Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 20/10/1999

M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les problèmes d'interprétation sur le plan fiscal de la nature des opérations réhabilitation lourde de logements (près de la moitié des projets de l'opération programmée d'amélioration de l'habitat (OPAH)). En effet, bien qu'ils soient subventionnés par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH), ils peuvent être assimilés à une construction neuve. Un tel classement pose deux problèmes. Le premier porte sur les projets dont la nature de l'opération (neuf ou réhabilitation) est soumise à interprétation. S'il s'agit d'une opération assimilable à du neuf (article 38 de l'instruction fiscale du 14 septembre 1999), le taux de TVA applicable est celui à 20,6 %, alors que pour de la réhabilitation, le taux applicable est de 5,5 %. Il est impossible aux artisans de savoir s'ils doivent faire des devis à 20,6 % ou à 5,5 %, puisque c'est uniquement l'administration fiscale qui pourra juger la nature de l'immeuble après travaux (au sens de l'article 257-7 du code général des impôts CGI). Cette indétermination conduira dans de nombreuses hypothèses à des procédures judiciaires. Dans ces conditions, l'artisan court le risque, s'il facture à 20,6 % par erreur, d'être redressé fiscalement, et s'il refuse de facturer à 5,5 % de perdre des clients. Il faut souligner que ce problème ne concerne pas uniquement les dossiers ANAH. La seconde difficulté concerne les changements importants à la baisse dans les plans de financement ANAH pour tous ces projets assimilables à du neuf. Dans l'attente d'une instruction fiscale spécifique à l'ANAH, il est à craindre que les logements conventionnés qui seraient subventionnés sur une base de devis à 20,6 % (toutes les opérations assimilables à du neuf) ne puissent plus bénéficier du remboursement de TVA qui a été mis en place depuis le 1er janvier 1999. La rétroactivité de la mesure serait dans cette hypothèse défavorable à de nombreux propriétaires qui demanderaient le règlement de la subvention ANAH sur la base de factures réelles à 20,6 % (datées après le 14 septembre 1999 sans pouvoir récupérer le différentiel de TVA comme prévu lors de l'accord de subvention ANAH). Une telle solution serait très grave pour tous les dossiers en cours, mais cela aboutirait par ailleurs à l'abandon de la plupart des projets de création de logements dans des bâtiments existants permis en zone de revitalisation rurale ZRR (par définition ces projets sont assimilables à du neuf et donc à la TVA de 20,6 %). Il lui demande s'il a l'intention d'apporter rapidement des précisions sur ces deux points afin de lever toutes ces incertitudes.

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Réponse du ministère : Budget publiée le 27/10/1999

Réponse apportée en séance publique le 26/10/1999

M. Bernard Piras. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je souhaite attirer
l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les problèmes d'interprétation, sur le plan
fiscal, de la nature des opérations de réhabilitation lourde de logements, qui représentent près de la moitié des projets
d'opérations programmées d'amélioration de l'habitat, ou OPAH.
En effet, bien qu'ils soient subventionnés par l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, ils peuvent être
assimilés à une construction neuve. Or un tel classement pose deux problèmes.
Le premier porte sur les projets dont la nature de l'opération - neuf ou réhabilitation - est soumise à interprétation. S'il
s'agit d'une opération assimilable à du neuf, aux termes de l'article 38 de l'instruction fiscale du 14 septembre 1999, le
taux de TVA applicable est de 20,6 %, alors que, pour de la réhabilitation, le taux applicable est de 5,5 %.
Dans ces conditions, il est impossible aux artisans de savoir s'ils doivent établir des devis à 20,6 % ou à 5,5 %,
puisque seule l'administration fiscale pourra juger la nature de l'immeuble après travaux, au sens de l'article 257-7 du
code général des impôts.
Cette indétermination conduira dans de nombreuses hypothèses à des procédures judiciaires. L'artisan court alors un
double risque : celui d'un redressement fiscal s'il facture à 20,6 % par erreur, celui de perdre ses clients s'il refuse de
facturer à 5,5 %. Et il faut souligner que ce problème ne concerne pas uniquement les dossiers de l'ANAH.
La seconde difficulté concerne les changements importants à la baisse enregistrés dans les plans de financement de
l'ANAH pour tous ces projets assimilables à du neuf. Dans l'attente d'une instruction fiscale spécifique à l'ANAH, il est à
craindre que les opérations concernant des logements conventionnés, qui seraient subventionnées selon des devis
établis sur la base d'un taux de TVA de 20,6 %, ne puissent plus bénéficier du remboursement de TVA qui a été mis en
place le 1er janvier 1999.
La rétroactivité de l'application de la mesure serait, dans cette hypothèse, défavorable à de nombreux propriétaires qui
demanderaient le règlement de la subvention de l'ANAH sur la base de factures réelles taxées à 20,6 %, datées d'après
le 14 septembre 1999, sans pouvoir récupérer le différentiel de TVA comme le prévoit l'accord de subvention de l'ANAH.
Non seulement une telle solution serait très lourde de conséquences pour tous les dossiers en cours, mais elle
aboutirait par ailleurs à l'abandon de la plupart des projets de création de logements dans des bâtiments existants
autorisés en zone de revitalisation rurale. En effet, ces projets sont par définition assimilables à de la construction
neuve et sont donc assujettis au taux de TVA de 20,6 %.
Je voudrais savoir, monsieur le secrétaire d'Etat, si vous avez l'intention d'apporter rapidement des précisions sur ces
deux points, afin que puissent être levées toutes les incertitudes que j'ai évoquées.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, vous avez attiré l'attention du Gouvernement
sur deux difficultés résultant de l'application de l'abaissement du taux de la TVA, pour les travaux portant sur les
logements, du taux normal de 20,6 % au taux réduit de 5,5 %. Cette mesure, qui figure dans le projet de loi de finances
pour l'an 2000, a été prise par anticipation à compter du 15 septembre de cette année.
La première difficulté, vous l'avez souligné, est de faire le tri entre les travaux aboutissant à une véritable reconstruction,
c'est-à-dire à une remise à neuf, pour lesquels le taux à appliquer est de 20,6 %, et ceux consistant en une simple
réhabilitation, qui seront taxés au taux de 5,5 %.
Je voudrais vous rassurer sur ce premier point, monsieur le sénateur, comme j'espère le faire tout à l'heure sur le
second : la distinction entre reconstruction et réhabilitation a été clairement établie par notre droit et a fait l'objet de
jurisprudences du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation. Sa définition est précisée dans les circulaires
administratives, et l'administration fiscale est prête à renseigner les entrepreneurs qui auraient un doute sur la nature
des travaux qu'ils comptent effectuer, ainsi que les personnes qui voudraient ouvrir de tels chantiers.
Par ailleurs - c'est le second point - vous craignez que les projets financés par l'agence nationale pour l'amélioration de
l'habitat ne perdent, paradoxalement, le bénéfice du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée, qui leur était jusqu'à
présent applicable.
Là encore, je tiens à vous rassurer : les travaux de réhabilitation pour lesquels l'octroi d'une aide de l'agence nationale
pour l'amélioration de l'habitat a été décidé à compter du 1er janvier 1999 - tel est l'objet précis de votre question -
bénéficieront en effet, quelle que soit la date de leur réalisation, du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée, dans
l'optique soit de l'ancien dispositif, soit du nouveau.
Pour être plus précis - ceci est un peu technique, mais vous connaissez très bien ces questions - l'ancien dispositif
ouvre droit au remboursement du différentiel de TVA prévu par l'article 279 ter du code général des impôts si les travaux
ont été facturés avant le 15 septembre 1999 ; si, en revanche, les travaux sont facturés à partir du 15 septembre 1999,
le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée s'applique, à condition que ces travaux portent sur des locaux d'habitation
achevés depuis plus de deux ans.
En conséquence, dans un cas comme dans l'autre, les travaux subventionnés par l'ANAH se verront, en définitive,
appliquer le taux réduit de la TVA.
Je tiens enfin à vous indiquer, monsieur le sénateur, que les modalités de calcul de la subvention versée par l'agence
nationale pour l'amélioration de l'habitat ne sont pas modifiées en fonction de l'application de l'un ou l'autre de ces
régimes, puisque, comme vous le savez, la demande de subvention doit être présentée avant le commencement des
travaux ; pour dire les choses autrement, les travaux ne peuvent être entrepris qu'après obtention de la subvention de
l'ANAH.
Telles sont les précisions que je voulais vous apporter, monsieur le sénateur. J'espère qu'elles pourront vous rassurer,
et j'indique en outre que la direction générale des impôts diffusera prochainement des précisions sur les grands
principes que je viens de décrire.
M. Bernard Piras. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis, bien entendu, ravi de cette baisse de 20,6 % à 5,5 % du taux
de la TVA frappant les travaux en question. Elle participera à une relance du bâtiment, qui se fait déjà très nettement
jour dans d'autres pays. Nous ne pouvons donc que nous en féliciter.
En ce qui concerne le second point, les choses me paraissent claires, et je pense que les organismes et les
propriétaires concernés s'y retrouveront.
S'agissant du premier point, je crois nécessaire que la direction générale des impôts fasse parvenir les précisions utiles
à tous les organismes intéressés, de façon qu'il n'y ait pas d'ambiguïtés, en particulier pour les petits entrepreneurs,
lesquels ne savent pas toujours auprès de qui se renseigner.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat.

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