Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 26/05/1999

M. Nicolas About attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la défense, chargé des anciens combattants sur le projet de fermeture de la maison de retraite de Ville-Lebrun dans les Yvelines. Le 6 mai dernier, les membres du conseil d'administration de l'Office national des anciens combattants (ONAC) ont décidé, lors d'une réunion de l'hôtel des Invalides, de la fermeture programmée de la maison de retraite de Ville-Lebrun. La sentence est tombée, sans concertation avec les associations d'anciens combattants des Yvelines, pourtant directement concernées par ce dossier. Il lui rappelle, pour information, que cette maison de retraite accueille actuellement 83 pensionnaires qui ont trouvé là-bas un refuge chaleureux, après avoir consacré une partie de leur vie à défendre notre liberté et l'honneur de la nation. Certes, il n'ignore pas les problèmes de sécurité qui se posent, dans cette maison, depuis plusieurs années. Mais un projet de restructuration de l'établissement avait été élaboré par les associations en 1996, et un plan de financement privé avait été présenté au ministre des anciens combattants de l'époque, pour financer les travaux de mise en conformité. Après plusieurs réunions de travail à l'hôtel des Invalides, le projet technique avait reçu l'approbation de tous les participants. Il n'a malheureusement pas reçu de suite. Il lui demande quel sera l'avenir de ces 83 pensionnaires, âgés de 80 à 95 ans, qui vivent actuellement leur fin de vie dans cet établissement. Ces anciens combattants se sont battus pour défendre notre liberté. Alors qu'en 1999 nous commémorons le 80e anniversaire de la loi du 31 mars 1919 sur le " droit à réparation " des anciens combattants, cette décision est surprenante, voire choquante. La fermeture de cette maison de retraite relève d'une curieuse conception du " droit à réparation ". Il lui indique que plusieurs solutions sont encore possibles, comme la vente de 20 hectares de terrain, situés à proximité de la maison de retraite. L'argent ainsi récupéré permettrait d'aider à la mise en conformité de l'établissement. Les associations préconisent aussi le lancement d'une souscription, pour sauver la maison de Ville-Lebrun. Au vu de cette mobilisation des élus et des associations, il lui demande quelles mesures il compte prendre pour qu'une décision rapide intervienne en faveur des pensionnaires et du personnel de cette maison de retraite.

- page 3324


Réponse du ministère : Anciens combattants publiée le 30/06/1999

Réponse apportée en séance publique le 29/06/1999

M. Nicolas About. Monsieur le secrétaire d'Etat, le 6 mai dernier, les membres du conseil d'administration de l'Office
national des anciens combattants, l'ONAC, ont décidé, lors d'une réunion à l'Hôtel des Invalides, de la fermeture
programmée de la maison de retraite de Ville Lebrun. La sentence est tombée, sans concertation avec les associations
d'anciens combattants, en particulier des Yvelines, pourtant directement concernées par ce dossier.
Je vous rappelle, pour information, que cette maison de retraite accueille actuellement 83 pensionnaires, qui ont trouvé
là-bas un refuge chaleureux après avoir consacré une partie de leur vie à défendre notre liberté et l'honneur de la nation.
Certes, je n'ignore pas que des problèmes de sécurité se posent dans cette maison depuis plusieurs années. Mais un
projet de restructuration de l'établissement avait été élaboré avec les associations, en 1996, et un plan de financement
privé avait été présenté au ministre des anciens combattants de l'époque, pour financer les travaux de mise en
conformité. Après plusieurs réunions de travail à l'Hôtel des Invalides, le projet technique avait reçu l'approbation de tous
les participants. Il n'a malheureusement pas connu de suite.
Monsieur le secrétaire d'Etat, que vont devenir ces 83 pensionnaires, âgés de quatre-vingts à quatre-vingt-quinze ans,
qui vivent actuellement une fin de vie délicate dans cet établissement ? Ces anciens combattants se sont battus pour
défendre notre liberté. Alors qu'en 1999 nous commémorons le quatre-vingtième anniversaire de la loi du 31 mars 1919
sur le « droit à réparation » des anciens combattants, cette décision est surprenante, pour ne pas dire choquante.
Fermer cette maison de retraite fait-il partie de notre conception du « droit à réparation » ? La France a déjà oublié tous
les anciens combattants d'Afrique et de Madagascar. Allons-nous nous en prendre maintenant à nos anciens
combattants français, alors que nous ne cessons de prêcher, auprès des jeunes, le fameux « devoir de mémoire » ?
Nous devons impérativement sauvegarder le bien-être de nos anciens combattants. Plusieurs solutions sont encore
possibles, comme la vente de 20 hectares de terrain situés à proximité de la maison de retraite. L'argent ainsi récupéré
permettrait d'aider à la mise en conformité de l'établissement. Les associations préconisent aussi le lancement d'une
souscription, pour sauver la maison de retraite de Ville-Lebrun.
Au vu de cette mobilisation des élus et des associations, quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le
secrétaire d'Etat, pour qu'une décision rapide intervienne en faveur des pensionnaires et du personnel de cette maison
de retraite ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense, chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur,
votre question contient des éléments de réponse !
Vous avez évoqué un cas particulier, qui s'inscrit dans une situation beaucoup plus générale et qui doit s'analyser de
façon globale.
L'Office national des anciens combattants et victimes de guerre gérait, jusqu'à ces deux dernières années, environ
treize à quatorze maisons de retraite, dont la réalisation s'est échelonnée dans le temps, souvent à partir de bâtiments
reçus par dons et par legs.
Ses interventions ont eu lieu à un moment où le pays ne prenait pas en charge correctement le troisième ou le
quatrième âge. Par conséquent, c'est tout à fait à l'honneur du monde combattant que d'avoir pris ces initiatives. Mais
ces maisons de retraite ne représentent qu'environ mille places en France, plus ou moins bien réparties dans l'espace
territorial, alors que l'ONAC s'occupe de quatre millions de personnes qui peuvent prétendre - anciens combattants,
ayants droit ou ayants cause, c'est-à-dire les veuves et les orphelins - à être prises en charge dans les maisons de
retraite.
La stratégie de l'Office national des anciens combattants en la matière s'inscrit dans la politique générale de l'Etat et
des collectivités territoriales tendant à offrir aux anciens combattants des places à peu près partout sur notre territoire.
Cela nous a amenés à nous interroger sur la ligne politique que l'ONAC devait suivre pour les maisons de retraite et à
prendre en compte la réalité des situations. Nous avons ainsi pu constater que, dans cinq ou six maisons de retraite,
les conditions de sécurité et d'installation posent des problèmes et que souvent nous offrons des places à des prix
supérieurs à la moyenne départementale pour des conditions d'accueil souvent inférieures. Le fameux droit à réparation
n'est donc pas parfaitement assuré. Il convenait dès lors de réorienter la politique de l'Office national des anciens
combattants.
Dans le même temps, il fallait prendre en compte les questions de sécurité et les normes d'habitabilité. A ce titre, j'ai
mandaté un groupe de travail composé notamment d'administrateurs de l'ONAC afin de recenser toutes les maisons de
retraite et dresser pour chacune d'elles un bilan des conditions de sécurité et des normes d'habitabilité.
Un rapport a été remis au conseil d'administration de l'ONAC le 6 mai dernier, sur la base de toutes ces investigations :
démarches sur le terrain, rencontres avec les partenaires du monde combattant et avec des représentants du conseil
général. Il s'agissait en fait d'établir des contacts fructueux pour savoir si on avait la possibilité de mettre les
établissements aux normes de sécurité.
En ce qui concerne la maison de retraite de Ville-Lebrun, un rapport m'a été transmis. La délégation du conseil
d'administration a constaté d'abord que la commission de sécurité venait d'émettre un avis défavorable et qu'il y avait 54
mesures techniques à prendre pour assurer la mise aux normes de sécurité et d'habitabilité telles qu'elles sont
prescrites aujourd'hui dans les cahiers des charges des maisons de retraite.
Force fut de constater que les structures existantes ne permettaient pas véritablement une adaptation des locaux
existants et qu'il fallait quasiment refaire une maison de retraite dont le coût a été estimé à 60 millions de francs
environ, le projet dont vous avez fait état étant, lui, évalué à 50 millions de francs.
Dans les deux cas de figure, nous sommes confrontés au problème du financement, en liaison avec les collectivités
territoriales, notamment le conseil général.
Compte tenu du fait que l'ONAC ne disposait pas des 50 millions de francs ou des 60 millions de francs nécessaires,
son conseil d'administration a pris la décision, dans ce cas-là comme dans un autre, de fermer la maison de retraite
parce que les normes de sécurité et d'habitabilité n'étaient pas respectées et qu'il était difficile, dans un temps réduit,
d'apporter une vraie réponse au problème posé.
Cette décision a été prise avec le souci de prendre en compte la situation des personnes âgées qui s'y trouvent. Des
négociations ont donc été ouvertes avec les responsables de maisons de retraite proches qui seraient susceptibles de
recevoir ces personnes âgées. Le directeur général de l'ONAC est en train de mener des consultations et des contacts
utiles ont déjà été pris.
Nous nous préoccupons également de la situation du personnel.
Je vais me rendre sur place pour évoquer cette question. Il ne s'agira pas pour moi, je suis très franc et très honnête
avec vous, de remettre en question la décision qui a été prise. La stratégie de l'ONAC qui a été définie le 6 mai est de
multiplier les places offertes aux anciens combattants sur l'ensemble du territoire et de toutes les maisons qui
répondent aux normes de sécurité et d'habitabilité.
Il s'agit non pas de se défaire de la gestion des maisons de retraite, mais de prendre en compte les situations pratiques
que nous rencontrons pour trouver d'autres solutions qui préserveront les intérêts du monde combattant, voire qui
élargiront les offres de places en labellisant des maisons de retraite sous l'angle du partenariat avec la Fondation
nationale du bleuet de France de façon que nous rayonnions sur l'ensemble du territoire.
Toutefois, il est vrai que, pour l'instant, nous sommes confrontés à quelques difficultés d'ordre pratique pour la maison
de retraite que vous avez évoquée. Mais pour lever toute ambiguïté, pour ne pas indiquer qu'un mauvais sort a été
réservé à cette maison et pour m'expliquer devant le monde combattant du département, j'ai l'intention de me rendre sur
place avant le 14 juillet et d'écouter tout le monde.
Il ne s'agit en aucun cas de remettre en question la politique définie le 6 mai. Il s'agit de prendre en compte les
arguments des uns et des autres.
Le souci primordial qui nous anime, le préfet Guizard, le directeur général de l'ONAC et moi-même, c'est d'apporter la
bonne réponse à ces personnes âgées et que tout se passe dans un souci de dignité, de responsabilité et de sécurité.
Nous aurons ensuite, comme je l'ai déjà dit, à traiter la question des personnels, mais telle est, monsieur le sénateur,
la réponse que je peux vous apporter aujourd'hui : il s'agit non pas d'une décision particulière, mais d'une mesure qui
s'intègre dans une politique plus générale visant à élargir le nombre des places offertes au monde combattant,
justement pour que le droit à réparation, dont nous célébrons cette année le quatre-vingtième anniversaire, trouve une
traduction concrète sur l'ensemble du territoire national.
Nous marquerons ainsi la reconnaissance et la solidarité que nous devons à celles et à ceux qui se sont engagés,
comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, pour défendre les intérêts supérieurs et l'honneur de la France.
M. Nicolas About. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Je voudrais vous remercier de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, et vous dire que, en tant
que maire et en tant que médecin, j'ai conscience de l'obligation qui vous revient d'assurer la sécurité des pensionnaires
de ces établissements.
Je connais également la contrainte qui s'impose à vous de répartir au mieux ces établissements sur le territoire.
J'attire cependant tout particulièrement votre attention sur le fait que le département des Yvelines a une vieille tradition
militaire, et qu'il serait un peu dommage que tous ces pensionnaires soient éparpillés loin de leurs familles.
Je forme donc avec vous le voeu que la réunion à laquelle vous participerez sur place permette d'apaiser les esprits,
d'apporter une réponse aux problèmes liés au personnel et de trouver dans la dignité, dans la paix et dans la sérénité
une solution pour l'accueil des pensionnaires.

- page 4548

Page mise à jour le