Question de M. FATOUS Léon (Pas-de-Calais - SOC) publiée le 27/05/1999

M. Léon Fatous souhaite interpeller M. le secrétaire d'Etat au logement sur les moyens qu'il entend mettre en oeuvre pour renforcer la lutte contre l'insalubrité des logements. Le rapport de Mme Nancy Bouché, qui lui a été remis en octobre dernier, fait apparaître l'urgente nécessité d'agir en ce domaine : environ 935 000 logements concernés ; développement " d'un marché du taudis " fort lucratif qui se nourrit de la précarité humaine ; ghettoïsation des quartiers touchés par ce phénomène... Outre ce constat sans concession, cette enquête met à jour certains dysfonctionnements et effets pervers de notre législation. Tel est par exemple le cas des règles qui régissent les aides à la personne - allocation-logement et aides versées ou fonds de solidarité pour le logement. Il apparaît que le système du tiers payant au regard qui consiste à verser directement aux bailleurs ces aides et donc à sécuriser ce dernier face aux risques d'impayés n'est pas assorti en retour de contreparties, notamment en vue d'améliorer le confort des logements. Le rapport propose donc de revoir les conditions d'octroi de ces aides et du tiers-payant des conditions d'habitabilité. Il préconise aussi un certain nombre d'actions visant à renforcer la protection des locataires comme la révision de la grille d'insalubrité de 1971, le renforcement du droit au relogement des occupants ou encore un ensemble des mesures facilitant les travaux de réhabilitation des immeubles concernés. Aussi, avant que le projet de loi sur l'habitat et l'urbanisme ne soit débattu, il souhaite connaître ses orientations sur ce dossier.

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Réponse du ministère : Logement publiée le 30/06/1999

Réponse apportée en séance publique le 29/06/1999

M. Léon Fatous. Monsieur le secrétaire d'Etat, en octobre dernier, Mme Nancy Bouché vous a remis un rapport dans
lequel elle dénonce l'insuffisance de la législation sur le logement insalubre. Ce rapport fait apparaître l'urgente
nécessité d'agir dans ce domaine. Environ 935 000 logements sont concernés.
Par ailleurs, on signale, dans ce rapport, le comportement inadmissible de certains, puisque l'on constate le
développement d'un marché du taudis, fort lucratif, qui se nourrit de la précarité et de la misère humaine, créant
l'exclusion des quartiers touchés par ce phénomène. C'est inacceptable !
Mais, outre ce constat sans concession, cette enquête met à jour certains dysfonctionnements et certains effets
pervers de notre législation. Tel est, par exemple, le cas des règles qui régissent les aides à la personne, allocations de
logement et aides versées ou fonds de solidarité pour le logement.
Il apparaît que le système du tiers payant, qui consiste à verser directement aux bailleurs ces aides, et donc à
sécuriser ces derniers face aux risques d'impayés, n'est pas assorti en retour de contreparties, notamment en vue
d'améliorer le confort des logements.
L'auteur de ce rapport propose donc que l'on revoie les conditions d'octroi de ces aides et du tiers payant au regard des
conditions d'habitabilité.
Il préconise aussi un certain nombre d'actions visant à renforcer la protection des locataires comme la révision de la
grille d'insalubrité de 1971, le renforcement du droit au relogement des occupants ou encore un ensemble de mesures
facilitant les travaux de réhabilitation des immeubles concernés.
Je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que le projet de loi sur l'habitat et l'urbanisme sera prochainement débattu, mais
je souhaiterais connaître dès maintenant les orientations que vous comptez prendre sur ce dossier.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu attirer mon attention sur
les dispositifs de lutte contre l'insalubrité des logements, en particulier sur les suites à apporter aux préconisations
d'actions contenues dans le rapport d'expertise concernant les édifices menaçant ruine et les immeubles insalubres
que j'avais demandé à Mme Nancy Bouché, inspecteur général de l'équipement.
En effet, les logements insalubres ou en état de péril constituent, hélas ! encore l'habitat de trop nombreux ménages en
France, en milieu urbain comme en milieu rural. En effet, malgré un processus continu d'amélioration des conditions de
confort des logements anciens, un parc de logements très inconfortables ou insalubres subsiste, qui concerne, vous
vous en doutez, des populations défavorisées, captives, en quelque sorte, de cette réalité, qui souvent ne parviennent
pas à accéder au logement social.
Intervenir sur ce parc est évidemment tout aussi essentiel que d'agir pour que se développe l'offre locative nouvelle, et
vous savez combien nous sommes mobilisés sur ce point.
Vous évoquez, monsieur le sénateur, les effets pervers de la réglementation de l'allocation de logement et du fonds de
solidarité pour le logement, le FSL, lorsque les logements sont insalubres, et vous relevez en cela une observation du
rapport de Mme Bouché.
En ce qui concerne le fonds de solidarité pour le logement, je peux vous préciser que le décret d'application de la loi du
28 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions qui vient d'être présenté pour avis au Conseil national de l'habitat
tient déjà compte des propositions de ce rapport.
En effet, les aides du FSL à l'accès au logement seront refusées lorsque les logements feront l'objet d'un arrêté
d'insalubrité ou d'un arrêté de péril. Les aides au maintien seront également refusées ou subordonnées à l'engagement
du bailleur d'effectuer, dans un délai précis, les travaux qui lui auront été prescrits. Pour rendre le dispositif opérationnel,
le projet de décret prévoit que les arrêtés d'insalubrité et de péril seront notifiés aux gestionnaires du fonds de solidarité
pour le logement.
S'agissant de l'allocation de logement, son octroi est subordonné non à des conditions de salubrité proprement dites,
mais seulement à des conditions de confort qui sont, en effet, peu exigeantes. Elles datent d'une autre époque et il
faudra, bien sûr, les modifier.
Actuellement la réglementation prévoit qu'en l'absence de ces conditions très élémentaires de confort l'allocation de
logement peut être perçue par dérogation, pendant un an seulement, sous réserve que le propriétaire effectue les
travaux nécessaires. Dans cette hypothèse, elle ne peut en aucun cas être versée en tiers payant au bailleur.
Ces normes de confort méritent incontestablement d'être adaptées - en fait, il faut les relever - et des conditions de
salubrité doivent être introduites pour l'octroi de l'allocation de logement. Il faut cependant aussi prendre en compte
l'impératif de ne pas priver d'aide ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin. Dans cette perspective, le refus de
versement des aides pourrait être lié à une interdiction d'habiter, conséquence d'un arrêté de péril ou d'insalubrité.
D'autres préconisations réglementaires ou financières ont été proposées par Mme Bouché, pour améliorer les
possibilités d'intervention à travers la facilitation des travaux de sortie d'insalubrité ou de la menace de ruine des
immeubles concernés. Sont également proposées des pistes concernant la transformation de certains de ces
immeubles en logements sociaux, ainsi que le renforcement du droit des occupants des logements insalubres ou
menaçant ruine.
Les principales propositions de Mme Bouché relevant du domaine législatif sont actuellement à l'étude dans le cadre de
la préparation du projet de loi urbanisme, habitat et déplacement.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, le Gouvernement, qui a commandé ce travail pour mieux
cerner une réalité qu'il considère, comme vous, tout à fait inacceptable, entend bien valoriser au mieux ce rapport dont il
a salué la qualité. Il vous remercie d'avoir pris appui sur le contenu de celui-ci pour effectivement soutenir une évolution
très significative dans le domaine de la qualité de l'habitat sur le plan de la salubrité et du confort.
M. Léon Fatous. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que vous m'avez apportées.
Nous le constatons tous, il s'agit d'un problème très difficile à régler. Ceux qui sont hébergés dans ces logements sont
bien souvent des personnes qui n'arrivent pas à obtenir un logement dans une HLM et qui acceptent donc d'être logées
à n'importe quelles conditions.
Par ailleurs, des propriétaires achètent des appartements ou des maisons à des prix très bas, parfois de l'ordre de 100
000 à 150 000 francs, puis les louent 2 500 francs, voire 3 000 francs par mois. Or les caisses paient les allocations
quasi aveuglément.
Il serait bon de remédier progressivement à cette situation.

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