Question de M. BAILLY Gérard (Jura - UMP) publiée le 18/03/2010

M. Gérard Bailly attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur ce que le Gouvernement attend du monde agricole dans la mise en oeuvre des énergies renouvelables.

Alors que l'agriculture traverse une crise économique sans précédent et en pleine élaboration de la loi de modernisation agricole qui va être discutée prochainement au Parlement, l'agriculture devrait être fortement impliquée dans les énergies renouvelables comme :

- la valorisation de la biomasse (fumier, déchets animaux, ...). La biomasse est une source d'énergie permettant la lutte contre le réchauffement climatique, notamment en terme d'émission de gaz à effet de serre (CO2);

- les biocarburants (céréales agricoles pour le chauffage, huiles végétales, ...) dont on a dit l'importance depuis des années pour remplacer le pétrole et qui semblent bien oubliés par les pouvoirs publics;

- le photovoltaïque que l'on a aussi beaucoup soutenu et qui aujourd'hui voit diminuer sensiblement les prix proposés que ce soit sur les toits ou dans des espaces agricoles.

Il aimerait savoir ce que le Gouvernement attend de l'agriculture dans ces trois domaines de production énergétique. Dans quelles conditions, notamment économiques et de pérennité, les agriculteurs peuvent s'engager dans ces nouveaux débouchés, avec des garanties pour l'avenir et la sérénité nécessaire ?

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Réponse du Secrétariat d'État au logement et à l'urbanisme publiée le 19/05/2010

Réponse apportée en séance publique le 18/05/2010

M. Gérard Bailly. Ma question porte sur les énergies renouvelables et se situe dans le droit fil de celle de notre collègue Bernadette Bourzai.

Monsieur le secrétaire d'État, j'aimerais savoir ce que le Gouvernement attend réellement du monde agricole en matière d'énergies renouvelables.

L'agriculture allemande, nous le savons tous, produit beaucoup plus d'énergie que la nôtre, ce qui assure un profit important aux éleveurs. Dans un contexte de crise économique sans précédent et en pleine élaboration du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, dont nous commencerons l'examen cet après-midi dans cette enceinte, l'agriculture française devrait être fortement impliquée dans le développement des énergies renouvelables.

Je pense à la biomasse – le fumier ou les déchets animaux –, qui devrait être valorisée. C'est en effet une source d'énergie permettant de lutter contre le réchauffement climatique, notamment en termes d'émissions de gaz à effet de serre.

Je pense également aux biocarburants – les céréales agricoles pour le chauffage ou les huiles végétales – dont on affirme l'importance depuis des années pour remplacer le pétrole, mais qui semblent bien oubliés par les pouvoirs publics.

Je pense enfin à l'énergie photovoltaïque, qui a été beaucoup encouragée, mais qui voit aujourd'hui diminuer sensiblement les prix proposés, que ce soit sur les toits ou dans les espaces agricoles.

Monsieur le secrétaire d'État, à un moment où l'agriculture s'interroge et alors que l'on sait qu'elle peut produire beaucoup d'énergie, qu'attendez-vous d'elle dans les trois domaines de production énergétique que je viens de citer ?

Le monde agricole se demande également quelles conditions en termes économiques et en termes de pérennité lui seront offertes, compte tenu du niveau élevé des investissements. Les agriculteurs ne peuvent en effet s'engager dans ces nouveaux débouchés qu'avec des garanties pour l'avenir et toute la sérénité nécessaire.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avec le Grenelle de l'environnement, le Gouvernement a engagé un effort sans précédent pour développer la production et l'utilisation d'énergie renouvelable dans le secteur agricole et dans les territoires ruraux. Je vais passer en revue l'ensemble des projets existants.

Tout d'abord, en ce qui concerne l'énergie photovoltaïque, de nouveaux tarifs d'achat de l'électricité photovoltaïque ont été mis en place. Ces tarifs, qui sont aujourd'hui les plus élevés d'Europe, assurent une juste rémunération aux investissements.

Vous le savez, le photovoltaïque a connu un phénomène d'emballement à la fin de l'année 2009. Le Gouvernement a pris soin, dans ses mesures, de traiter de manière différenciée les projets abusifs ou spéculatifs, d'une part, et les projets de taille raisonnable menés de bonne foi, notamment dans le secteur agricole, d'autre part. Avec un dispositif équitable et soutenable financièrement, le Gouvernement a entendu reconnaître le rôle déterminant du secteur agricole pour l'atteinte des objectifs du Grenelle de l'environnement et la mutation énergétique de notre pays.

Ensuite, s'agissant de la cogénération biomasse, les tarifs d'achat de l'électricité produite à partir de biomasse ont été plus que doublés au 1er janvier 2010.

Par ailleurs, le Gouvernement lance périodiquement des appels d'offres pour la construction de grandes unités de cogénération-biomasse, en privilégiant les zones rurales et les zones de massif. En janvier 2010, 32 projets ont été retenus, pour une puissance cumulée de plus de 250 mégawatts, soit le quart de la puissance d'un réacteur nucléaire.

Nous avons mis en place le Fonds chaleur renouvelable, doté d'1 milliard d'euros pour la période 2009-2011. Ce Fonds chaleur renouvelable, créé par le Grenelle de l'environnement, permet d'accélérer très fortement la construction de chaufferies bois dans les secteurs agricole, tertiaire, résidentiel et industriel.

Le premier appel à projets a été un succès : 150 millions d'euros d'investissements, soit 50 % de plus que ce qui était initialement envisagé. La moitié des projets concerne le seul secteur agroalimentaire, et 80 % des projets se situent en milieu rural. Un second appel d'offres a été immédiatement relancé en octobre 2009.

S'agissant de la méthanisation et de l'injection du biogaz dans le réseau de gaz nature, le Gouvernement a pour objectif de favoriser la valorisation du bio-méthane. Nous avons modifié la législation relative aux installations classées, et un tarif d'achat de l'électricité produite à partir de bio-méthane a été créé.

Enfin, concernant les biocarburants, la France s'est engagée dans un programme ambitieux de développement et met en œuvre une série de mesures permettant d'encourager leur production et leur mise sur le marché. Ainsi, l'objectif européen d'incorporation de 5,75 % a été avancé à 2008 et porté à 7 % en 2010.

La directive relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive « ENR », adoptée sous présidence française dans le cadre du « paquet énergie-climat », prévoit un objectif de 10 % à l'horizon de 2020, avec en outre des critères de durabilité et un objectif global en termes de bilan de gaz à effet de serre.

Voilà, monsieur le sénateur, l'ensemble des dispositions prises par le Gouvernement pour développer ces filières énergétiques en milieu rural et notamment en milieu agricole, sur lequel nous comptons pour atteindre l'ensemble de ces objectifs.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. Le monde agricole, comme je l'ai dit, est en crise et attend beaucoup de cette possibilité de revenus supplémentaires que peut procurer la production d'énergie. Je rappelle qu'en Allemagne, en 2005, 3 500 exploitations utilisaient la méthanisation, alors que la France est en retard à cet égard, avec un nombre d'unités limité. Cela nécessite aussi des investissements très lourds. Il faudra que l'agriculteur soit accompagné, car il n'aura pas les moyens de procéder seul à ces investissements.

Monsieur le secrétaire d'État, je crois beaucoup à l'énergie photovoltaïque, avec des panneaux installés sur les toits des bâtiments des exploitations agricoles – ces investissements peuvent en effet être supportés plus facilement, et les installations ne sont pas gênantes pour l'environnement –, ainsi que sur des terres agricoles non productives – il faut en effet veiller à la préservation des terres agricoles. Mais nous disposons de grands espaces rocheux et plats pour réaliser du photovoltaïque. Il s'agit en tout cas d'une priorité.

Enfin, s'agissant des biocarburants, si l'on en parlait beaucoup voilà sept ou huit ans, la hausse du prix des céréales, qui n'a du reste été qu'un feu de paille, avait fait retomber le problème. Mais aujourd'hui, le niveau du prix des céréales est tel que l'espoir peut renaître, et ce d'autant plus que le pétrole, avec la baisse de l'euro, est susceptible de se renchérir.

Il y a là toute une réflexion à avoir. L'agriculture attend beaucoup de ce domaine des énergies.

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