Question de M. NAVARRO Robert (Hérault - SOC) publiée le 21/01/2010

M. Robert Navarro souhaite rappeler l'attention de M. le ministre chargé de l'industrie sur la restructuration en cours dans le groupe pharmaceutique Sanofi-Aventis.

L'actualité l'oblige à l'interroger à nouveau à ce sujet ; il constate que malgré la réponse apaisante reçue voici plusieurs semaines, le problème posé par les projets de Sanofi-Aventis reste réel. Il rappelle que cette restructuration de vaste ampleur, qu'aucune raison économique ne semble justifier, concerne le secteur Recherche et Développement du groupe. Elle affectera environ 1 300 salariés et entraînera la fermeture ou la cession de plusieurs sites. La recherche pharmaceutique française en sera atteinte.

Il s'inquiète tout particulièrement du sort du site de Montpellier, sur lequel 230 postes devraient disparaître. Il déplore également le transfert du département d'oncologie à Ivry et l'arrêt de certains axes de recherche. Cette restructuration aura des conséquences très graves sur l'emploi dans l'agglomération montpelliéraine. Il observe que cette restructuration semble indiquer une faible volonté de Sanofi-Aventis de s'engager dans des projets ambitieux de recherche ; cela met en jeu l'avenir de l'industrie pharmaceutique.

Il lui demande à nouveau que des garanties soient données pour maintenir les activités de R&D sur le site de Montpellier et de s'engager pour préserver le développement de la recherche pharmaceutique et les emplois qui en sont la condition première et nécessaire.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la politique de la ville publiée le 17/02/2010

Réponse apportée en séance publique le 16/02/2010

M. Robert Navarro. J'ai déjà interrogé M. Estrosi au sujet de la restructuration du groupe Sanofi-Aventis. Sa réponse s'était voulue apaisante et, je l'avais noté, très fidèle à la ligne du groupe. Aujourd'hui, tout semble confirmer mes craintes et celles des personnels.

Cette restructuration de vaste ampleur concerne principalement les activités de recherche et développement de Sanofi-Aventis. Pourtant, le groupe a réalisé plus de 8 milliards d'euros de profits en 2009. Alors qu'il envisage de supprimer des emplois, on apprend qu'il a doublé depuis 2003 le montant des dividendes versés aux actionnaires.

Et, ne l'oublions pas, la fabrication du vaccin contre le virus de la grippe A est venue augmenter des profits déjà importants, avec l'aide du Gouvernement.

Nous n'avons pas affaire à une entreprise au bord de la faillite. Quand M. Estrosi et la direction invoquent les difficultés plus grandes liées à la concurrence, ils ne parviennent pas à me convaincre.

Cette restructuration concerne environ 1 300 salariés pour la seule recherche et développement, mais, au total, 3 000 postes seront supprimés en un an, sans réelle consultation des personnels. Et ce n'est, semble-t-il, qu'un début !

Elle entraînera aussi la fermeture de plusieurs sites. Plusieurs axes thérapeutiques souffriront de cette restructuration, accompagnée d'un vaste mouvement de délocalisation.

Je suis tout particulièrement inquiet pour le sort du site de Montpellier, où 230 postes devraient disparaître : la direction parle de départs « volontaires » mais, on le sait bien, ils seront « contraints ».

Le département d'oncologie sera fermé à la fin de cette année. La recherche en oncologie serait localisée à très court terme à Cambridge aux États-Unis, avec un effectif de 120 salariés. Toute la recherche en oncologie de Sanofi-Aventis deviendrait une entreprise autonome financièrement et en termes de gouvernance.

Je crois que l'on peut dire que Sanofi-Aventis délocalise sa recherche sur le cancer, comme Renault l'a fait avec la fabrication de la Clio.

Cette restructuration aura des conséquences très graves sur l'emploi dans l'agglomération montpelliéraine. Quelles garanties existent pour le maintien, à terme, des activités de recherche et développement sur le site de Montpellier ?

Sous couvert de décloisonnement, le groupe cherche à ouvrir ses activités à des partenaires extérieurs : ces alliances se traduisent par une diminution des dépenses internes en recherche et développement et des réductions d'effectifs. Mais comment Sanofi-Aventis pourra-t-il, dès lors, s'engager dans des projets prometteurs et ambitieux ?

Le groupe semble vouloir se tourner vers des filons très rentables et peu risqués. La recherche pharmaceutique devrait, à mon sens, obéir à d'autres impératifs que ceux du seul profit, et d'abord à ceux de la santé publique. C'est son avenir et celui de notre système de santé qui sont en jeu.

On parle d'aides publiques dans le cadre de l'emprunt. Sanofi-Aventis bénéficie aussi du crédit d'impôt recherche, et notre système de sécurité sociale lui assure sa pérennité. Madame la secrétaire d'État, cela vous semble-t-il compatible avec la restructuration en cours de cette entreprise ?

Depuis plusieurs semaines et aujourd'hui même, les salariés, à Montpellier et dans toute la France, sont mobilisés. Je souhaite que vous entendiez leur voix et que vous vous engagiez davantage, en interpellant la direction de Sanofi-Aventis, pour préserver le développement de la recherche pharmaceutique et les emplois qui en sont la condition première et nécessaire.

Avec la crise, nous devons renforcer la notion de stakeholders : le secteur de la santé, où les liens avec toute la société sont plus évidents, doit être le premier pour bâtir ce rééquilibrage du pouvoir entre l'entreprise et toutes les parties prenantes – les employés, les citoyens, les communes, les départements, les régions et l'État.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser mon collègue Christian Estrosi, qui m'a demandé de vous apporter la réponse suivante.

Le site Sanofi-Aventis de Montpellier, sur lequel vous appelez l'attention du Gouvernement, est l'un des plus importants sites de recherche et développement du groupe. Il emploie actuellement 1 325 personnes en contrat à durée indéterminée.

Un projet de nouvelle organisation de la R&D, recherche et développement, en France, a été présenté le 30 juin 2009, lors d'un comité central d'entreprise.

Ce projet s'accompagne d'un plan d'adaptation faisant appel au seul volontariat et comprenant des dispositifs de cessation anticipée d'activité – entièrement pris en charge par l'entreprise – et de départs volontaires pour projet personnel. Ce plan pourrait concerner potentiellement jusqu'à 170 personnes sur le site de Montpellier.

Le projet prévoit également des regroupements d'activité. Dans ce cadre, les équipes de recherche en oncologie, actuellement basées à Montpellier, seraient localisées, à terme, sur le site de Vitry-sur-Seine. Cela concerne potentiellement 80 personnes.

Concernant tout particulièrement les salariés du site montpelliérain, la direction de la R&D a pris l'engagement de repositionner sur le site les personnes qui ne seraient pas mobiles sur la région parisienne. Les autres départements du site trouveront leur place dans la nouvelle organisation en conservant leur localisation actuelle.

Le site de Montpellier n'est en aucune façon menacé : comptant, à terme, plus de 1 100 salariés, il restera positionné comme l'un des sites les plus importants de la R&D de Sanofi-Aventis.

Pour conclure, je tiens à vous rappeler, monsieur le sénateur, qu'entre 2008 et 2010 le groupe aura investi 217 millions d'euros sur le site de R&D de Montpellier, dont 150 millions déjà engagés.

Plus globalement, les dépenses de R&D France du groupe Sanofi-Aventis ont été de 1,517 milliard d'euros pour la pharmacie, auxquels s'ajoutent 294 millions d'euros pour l'activité vaccins, soit un montant total de 1,811 milliard d'euros.

Sur les trois dernières années, les dépenses de R&D France demeurent stables, son budget prévisionnel pour 2010 est de 1,715 milliard d'euros – pour la pharmacie et les vaccins.

Les ressources engagées par le groupe, en France, représentent près de 35 % de la recherche pharmaceutique française.

Comme vous le voyez, le Gouvernement veille au développement de la recherche pharmaceutique en France.

M. le président. La parole est à M. Robert Navarro.

M. Robert Navarro. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État, et j'en prends note.

Je resterai malgré tout très vigilant, n'ayant pas pour habitude de faire confiance aux groupes qui font des profits faramineux et qui se permettent, malgré tout, de licencier du personnel. Je ne comprends pas cette attitude : on double les dividendes des actionnaires, on obtient 8 milliards d'euros de bénéfices sur une année mais on se permet de licencier.

En période de crise et avec un taux de chômage à 18 %, je ne comprends pas qu'on agisse ainsi !

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