne pour ce type de message.

L'ensemble de ce corpus réglementaire vise à garantir un emploi sûr et justifié des compléments alimentaires. Son respect est vérifié par les services de la consommation et de la répression des fraudes, au cours de la fabrication comme de la distribution.

En 2010, plus de 1 500 actions de contrôle ont déjà été menées dans ce secteur. Celles-ci ont conduit notamment au retrait du marché de 22 produits importés qui n'avaient pas été autorisés en raison des risques qu'ils présentaient. En l'absence de danger, les infractions constatées ont donné lieu à 40 procès-verbaux. Enfin, plus de 250 rappels de réglementation ont été adressés aux opérateurs pour des infractions mineures.

Il faut ajouter que, depuis un an, a été lancé un dispositif de vigilance permettant de surveiller l'incidence d'effets indésirables chez les consommateurs de compléments alimentaires.

Vous le voyez, madame la sénatrice, les compléments alimentaires font donc l'objet d'une surveillance étroite de la part des autorités.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse.

À la Réunion comme en métropole, la situation est préoccupante puisque des « affaires » secouent régulièrement le monde du culturisme. En 1997, trente-deux personnes ont été mises en examen, dont six médecins et sept pharmaciens. En 2006, trois culturistes ont été épinglés par les gendarmes, puis jugés par les tribunaux correctionnels, pour être finalement relaxés.

Plus récemment, au mois de mars dernier, un trafic de produits dopants a été démantelé. Selon l'inspecteur général de la DRAS, la direction régionale des affaires sanitaires, les produits saisis lors de cette enquête – anabolisants, hormones de croissance produites en Chine et testostérones – étaient dangereux. Ses utilisateurs risquent des pathologies graves : cancer, maladies cardio-vasculaires, hypertension, diabète, maladie de Creutzfeldt-Jakob. Ces produits pourraient également provoquer une montée de l'agressivité et déboucher sur une violence incontrôlable.

Nous ne pouvons donc rester insensibles et inactifs devant ce problème ; des mesures d'envergure s'imposent. Vous avez annoncé un certain nombre de dispositions, monsieur le secrétaire d'État, mais les spécialistes affirment que, si la fabrication de ces produits est contrôlée, leur toxicité et leur efficacité ne le sont pas. Par conséquent, je compte sur la vigilance du Gouvernement.

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