Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC-SPG) publiée le 26/03/2010

Question posée en séance publique le 25/03/2010

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour le groupe CRC-SPG.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Selon le Président de la République, avec lequel vous êtes d'accord, monsieur le Premier ministre – cela, je vous le concède ! –, « rien ne serait pire que de changer de cap ».

Il veut continuer à alléger les charges sur le travail et à refuser toute augmentation d'impôt pour les riches, accélérer des réformes contestées et stigmatiser encore plus les familles modestes et les étrangers. Curieuse analyse de la sanction par les électeurs de sa politique, de votre politique !

Ce que les électeurs ont sanctionné, c'est une politique pour les plus favorisés, au détriment de l'immense majorité : réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune, bouclier fiscal, exonération de l'impôt sur les sociétés, exonérations patronales sur les heures supplémentaires.

L'infime minorité qui en profite – les financiers et les pouvoirs qui les soutiennent, notamment le vôtre ! – a plongé la France et le monde dans une crise économique et sociale gravissime. Or ils en sortent indemnisés et même récompensés !

M. Roland du Luart. C'est une honte d'entendre cela !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'État a renfloué les banques sans contrepartie, et tout continue comme avant : retraites dorées, bonus des traders, dividendes du CAC 40, etc. Pendant ce temps, les populations payent le prix de la crise : baisse du pouvoir d'achat des salaires et des retraites, précarité, chômage en augmentation de 10 %, déstructuration des services publics... Ces populations vont aussi subir l'augmentation de 9,7 % du prix du gaz, alors que le long hiver a permis à l'entreprise privée GDF-Suez d'engranger d'énormes bénéfices. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

Monsieur le Premier ministre, le message des Français est clair : ils en ont assez de l'injustice sociale, assez de payer une politique en faveur des plus riches. Ils veulent la justice sociale et fiscale. Ils veulent une réponse solidaire du pays à la crise. Ils veulent un changement de politique, changement que, à l'évidence, la droite n'est pas susceptible d'opérer.

Personne ne saurait toutefois comprendre que vous continuiez à provoquer le monde du travail, comme Mme Christine Lagarde sait le faire quand elle justifie le bouclier fiscal en disant que si c'est la partie la plus riche de la population qui en profite, c'est parce que c'est elle qui fait tourner l'économie ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Dominique Braye. Vous ne représentez plus rien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est une provocation pour le monde du travail ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.) Vous pouvez protester, c'est la réalité !

M. Dominique Braye. Un peu de respect !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous devez au moins entendre que la solidarité ne s'adresse qu'aux plus faibles et abroger le bouclier fiscal, cette mesure inique qui rapporte 150 millions d'euros à ses 150 plus gros bénéficiaires. C'est ce que nous vous demandons ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)


Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 26/03/2010

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2010

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Il y a une chose sur laquelle nous serons d'accord : l'importance de la valeur travail.

M. Jean-Pierre Godefroy. Tu parles !

Mme Christine Lagarde, ministre. Vous respectez le travail, je le respecte aussi, notre Gouvernement le respecte et il le démontre depuis 2007.

M. Jacques Mahéas. Baratin !

Mme Christine Lagarde, ministre. Nous nous accorderons également sur ce point : nous avons besoin des deux facteurs, le capital et le travail, pour faire tourner une économie.

M. Didier Boulaud. Et des hommes !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le monde du travail paie votre crise !

Mme Christine Lagarde, ministre. À vous entendre, notre gouvernement, sous l'autorité de François Fillon, aurait à rougir de sa politique. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Didier Boulaud. C'est la France qui rougit !

Mme Christine Lagarde, ministre. Eh bien, j'affirme que nous n'avons pas à rougir de la politique que nous avons mise en œuvre !

Premièrement, s'agissant de la croissance, observons la façon dont les autres nous regardent. Selon la Commission européenne, la France sortira plus vite de la crise actuelle que les autres pays de la zone euro.

M. Jean-Louis Carrère. Et l'Allemagne ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Les prévisions de la Commission pour l'année 2010 font apparaître une augmentation de 1,2 % du PIB de notre pays, soit exactement le même chiffre que pour l'Allemagne et bien plus que la moyenne au sein de la zone euro.

Deuxièmement, aurions-nous à rougir de notre politique fiscale ? Actuellement, alors que la croissance redémarre doucement et qu'elle est encore fragile, la pire des solutions serait de charger le pays avec des impôts supplémentaires.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Provocation !

Mme Christine Lagarde, ministre. Nous ne nous y résignerons pas. Nous n'augmenterons pas les prélèvements obligatoires : ce n'est certainement pas le moment de le faire ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

MM. Didier Boulaud et Jacques Mahéas. Mais le prix du gaz, oui !

Mme Christine Lagarde, ministre. Troisièmement, aurions-nous à rougir de la politique de l'emploi que nous mettons en œuvre ? Ma réponse est non ! Avons-nous des résultats parfaits ? Bien sûr que non ! Le chômage persiste, même si son augmentation est freinée et la situation stabilisée. Au mois de février, le nombre de demandeurs augmentait de 3 300, ce qui est infiniment moins qu'au mois de janvier.

M. Robert Hue. Une augmentation de 13 % en un an !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fait 5000 000 au total !

Mme Christine Lagarde, ministre. Comparons les chiffres : la moyenne mensuelle au premier trimestre 2009 s'élève à 64 000 ; au quatrième trimestre 2009, elle est quatre fois inférieure.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez rayé des chômeurs des statistiques !

M. Jean-Louis Carrère. C'est du Giscard dans le texte !

Mme Christine Lagarde, ministre. Nous enregistrons donc des résultats.

Sur tous les plans évoqués par M. le Premier ministre, qu'il s'agisse de la compétitivité, de la recherche et de l'innovation, de la politique de l'emploi ou de la réduction des déficits publics, je vous appelle, madame Borvo Cohen-Seat, à un effort collectif, parfaitement justifié en période de crise. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Dominique Braye. Pensez à la France, chère collègue !

- page 2134

Page mise à jour le