Question de M. DOUBLET Michel (Charente-Maritime - RPR) publiée le 09/12/1999

M. Michel Doublet attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la réforme des tribunaux de commerce, dont les propositions ont entraîné de nombreuses démissions de juges commerciaux estimant qu'il n'y avait eu aucune concertation dans leur élaboration. En conséquence, il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour associer les juges commerciaux à cette réforme.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 20/04/2000

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le programme de réforme de la justice commerciale et de l'environnement juridique de l'entreprise, qu'elle a annoncé conjointement avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le 14 octobre dernier, prévoyait, outre la refonte de la carte des tribunaux de commerce, du statut des juges consulaires et des auxiliaires de justice et celle des lois de 1984 et 1985 sur le traitement des difficultés des entreprises, la réforme des tribunaux de commerce eux-mêmes. Si les juges consulaires, pour la plupart, remplissent leur mission dans le respect des règles de droit, les justiciables, les pouvoirs publics, les professionnels du droit et les juges consulaires eux-mêmes s'attachent à reconnaître que la justice commerciale n'est plus adaptée ni dans son fonctionnement ni dans son implantation territoriale. La mixité, c'est-à-dire l'association de juges élus et professionnels dans une même formation de jugement, a pour objectif d'assurer une justice de qualité puisque se trouveront réunies la connaissance des règles de fond et de procédure et la perception, pour chaque affaire, de sa dimension économique. Les modalités de la mise en uvre de la mixité ont été étudiées par une commission que le garde des sceaux a constituée avec M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le 23 décembre 1998 et qui comportait, dans sa composition, un président de tribunal de commerce. Celle-ci a procédé à plus de cent quarante auditions. Elle a, ainsi, été amenée à consulter des représentants du monde économique, des professions judiciaires et juridiques, des magistrats du corps judiciaire et des juges consulaires. Sur la base des conclusions du rapport de cette commission, le gouvernement a arrêté, le 31 mai 1999, une réforme des tribunaux de commerce reposant sur trois grands principes. Le président du tribunal de commerce restera un juge élu avec des pouvoirs propres aménagés et encadrés pour tenir compte de l'introduction de la mixité et pour garantir l'autonomie des formations de jugement. Il conserve en matière juridictionnelle l'ensemble de ses pouvoirs propres qu'il s'agisse d'ordonnances sur requête ou des référés et ce quel que soit le contentieux concerné. Des formations de jugements mixtes, associant magistrats professionnels et juges élus seront présidées par les magistrats du corps judiciaire et auront compétence pour traiter des procédures collectives, des litiges entre associés des sociétés commerciales, du contentieux spécialisé, des litiges mettant en cause les établisement de crédit et les entreprises d'investissement et ceux relatifs à des actes de commerce mettant en cause des non-commerçants. Le reste des contentieux attribués aux tribunaux de commerce continuera à relever des formations de jugement purement consulaires présidées par un juge élu. S'agissant plus précisément des fonctions de juge des tribunaux de commerce, est maintenu le principe de bénévolat auquel les juges consulaires sont très atachés. En toute hypothèse, au-delà de ces orientations quant à la composition et à la présidence des formations de jugement, cette réforme ne remet aucunement en cause la plénitude des attributions de tout juge. Quel que soit son statut, quelle que soit sa fonction, chacun poura s'exprimer dans le cadre du délibéré collégial, aucun membre de la formation de jugement n'ayant voix prépondérante. Plusieurs mesures d'accompagnement seront mises en uvre pour assurer la réussite de la réforme. Elles porteront notamment sur la formation des juges, les règles déontologiques et le mode d'élection. Parallèlement, les juges consulaires remplissant notamment des conditions d'expérience dans les fonctions consulaires pourront accéder aux cours d'appel. Ils seront amenés à participer en qualité de conseillers exerçant à titre temporaire aux formations de jugement qui connaissent des recours formés contre les décisions rendues en première instance dans les matières relevant des tribunaux de commerce. Les principes de cette réforme ont été présentés et débattus au cours de deux réunions qui se sont tenues à la chancellerie ; la première le 1er juillet 1999 regroupant les représentants de la conférence générale des tribunaux de commerce et les présidents les plus importants de ces juridictions, la seconde, le 14 septembre dernier, avec les représentants de la conférence générale des tribunaux de commerce et les présidents des régions consulaires. Par ailleurs, une campagne d'information et d'explication a été conduite par des représentants de la chancellerie qui se sont déplacés à la fin de l'année 1999 dans le ressort de onze cours d'appel. Ils ont ainsi pu rencontrer, au sein des vingt et un tribunaux de commerce dans lesquels ils se sont rendus, près de six cents juges et représentants du monde consulaire. Les débats qui se sont noués à ces différentes occasions ont été riches. Certains des avis exprimés ont été pris en compte. Il ne saurait, cependant, être question de remettre en cause les orientations majeures retenues qui confèrent à cette réforme son équilibre, en permettant un véritable échange des compétences, sa cohérence aux divers stades de la procédure comme avec le reste de l'organisation judiciaire et enfin sa lisibilité afin de donner une image rénovée de la justice économique en France.

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