Question de M. VISSAC Guy (Haute-Loire - RPR) publiée le 08/10/1999

M. Guy Vissac attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les difficiles conditions d'exercice du métier d'entrepreneur de travaux forestiers (ETF). Il lui rappelle qu'actuellement deux cas de figure se présentent pour cette profession : soit le travailleur de travaux forestiers est employé d'entreprise et connaît les problèmes de bas salaires, de formation, de saisonnalité, soit l'entrepreneur - souvent seul - ne peut faire face aux dépenses induites par l'achat d'équipements ou le règlement des charges. Il lui rappelle également que son chiffre d'affaires varie dangereusement au regard des aléas du marché, des contraintes climatiques et de la pression de la concurrence. Il lui rappelle enfin, dans la perspective de la future loi sur la forêt et le bois, qu'un statut du travailleur et de l'entrepreneur des travaux forestiers apparaît indispensable. Les travailleurs de travaux forestiers (salariés et entrepreneurs) constituant le maillon le plus sensible de la filière bois, il lui demande donc quelles mesures il entend prendre afin d'apporter une solution aux graves difficultés de cette profession.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 19/01/2000

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2000

M. Guy Vissac. Monsieur le ministre de l'agriculture, c'est en décembre dernier que je devais vous poser ma question
sur la situation des entrepreneurs de travaux forestiers. A la suite de la tempête du 26 décembre, cette question se
pose aujourd'hui avec encore plus d'acuité et de gravité.
Le statut des travailleurs forestiers concerne aussi bien les salariés que les entrepreneurs, souvent à la tête de petites
unités de trois à quatre agents. Les charges fiscales et sociales rendent plus difficile l'octroi d'un salaire convenable
pour un travail dur et dangereux, d'autant que la marge du prix du bois entre producteurs et acheteurs comprime de plus
en plus celle qui reste à l'abattage-débardage pratiqué par les entrepreneurs de travaux forestiers.
Faute de salaires décents, la profession connaît une crise de recrutement que les effets de la tempête aggravent, la
chute des cours rendant encore plus aléatoire la rémunération des travailleurs forestiers, pris, si j'ose m'exprimer ainsi,
entre l'arbre et l'écorce.
La future loi sur la forêt devrait, nous dit-on, concerner également le statut des entrepreneurs de travaux forestiers. Cela
paraît effectivement indispensable. Il y a cependant urgence à trouver la main-d'oeuvre permettant de faire face à une
situation immédiate très préoccupante, car il y aurait danger, sur les plans phytosanitaire et de la sécurité à laisser trop
longtemps le bois abattu par la tempête dans les forêts.
Cette main-d'oeuvre doit être qualifiée, pour éviter les accidents sur les chantiers. Or, la formation financée par les
conseils régionaux affiche un déficit de candidats, et ce depuis longtemps.
Monsieur le ministre, cette double question concernant les travailleurs forestiers doit recevoir des réponses aussi bien
sur le court terme, parce qu'il y a urgence, que sur le long terme, pour permettre à cette profession, qui, nous le
savons, représente un gisement d'emplois supplémentaires, de s'exercer dans des conditions convenables.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, votre question est d'une actualité
brûlante. Elle me permet de m'exprimer sur un certain nombre de mesures que nous entendons prendre en la matière et
qui relèvent, pour certaines, du plan national pour la forêt française élaboré et rendu public par le Gouvernement la
semaine dernière pour réparer les dommages causés par la tempête et, pour d'autres, d'une action s'inscrivant dans le
moyen et le long terme.
Les dégâts importants causés par les tempêtes des 26, 27 et 28 décembre 1999 dans les forêts françaises ont conduit
le Gouvernement à adopter un programme spécifique en faveur de la forêt.
Les trois axes majeurs de ce programme sont les suivants : assurer la mobilisation des bois, permettre le stockage et
ainsi favoriser la valorisation des bois, organiser la reconstitution des écosystèmes forestiers.
Les entreprises de travaux forestiers pourront bénéficier principalement de cinq mesures.
La première concerne la formation à la sécurité dans l'exploitation des chablis. Cela me donne l'occasion de dire devant
cette assemblée qu'aujourd'hui la forêt française touchée par la tempête est dangereuse. Il convient donc d'avertir nos
concitoyens qu'ils ne doivent pas aller s'y promener, même pour regarder les bûcherons travailler. Plusieurs accidents
sont déjà survenus depuis dix jours. En 1990, l'Allemagne, après le passage d'une tempête un peu moins violente, a eu
à déplorer une centaine de morts. Les bois sont instables. Il faut absolument inciter à la prudence.
De même, on ne peut pas faire travailler en forêt n'importe qui du jour au lendemain. Des formations seront organisées à
grande échelle, en collaboration avec les professionnels, à l'attention de toutes les personnes exerçant actuellement
une activité de récolte du bois, afin qu'elles se prémunissent bien contre les risques inhérents à ces chantiers
exceptionnellement dangereux.
La deuxième mesure concerne la facilitation de l'embauche de salariés dans le cadre d'un parcours qualifiant du type «
contrat de qualification ».
La troisième concerne l'aide à l'acquisition de matériel d'exploitation forestière, dont la dotation supplémentaire sera,
pour l'exercice 2000, de 50 millions de francs.
La quatrième mesure est l'amortissement accéléré du matériel d'exploitation forestière, qui permettra d'équilibrer le
revenu exceptionnel engendré par une activité très supérieure à la normale et de mieux refléter une usure accélérée du
matériel dans des conditions d'utilisation très intensives.
Enfin, la cinquième mesure est l'organisation de bourses de travaux forestiers, dont l'objectif est de permettre à l'offre et
à la demande de travaux forestiers de se rencontrer.
Les autres mesures du plan, qui sont nombreuses, même si elles profitent moins directement aux entreprises de
travaux forestiers, seront malgré tout déterminantes dans l'amélioration de leur situation, car elles visent à permettre
que les bois soient mobilisés et valorisés dans les meilleures conditions, et donc, par effet indirect, à fournir du travail
aux entreprises de travaux forestiers.
S'agissant de la situation particulière des entrepreneurs de travaux forestiers, le Gouvernement entend doter ces
professions d'un statut particulier dans le cadre du futur projet de loi forestière, qui, je le confirme, sera débattu au
Parlement dès ce premier semestre ; respecter ce calendrier était le moins que l'on pouvait faire après la tempête !
Un des objectifs de ce texte est d'imposer des conditions communes à ceux qui souhaitent réaliser des travaux de
récolte en forêt d'autrui, sur le plan technique et sur celui de la gestion de l'entreprise, afin de créer des entreprises
pérennes. Les distorsions de concurrence et les détournements des textes actuellement en application doivent être
rendus impossibles dans le cadre de la future loi.
Une capacité professionnelle, obtenue par l'attestation d'un niveau de compétence, devra être exigée pour tous les
travaux d'exploitation forestière afin de réduire le nombre d'accidents et de garantir une plus grande pérennité des
emplois et des entreprises. Des dispositions législatives seront donc proposées au Parlement pour améliorer le
dispositif actuel tout en laissant aux professions concernées la possibilité de s'organiser.
Voilà, très brièvement, monsieur le sénateur - je pourrais, bien sûr, parler beaucoup plus longuement des
conséquences de la tempête sur la forêt et du plan du Gouvernement - une première réponse que je pouvais apporter à
votre question.
M. Guy Vissac. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vissac.
M. Guy Vissac. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces réponses, que vous aviez déjà ébauchées lors de votre
présentation du plan forêt, après la tempête.
Je souhaite simplement attirer votre attention sur le fait que l'aide à l'acquisition de matériel concerne généralement le
premier achat, et non les achats suivants, alors qu'aujourd'hui les travailleurs forestiers et les entrepreneurs ont des
difficultés à renouveler leur matériel.

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