Question de M. DEMERLIAT Jean-Pierre (Haute-Vienne - SOC) publiée le 07/12/1999

M. Jean-Pierre Demerliat souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les difficultés rencontrées par les communes ou les particuliers pour obtenir l'autorisation d'ouvrir un bureau de tabac dans les petites communes. Il est parfaitement conscient des dangers que peut occasionner l'abus du tabac sur la santé, mais il sait aussi que si les habitants d'une petite commune n'ont pas la possibilité de se procurer leur " drogue " chez eux, ils iront faire l'ensemble de leurs achats dans une ville plus grande, ce qui aura pour conséquence de faire péricliter les commerces des toutes petites communes et accentuera le phénomène de désertification des zones rurales.

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Réponse du ministère : Budget publiée le 09/02/2000

Réponse apportée en séance publique le 08/02/2000

M. Jean-Pierre Demerliat. Madame la secrétaire d'Etat, j'aimerais attirer votre attention sur les conditions de création
ou de réouverture de débits de tabac dans les petites communes.
La vente du tabac au détail, en France, est un monopole d'Etat. La tutelle en est exercée par la direction générale des
douanes, qui fixe les règles en matière d'ouverture ou de réouverture des bureaux de tabac.
Les douanes subordonnent leur accord à l'implantation d'un bureau de tabac à l'existence d'une population communale
d'au moins 750 habitants. Ce seuil peut être abaissé à 500 habitants si, alentour, aucun bureau de tabac ne peut être
atteint en moins de dix minutes en véhicule motorisé.
L'administration considère invariablement que, en deçà de ce seuil, la rentabilité du débit n'est pas assurée.
Néanmoins, madame la secrétaire d'Etat, l'application de ces règles connaît un assouplissement depuis août 1999. En
effet, dans les zones de revitalisation rurale, l'administration déroge parfois à ses règles et peut apprécier les seuils de
manière plus ou moins large. Elle peut faire de même quand la commune ou un groupement de communes est
propriétaire du fonds de commerce donné en location-gérance.
Madame la secrétaire d'Etat, entendons-nous bien : je ne suis pas un partisan acharné de l'augmentation de la
consommation de tabac dans notre beau pays, mais nous savons bien tous qu'un fumeur ira à coup sûr faire ses autres
achats là où il sera certain de trouver sa drogue quotidienne.
Nombre d'élus ruraux essaient de lutter contre la désertification de nos campagnes, de revitaliser leurs petites
communes et d'offrir des services de proximité à leurs populations isolées en créant des « multiples ruraux », souvent
dans des locaux communaux et avec des gérants aidés par la ou les collectivités.
Si le fumeur ne trouve pas son produit habituel dans de tels établissements, il se dirigera directement vers un bourg
plus important, souvent le chef-lieu du canton, et le « multiple rural » dont je parlais à l'instant perdra définitivement un
client nécessaire à sa survie.
Il serait peut-être temps, madame la secrétaire d'Etat, que l'administration, si elle veut continuer à se mêler de
commerce, envisage de se conformer aux usages en vigueur dans ce secteur d'activité.
J'ai donc l'honneur de vous demander de bien vouloir essayer de faire comprendre aux douanes que les élus locaux, les
maires en particulier, sont les mieux placés pour juger de la viabilité d'un commerce situé dans leur commune.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur les difficultés
rencontrées pour obtenir l'autorisation d'ouvrir un bureau de tabac dans les petites communes.
Les critères retenus pour la création des débits de tabac en milieu rural répondent à un double souci : assurer un
service de proximité, tout en préservant l'équilibre du réseau existant. Ils reposent sur la prise en compte de la densité
de la population concernée, qui doit être suffisante pour garantir la viabilité du commerce. C'est pourquoi la création d'un
débit de tabac est réservée aux communes d'au moins cinq cents habitants. En outre, il est tenu compte des débits
existants dans les communes voisines.
Des assouplissements ont cependant été prévus pour favoriser le maintien des activités en milieu rural, dans le cadre
de la convention « mille villages de France », et pour les communes classées en zone de montagne.
Par ailleurs, de nouvelles dispositions sont entrées en vigueur en septembre 1999 pour les zones de revitalisation rurale
: il peut être maintenant dérogé à la règle selon laquelle le débitant doit être propriétaire du fonds de commerce annexe
au comptoir de vente. Ainsi, les personnes qui louent leur fonds de commerce ou l'exploitent en franchise peuvent
désormais être agréées.
Il peut être également dérogé à l'obligation pour un débitant d'apporter personnellement 25 % de la valeur du fonds de
commerce qu'il achète ou qu'il crée.
Enfin, un nouvel effort a été accompli à partir du 1er janvier 2000 en faveur des débits de taille modeste. En effet, le seuil
à partir duquel les débitants doivent verser une redevance à l'Etat est porté de 250 000 francs à 300 000 francs.
Je souhaite donc vous rassurer, monsieur le sénateur : au cours des derniers mois, nous avons pris un ensemble de
mesures qui ont pour objectif de faciliter le maintien ou la création de débits de tabac dans les zones rurales. Le débit
de tabac assure, en effet, un service public de proximité auquel le Gouvernement est attaché.
M. Jean-Pierre Demerliat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, des précisions que vous m'avez apportées.
Au demeurant je ne saurais trop insister sur la nécessité qu'il y a, pour vos services, d'apprécier les situations au cas
par cas de manière extrêmement généreuse, si je puis m'exprimer ainsi - encore que la générosité n'ait rien à voir en la
matière, puisqu'il s'agit maintenant, à mon sens, d'un commerce comme les autres, et je ne vois pas pourquoi
l'administration jugerait de la rentabilité de tel ou tel commerce.
Je sais bien que, la consommation baissant - quoique fumeur, je ne puis que m'en féliciter, dans la mesure où l'état de
santé général des habitants de notre beau pays m'intéresse également - la multiplication des lieux de vente ne fait pas
forcément plaisir aux commerçants qui sont déjà installés. Mais cela, c'est l'intérêt particulier. L'intérêt général dicte de
maintenir des lieux de vie dans nos petites communes.
Dans ce que j'appelais les « multiples ruraux », le tabac est le produit d'appel qui attire les gens ; mais s'y ajoutent
souvent des produits d'épicerie, une buvette, un dépôt de pain, un dépôt de viande, etc. C'est l'endroit qui permet aux
petites communes de continuer à vivre. S'il n'existe plus, les gens iront dans les grandes surfaces du chef-lieu de
canton ou du chef-lieu de département.
En outre, comme vous le disiez, le bureau de tabac rend un service de proximité : c'est l'endroit où l'on peut se procurer
vignettes automobiles, timbres fiscaux et timbres-amendes, notamment.
Je ne saurais donc trop insister sur la nécessité qu'il y a à apprécier de manière extrêmement large toutes les
demandes qui vous parviendront. Je vous en remercie d'avance, madame la secrétaire d'Etat.

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