Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 08/10/1999

Question posée en séance publique le 07/10/1999

M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, en
accédant aux responsabilités, le Gouvernement a fait le choix de la reprise économique par et pour l'emploi. Et les faits
sont là : la croissance est au rendez-vous, la confiance aussi et les créations d'emplois avec.
A notre tour, parmi toutes les réformes sociales, nous voulons saluer la plus belle d'entre elles, pour reprendre les
propres termes de M. le Premier ministre, je veux parler de la baisse du chômage.
Chacun doit ici en convenir : la politique de l'emploi du Gouvernement a produit des effets importants qui amplifient ceux
de la croissance, puisque au total 750 000 emplois ont été créés.
Pourtant, au moment où la croissance se consolide, où les investissements redémarrent, où les marges
d'autofinancement des entreprises progressent, force est de constater que certaines d'entre elles persistent dans la
dérive de la précarisation du travail, recourent abusivement à des licenciements ou encore procèdent à des plans de
restructuration comme c'est le cas aujourd'hui même chez Comurhex, dans la filière nucléaire.
J'évoquais à l'instant les contrats précaires : 80 % à 90 % des embauches se font sous cette forme ; missions d'intérim
et contrats à durée déterminée ont augmenté respectivement de 24 % et de 9 % et 1,4 million de travailleurs sont
concernés.
Dès lors que la croissance est durable, ne sommes-nous pas interpellés ?
Est-il acceptable, dans ces conditions, que des entreprises puissent recourir de manière systématique et permanente à
ces formes d'emplois précaires ?
Peut-on tolérer, à l'aube du troisième millénaire, que ces mêmes entreprises, dont les carnets de commandes sont bien
remplis, persistent à n'offrir à leurs salariés d'autre perspective que l'instabilité et la peur du lendemain ?
Enfin, peut-on admettre que des entreprises qui, de surcroît, réalisent d'importants bénéfices puissent impunément
procéder à des licenciements ou à des restructurations avec réduction d'effectifs ?
Voilà pourquoi je souhaite, au nom de mon groupe, vous demander, monsieur le ministre délégué à la ville, quelles
initiatives entend prendre le Gouvernement pour lutter contre les licenciements abusifs, pour réduire les recours
systématiques aux contrats précaires et donner ainsi de véritables droits aux travailleurs jusqu'ici les moins protégés et
les plus exposés. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen.)

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Réponse du ministère : Ville publiée le 08/10/1999

Réponse apportée en séance publique le 07/10/1999

M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le sénateur, nous connaissons bien les drames entraînés
par les licenciements économiques, même si ces derniers ont fortement reculé depuis deux ans : 146 000 au premier
semestre de 1999 contre 215 000 au premier semestre de 1997.
Nous disposons en France d'une législation protectrice, comportant des garanties importantes sur l'information et la
consultation des salariés, exigeant l'existence d'un plan social et des conventions de conversion pour les petites
entreprises. Notre législation doit être appliquée et ceux qui ne la respectent pas doivent être sanctionnés. Je le dis
clairement : la loi de notre pays est celle de tous et personne ne peut s'y soustraire.
L'entreprise, ce sont d'abord des hommes et des femmes qui conjuguent leurs compétences et leur énergie.
Les chefs d'entreprise qui présentent des plans sociaux font souvent appel à l'Etat, principalement pour financer des
préretraites.
Des instructions ont été données aux services pour qu'ils soient particulièrement exigeants sur la qualité du plan social
et pour limiter strictement le recours aux préretraites pour les entreprises. Qu'il s'agisse de Michelin ou de toute autre
entreprise, il n'est pas normal d'annoncer des bénéfices très importants et, en même temps, de demander à l'Etat de
payer une partie de ses restructurations.
Les instructions qui ont été données ont d'ailleurs porté leurs fruits, puisque les préretraites ont reculé de près de 30 %
en deux ans. Cela ne nous empêche pas d'aider les salariés qui, pendant longtemps, ont supporté des conditions de
travail difficiles, à partir en préretraite. Mais alors, c'est l'entreprise qui doit supporter la plus grande part du financement.
En ce qui concerne la qualité du plan social, la réduction du temps de travail est désormais très souvent intégrée
comme un élément de nature à réduire ou éviter les suppressions d'emplois.
S'agissant des emplois précaires, vous le savez, voilà maintenant plusieurs mois, les partenaires sociaux ont été
invités, notamment au niveau des branches, à prendre des mesures pour lutter contre le recours abusif à ce type
d'emplois.
En l'absence de démarches entreprises en ce sens, le Gouvernement a décidé d'agir.
Le Parlement sera prochainement saisi d'un texte prévoyant un système de corrections financières - pénalités,
modulation des cotisations, plusieurs possibilités existent, nous allons trancher dans les prochaines semaines - qui
s'appliqueront à défaut d'accord collectif.
Des avancées sont proposées en ce sens dans le projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail, nous
aurons l'occasion d'en discuter dans les prochains jours. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

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