Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 28/01/2010

M. Yves Détraigne attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie sur la nécessité de promouvoir les emballages réutilisables pour les eaux, boissons raffraichissantes sans alcool (BRSA) et bières dans le circuit «cafés hôtels restaurants» (CHR).

Lors de la discussion au Parlement du projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, un amendement visant à imposer aux cafés, hôtels, restaurants de recourir à des emballages réutilisables pour les bières, BRSA et eaux avait été adopté puis supprimé lors de la commission mixte paritaire au motif qu'un groupe de travail se constituait à ce sujet.

Lors de l'examen, en octobre dernier, du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, il avait déposé et défendu un amendement similaire auquel elle s'était opposée en justifiant que, dans les conclusions dudit groupe, le bilan d'un tel système n'était positif que pour les circuits courts, c'est-à-dire lorsque, par exemple, le consommateur rapporte une bouteille de jus de pomme vide au producteur sur le marché.

Outre le fait surprenant que le Gouvernement paraisse détenir les conclusions d'une étude toujours en cours et dont le travail doit être rendu en février ou mars 2010, il s'inquiète d'une possible confusion entre la consignation des emballages réutilisables dans la grande distribution et celle, déjà largement pratiquée, dans la cadre de la distribution en CHR.

En effet, si le bilan écologique de la consignation des emballages réutilisables dans le cadre de la grande distribution peut être négatif, il est en revanche nécessairement positif dans le cadre de la distribution en CHR puisque le circuit retour existe déjà et que le gisement de bouteilles vides est concentré, homogène et intégré dans des circuits logistiques de livraison, comme l'a d'ailleurs souligné la Commission européenne dans une communication 2009/C107/01.

Ce système de consignation n'étant d'ailleurs pas nouveau en matière d'emballages en brasserie et eaux gazeuses – il était même obligatoire de 1938 à 1989 –, il lui demande de bien vouloir, d'une part, lui faire connaître les véritables raisons de son opposition et, d'autre part, lui expliquer pourquoi les emballages réutilisables semblent condamnés à disparaître alors même que la directive européenne n°94/62/CE incite en premier lieu à encourager la réutilisation des emballages.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de l'écologie publiée le 24/03/2010

Réponse apportée en séance publique le 23/03/2010

M. Yves Détraigne. Madame la secrétaire d'État, je souhaite aujourd'hui revenir vers vous pour évoquer la question des emballages réutilisables pour les eaux, les boissons rafraîchissantes sans alcool et les bières dans le circuit des cafés, hôtels et restaurants, et la nécessité de les promouvoir.

Lors de la discussion au Parlement du projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, dit « Grenelle I », un amendement visant à imposer aux cafés, hôtels et restaurants de recourir à des emballages réutilisables pour les bières, les boissons rafraîchissantes sans alcool et les eaux avait été adopté ; toutefois, malheureusement, cette disposition a été supprimée dans le cadre de la commission mixte paritaire, au motif, je le rappelle, qu'un groupe de travail se constituait sur cette question.

De même, lors de l'examen au Sénat, en octobre dernier, du projet de loi Grenelle II, j'ai déposé et défendu un amendement similaire, auquel vous vous êtes opposée, madame la secrétaire d'État, en arguant que, aux termes des conclusions du groupe de travail précité, le bilan d'un tel système n'était positif que pour les circuits courts, c'est-à-dire lorsque, par exemple, le consommateur rapporte une bouteille vide au producteur directement sur le marché.

Outre qu'il est quelque peu étonnant que le Gouvernement ait paru détenir les conclusions d'une étude toujours en cours à ma connaissance, puisqu'elle doit s'achever prochainement, cette réponse me fait craindre une possible confusion, selon que la consignation des emballages réutilisables se trouve réalisée dans la grande distribution ou dans le cadre de la distribution dans les cafés, les hôtels et les restaurants, où elle est déjà largement pratiquée.

En effet, si le bilan écologique de la consignation des emballages réutilisables dans la grande distribution peut évidemment être négatif, il est nécessairement positif, me semble-t-il, dans le cadre de la distribution dans les cafés, hôtels et restaurants, puisque le « circuit retour » existe déjà et que le gisement de bouteilles vides est concentré, homogène et intégré dans des systèmes logistiques de livraison, comme l'a d'ailleurs souligné la Commission européenne dans une communication du 9 mai 2009.

Ce système de consignation n'étant pas nouveau en matière d'emballages en brasserie et en eaux gazeuses – il était même obligatoire entre 1938 et 1989 –, je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir, d'une part, me faire connaître les véritables raisons de votre opposition à la remise en vigueur de ce mécanisme, et, d'autre part, m'expliquer pourquoi les emballages réutilisables semblent condamnés à disparaître alors même que la directive européenne du 20 décembre 1994 encourage leur réutilisation.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur le sénateur, je me souviens de ce débat sur les consignations. Nous nous opposons à ce mécanisme parce que les conclusions définitives de l'étude portant sur le système de consignation pour les bouteilles réutilisables du secteur des cafés, hôtels et restaurants sont attendues pour la fin du premier semestre de l'année 2010.

Il ressort des conclusions provisoires de cette étude que la généralisation du dispositif de consignation à toutes les boissons du secteur des cafés, hôtels et restaurants ne semble pas pertinente.

En effet, les caractéristiques des marchés sont très différentes selon le type de boissons considéré. Pour nombre d'entre eux, l'intérêt d'une consigne pour réutilisation ou recyclage, par rapport à des dispositions classiques de collecte sélective, n'est pas démontré.

En revanche, pour certaines boissons, notamment dans le cas d'emballages en verre et de fûts métalliques, une consigne pour réutilisation serait de nature à apporter un réel bénéfice environnemental.

À ce titre, comme l'a montré l'état des lieux de la consignation des bouteilles dans le secteur des cafés, hôtels et restaurants en France, la réutilisation est nulle pour le lait, les alcools autres que la bière et le vin, dont les emballages sont extrêmement diversifiés à des fins de commercialisation ; elle est peu développée pour les jus de fruits, qui sont de plus en plus souvent conditionnés dans des briques alimentaires non réutilisables ; elle est minoritaire pour les vins de table et les boissons rafraîchissantes sans alcool ; en revanche, elle est assez développée pour les eaux embouteillées et majoritaire pour les bières.

Les comparaisons internationales confortent ce constat. S'il est envisageable de consolider l'existant, il ne semble pas opportun de chercher à étendre le champ des emballages consignés à des champs qui ne seraient pas pertinents.

Par ailleurs, je note que, selon les études environnementales menées dans d'autres pays européens, la mise en place d'un système obligatoire de consignation des bouteilles réutilisables en verre a entraîné un effet pervers, puisqu'elle a généré un transfert de la consommation vers des emballages à usage unique fabriqués à partir d'autres matériaux. Tout dispositif de consignation devrait donc porter sur l'ensemble des matériaux, et pas uniquement sur le verre.

En conséquence, le Gouvernement proposera une extension du dispositif selon les termes suivants : une consignation pour réutilisation des eaux embouteillées, des boissons rafraîchissantes sans alcool et des bières ayant un volume supérieur à 0,5 litre ; une consignation pour réutilisation ou recyclage pour les mêmes boissons de volume inférieur à 0,5 litre.

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui est bien plus précise et compréhensible que celle qui m'avait été apportée naguère.

En effet, les mesures adoptées à la suite du Grenelle de l'environnement ne pourront être mises en œuvre que si nous faisons preuve de pédagogie. Elles ne constitueront un succès que si les populations y adhèrent. Les décisions qui seront annoncées et adoptées devront être comprises des Français, et donc bien expliquées à ces derniers.

Madame la secrétaire d'État, je vous remercie des explications tout à fait convaincantes que vous m'avez apportées.

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