Question de M. MARTIN Pierre (Somme - RPR) publiée le 28/10/1999

M. Pierre Martin attire l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les conséquences induites par la modification du zonage de la PAT (prime à l'aménagement du territoire) envisagée par la délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) pour la région Picardie et en particulier le département de la Somme. Les critères retenus par le gouvernement pour l'attribution de la PAT manquent de cohérence tant du point de vue géographique que du point de vue économique. En réponse à une question écrite posée le 22 avril 1999, elle a précisé que " le zonage, en France comme ailleurs, ne pourra plus épouser les contours des zones industrielles, mais il devra incorporer la population des bassins d'emploi dans la totalité ". Ce dernier zonage menace d'isolement économique de nombreux cantons ; le canton d'Hallencourt en constitue un exemple parfait. Celui-ci bénéficiait jusqu'alors de la PAT comme du FEDER (fonds européen de développement économique régional). Or, aujourd'hui dans le zonage de la PAT présenté par le gouvernement, le canton d'Hallencourt en est exclu. Cette situation constitue, à l'évidence, une anomalie géographique et historique. Mme le Ministre avait pourtant montré certains signes de souplesse dans l'élaboration de ce nouveau zonage, mais cette souplesse n'a pas atténué la rigidité des nouveaux critères déterminés par le gouvernement et les conséquences désastreuses qui en découlent pour de nombreux cantons. C'est pourquoi, se faisant l'interprète des élus de la Somme, il lui demande d'une part, quelles sont les intentions du gouvernement pour remédier à cette situation et notamment pour réintégrer le canton d'Hallencourt dans le futur zonage de la PAT, mais d'autre part celles concernant le zonage " Objectif 2 " puisque la Picardie, et plus particulièrement le département de la Somme, apparaissent une nouvelle fois victimes d'une décision pénalisante compte tenu des derniers critères d'éligibilité déterminés par le gouvernement.

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Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 10/11/1999

Réponse apportée en séance publique le 09/11/1999

M. Pierre Martin. Madame le ministre, je souhaite appeler votre attention, une nouvelle fois, sur les conséquences
induites par la modification du zonage de la prime d'aménagement du territoire pour la région Picardie et, en particulier,
pour le département de la Somme.
Les critères retenus par le Gouvernement pour l'attribution de la PAT manquent de cohérence du point de vue tant
géographique qu'économique.
En réponse à une question écrite que je vous avais posée le 22 avril 1999, vous m'avez apporté, madame le ministre, la
précision suivante : « Le découpage du zonage, en France comme ailleurs, ne pourra plus épouser les contours des
zones industrielles, mais il devra incorporer la population des bassins d'emploi dans la totalité. » C'est ici que les
difficultés commencent pour notre département, en particulier pour de nombreux cantons menacés, de fait, d'isolement
économique.
Un exemple parmi d'autres, celui du canton d'Hallencourt, dont je suis l'élu, est particulièrement éclairant. Ce canton
répond à l'ensemble des critères retenus pour l'éligibilité dans le zonage de la PAT. Il bénéficiait donc, jusqu'alors, de la
PAT comme du FEDER ; il s'en trouverait exclu dans le nouveau projet, vu son appartenance au bassin d'emploi
d'Amiens.
Et, pourtant, le canton d'Hallencourt possède une limite territoriale avec le canton d'Abbeville-Sud. Il dépend de
l'arrondissement d'Abbeville - et non pas d'Amiens - pour toutes les formalités administratives des particuliers, mais
également des entreprises. Ses activités traditionnelles et industrielles relèvent toutes du Vimeu ; il est porteur d'une
histoire locale et de noms de village faisant référence à ce secteur du Vimeu. Il appartient aux structures locales de
développement de ce même secteur. Son rattachement au bassin d'emploi du Vimeu, dans l'arrondissement
d'Abbeville, paraîtrait naturel. Tel n'est pas le cas.
Cette situation, résultant en partie d'une définition obsolète donnée par l'INSEE de la zone d'emploi d'Amiens, constitue
une anomalie géographique et historique, une enclave dans le bassin d'emploi du Vimeu.
Vous sachant, madame le ministre, soucieuse d'équité, je vous pose la question : vous serait-il loisible de porter votre
attention tout spécialement sur la situation paradoxale du canton d'Hallencourt en reconsidérant son appartenance -
illogique - au bassin d'emploi d'Amiens et en adoptant une approche moins théorique dans les facteurs d'éligibilité
retenus pour son classement dans le zonage PAT ?
Etes-vous prête, en outre, à accorder au département de la Somme un complément de population éligible, étant donné
que les réductions sont de l'ordre de 21 % dans ce département contre 1 % dans l'Aisne ?
Enfin, concernant le zonage objectif 2, êtes-vous prête à remédier à la situation d'injustice que vivent le département de
la Somme, avec 40 % de réduction de population éligible, et la région Picardie, avec 25 % de réduction ? Il ne faudrait
pas que le zonage objectif 2 reconduise les mêmes insuffisances que le récent zonage PAT !
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, il ne
me revient heureusement pas d'accorder telle ou telle « rallonge » en termes de population. La réduction drastique à
laquelle nous avons été confrontés au titre d'une politique non d'aménagement du territoire mais de la concurrence, est
effectivement douloureuse à vivre. C'est sur la base de cette argumentation et des critères qui nous étaient imposés par
le règlement communautaire que nous avons été amenés à formuler des propositions en toute objectivité.
Je vous signale que la discussion avec la Commission est vive et que M. Monti nous a d'ores et déjà fait savoir qu'il
n'entendait pas valider la carte qui lui avait été transmise par les autorités françaises.
La négociation est en cours. S'il semble possible de faire valoir notre point de vue en ce qui concerne la prise en
compte de situations de chômage particulièrement graves dans la périphérie des grandes villes, dans des zones
touchant à des agglomérations, dans les espaces confrontés à des restructurations minières ou énergétiques, la
Commission européenne s'est montrée, elle, fort peu flexible : elle requiert, pour ces espaces, une stricte coïncidence
avec la proposition de zonage objectif 2.
C'est une contrainte très lourde qui ne peut être satisfaite dans tous les cas et qui se traduira sans doute par quelques
redéploiements au sein de la proposition de zonage PAT. En effet, nous ne pouvons pas « manger » des populations
d'une façon considérable dans des zones où les activités ne sont pas aussi nombreuses qu'on pourrait le souhaiter et
où nous ne profiterions pas au mieux des possibilités de zonage.
Le choix des critères retenus résulte largement d'un travail engagé au sein du Conseil national de l'aménagement et du
développement du territoire et des recommandations formulées par ce dernier.
Vous le savez, plusieurs scénarios étaient possibles. Nous avons préféré le scénario dit d'aménagement du territoire,
parce qu'il tenait le mieux compte de la richesse, du chômage, de la dépopulation des territoires en mutation
industrielle. Nous n'avons pas voulu conforter l'idée finalement assez cynique selon laquelle il aurait fallu ne retenir que
les seules zones qui pouvaient au mieux se servir de cette opportunité.
Au regard de ces critères, la zone d'emploi d'Amiens, qui comprend le canton d'Hallencourt, a été retenue non pas en
totalité, au titre de la proposition de zonage PAT, mais à hauteur de 98 000 habitants, suivant un découpage, élaboré
sur le plan local qui privilégie les zones industrielles touchées par un fort taux de chômage dans la périphérie de
l'agglomération d'Amiens, en respectant un principe de continuité géographique. Le canton d'Hallencourt, qui est distant
du zonage proposé pour Amiens, ne peut donc, à ce stade des négociations avec la Commission, être réintégré dans la
proposition française.
S'agissant du zonage objectif 2, la Picardie avec une baisse de 24,7 % - après affectation de 15 000 personnes
supplémentaires au titre de la réserve, afin d'assurer le zonage partiel de Soissons en objectif 2, compte tenu des
difficultés récentes - se trouve dans une situation relativement moins pénalisante que l'ensemble des autres régions, qui
connaissent une baisse moyenne de 26,3 %.
Le taux de couverture du futur objectif 2 pour la Picardie, avec 778 041 personnes, est de l'ordre de 43 %, à comparer
avec un taux de couverture national de l'ordre de 31 %.
La proposition de zonage objectif 2, élaborée sur le plan local, conforte le zonage PAT pour ce qui concerne la frange
de la zone d'emploi d'Amiens ; elle comprend par ailleurs la commune d'Hallencourt, sur laquelle vous m'avez
interrogée.
M. Pierre Martin. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Martin.
M. Pierre Martin. Je vous remercie de toutes ces précisions, madame le ministre. Une avancée a été faite pour le
canton d'Hallencourt ; elle est, certes, insuffisante, mais je crois que, dans ce combat pour l'emploi que nous menons
tous dans nos différents secteurs d'activité, la souplesse permet certainement d'avancer plus rapidement que la rigidité !
M. le président. Cela nous appelle tous à la modestie. Ce qui avait été négocié dans le passé n'était pas si
catastrophique que cela !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, si la
Commission européenne a imposé la réduction d'un quart de la population couverte, je rappelle que cette règle a été
assumée, lors du sommet de Berlin, par les deux têtes de l'exécutif.
Il s'agit de stabiliser le budget communautaire. Il s'agit également d'assurer les meilleurs retours financiers possibles
pour la France, et c'est au titre de la politique agricole commune que ces retours sont les plus satisfaisants
historiquement. Il s'agit, enfin, de concentrer des moyens importants sur des zones qui sont réellement en retard de
développement, que ce soit au titre de l'objectif 1, qui concerne notamment les départements d'outre-mer, ou au titre
des dispositifs de sortie.
Nous n'avons pas à rougir du travail qui a été engagé. Je tenais à replacer ce débat dans un contexte peut-être plus
complexe que celui que vous imaginez, monsieur le président.
M. le président. Je serais content d'avoir les résultats obtenus en Picardie pour Marseille qui a subi des amputations
par rapport au passé.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Nous sommes tous
passionnés par ces problèmes, monsieur le président.

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