Question de M. HAENEL Hubert (Haut-Rhin - RPR) publiée le 30/11/1999

M. Hubert Haenel rappelle à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement l'intérêt de la démarche novatrice, communément appelée expérimentation de la régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs, qui a été mise en oeuvre dans sept régions. Cette réforme, qui a pour but un meilleur service public et une approche plus fine de l'aménagement du territoire, a déjà eu plusieurs effets bénéfiques conséquents. Elle a permis de démontrer que la décentralisation pouvait être expérimentée et négociée pour s'adapter aux réalités géographiques, historiques, économiques des territoires. Elle a contribué à mettre fin à la politique du tout TGV (train à grande vitesse). M. le ministre a indiqué, le 14 octobre, sa volonté de déposer, dans les plus brefs délais, un projet de loi pour la généralisation rapide de la régionalisation. Depuis lors, de nombreux échanges ont eu lieu, qui ont créé un climat d'incertitude. L'annonce prématurée et incomplète d'un changement éventuel de cap avec une accélération du calendrier législatif a entraîné des interprétations souvent erronées et contradictoires des intentions de l'Etat, des conseils régionaux et de la Société nationale des chemins de fer (SNCF), qui ont eu pour effet de brouiller la perception que peuvent avoir les uns et les autres des objectifs poursuivis, des délais impartis et des voies et moyens pour y parvenir. Il lui demande de bien vouloir rappeler, comme il l'a fait à plusieurs reprises, son profond attachement à la réforme et à la démarche retenue pour la mettre en oeuvre, afin d'éviter à tout prix que les atermoiements actuels ne conduisent à une démobilisation de l'ensemble des partenaires. Il lui demande de recadrer rapidement l'ensemble du dispositif conduisant à sortir de l'expérimentation pour entrer au plus vite dans la généralisation, tout en tenant compte du temps nécessaire pour mener à bien la phase législative et du délai qu'impliqueront la confrontation, le rapprochement et l'ajustement des points de vue et interrogations des uns et des autres par rapport à la transparence, à la lisibilité et à la certification des comptes train express régional (TER), opposables aux régions, cette situation pouvant nécessiter d'utiliser temporairement des comptes provisoires ; il insiste enfin sur la garantie que l'Etat et la Société nationale des chemins de fer (SNCF) devront donner aux régions pour ne pas unilatéralement rompre ou remettre en cause les engagements financiers pris à l'égard de celles-ci, et la nécessité de dresser un bilan périodique de la réforme, pour permettre les ajustements appropriés.

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 19/01/2000

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2000

M. Hubert Haenel. L'expérimentation de la régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs - dont j'ai été l'un des
initiateurs - avait pour objet de tester une nouvelle organisation du service public ferroviaire dans les régions et d'irriguer
plus finement les territoires grâce à une approche intermodale globale.
Cette expérimentation est un succès. Elle a permis de démontrer que la décentralisation pouvait permettre de « coller »
au terrain, si je puis dire, de s'adapter aux réalités géographiques, historiques, économiques et sociales.
L'annonce du projet de loi qui devrait conduire à une généralisation rapide de la régionalisation a suscité quelques
craintes et interrogations, voire quelques suspicions, venant de tous bords.
Les conseils régionaux peuvent en effet interpréter l'accélération annoncée par l'Etat comme une manoeuvre pour leur
forcer la main alors qu'ils ne disposent pas de toutes les données indispensables pour décider. L'Etat peut aussi voir
dans l'attitude de l'Assemblée des régions de France la manifestation d'une sorte de frilosité de quelques régions, qui
entraînent les autres dans leur sillage, et un prétexte pour ne pas aboutir à la généralisation de la régionalisation. Quant
au personnel de la SNCF, il peut craindre qu'un feu orange ne soit soudainement mis au travers de la voie et ne cache
quelques arrière-pensées. Enfin, les usagers peuvent craindre de faire les frais de ce contretemps et d'une éventuelle
décélération.
L'attachement personnel que je porte à l'aboutissement de cette réforme me conduit, monsieur le ministre, à vous poser
quelques questions.
Devant le Sénat, qui est très souvent en pointe sur ces sujets, pouvez-vous, non pas nous rassurer sur vos intentions,
que je crois dépourvues de toute arrière-pensée...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est vrai !
M. Hubert Haenel. ... mais préciser les points suivants : où en est le projet gouvernemental ? Quand souhaitez-vous
qu'il soit adopté ? Quel délai impartissez-vous aux partenaires pour conclure - 1er janvier 2001 ou 1er janvier 2002 ?
Quelles garanties l'Etat donnera-t-il aux régions sur la pérennité de la contribution qu'il leur versera ? Dans quels délais
la SNCF pourra-t-elle produire, donc opposer aux régions et à l'Etat, des comptes transparents et certifiés ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Votre question mériterait un débat
bien plus approfondi que le cadre restreint de la séance de questions orales ne peut le permettre. Mais, rassurez-vous,
ce débat aura lieu, et vite.
Sur le fond, l'expérimentation de la régionalisation des services ferroviaires régionaux de voyageurs est un succès - tout
le monde le reconnaît - qui ne peut que nous réjouir et satisfaire l'un des pères de l'expérimentation que vous êtes.
Nous constatons en effet des gains de trafics plus importants dans les régions participant à l'expérimentation que dans
les autres.
Les raisons de ce succès sont incontestablement à rechercher dans une meilleure définition des besoins à l'échelon
régional, dans une plus grande proximité vis-à-vis de l'usager et dans un partenariat plus riche et constructif entre la
SNCF et les régions.
Plus personne ne conteste aujourd'hui, je crois, l'intérêt de la généralisation à l'ensemble des régions du transfert de
compétences en matière de service régional de voyageurs. Il convient maintenant d'en définir les modalités techniques,
juridiques, financières et législatives ainsi que les délais ; ce sont les questions que vous posez.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que je m'emploie à ce que cela se fasse rapidement et dans des conditions
optimales pour tous. Je vous précise que les mesures législatives nécessaires figureront dans le projet de loi solidarité
et renouvellement urbains, qui sera présenté en conseil des ministres au début du mois de février et qui devrait être
discuté à l'Assemblée nationale en mars et au Sénat en avril.
Vous le savez, il nous faut traiter plusieurs questions. Il s'agit tout d'abord de celle qui concerne le montant des
concours financiers nécessaires. Cette décentralisation s'inscrit dans le cadre des principes généraux des lois de
décentralisation, fondés sur un transfert de ressources correspondant à l'exercice de la compétence transférée, afin qu'il
n'y ait pas de transfert de charges supplémentaire.
Ainsi, la compensation nécessaire tant au renouvellement du matériel qu'à l'apurement de l'éventuel déficit du compte
des services ferroviaires régionaux à la date du transfert sera inscrite dans la loi de finances initiale de l'année de
transfert. La commission consultative sur l'évaluation des charges résultant des transferts de compétences donnera, en
cours d'exercice, un avis sur le montant des charges transférées, sur la base des comptes 2000, de manière à ajuster,
s'il y a lieu, le montant de la compensation dans la loi de finances rectificative de la fin de l'exercice.
S'agissant, ensuite, de la date du transfert, la dynamique engagée et l'intérêt qu'elle suscite auprès des autres régions
me conduisent à penser que le transfert doit pouvoir commencer dès le 1er janvier 2001.
Cela dit, certaines régions n'auront pas encore pu, à cette date, créer toutes les conditions objectives nécessaires à la
mise en place du dispositif final. Aussi, je crois qu'il convient d'être pragmatique et d'envisager, pour elles, la possibilité
de mettre en oeuvre la régionalisation au 1er janvier 2002, afin que tout se passe dans les meilleures conditions.
Vous évoquez la nécessité de dresser un bilan périodique de la réforme : il est prévu un rapport au Parlement cinq ans
après l'entrée en vigueur de la loi, sur la base d'une évaluation conjointe de l'Etat et des régions.
Je partage tout à fait votre volonté de voir traités au fond tous les sujets, et c'est d'ailleurs dans ce sens qu'ont
commencé, depuis plusieurs mois, les travaux techniques entre les services des régions et ceux du ministère. Une
concertation très importante a été engagée, qui a permis à tous les points de vue de s'exprimer. J'ai reçu moi-même les
présidents de région pour en débattre, puis j'ai adressé des propositions à l'Assemblée des régions de France le 8
décembre dernier, afin de faciliter la poursuite de la concertation.
Dans cette perspective, les articles relatifs à la régionalisation des services régionaux de voyageurs ont été transmis au
Conseil d'Etat.
Bien entendu, la transmission du projet de loi au Conseil d'Etat n'arrête pas la concertation. Elle se poursuivra avant et
à l'occasion du débat parlementaire afin de rechercher le meilleur équilibre possible tout en respectant les attentes de
chacun des partenaires.
M. Hubert Haenel. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel. Je remercie M. le ministre de sa réponse. Je constate une nouvelle fois que nous sommes souvent
sur le même rail. (Sourires.)
J'attends avec impatience le débat que nous aurons sur ce sujet en avril prochain.

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