Question de M. BONY Marcel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 20/05/1999

M. Marcel Bony attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur la situation du thermalisme. Pris dans une spirale descendante depuis 1992, celui-ci enregistre une perte de 13,7 % de fréquentation en cinq ans. L'Auvergne ne permet pas de démentir ce constat. Les dix stations répertoriées ont en effet enregistré une baisse du nombre de curistes, et cette chute générale n'est pas nouvelle. Le thermalisme doit absolument retrouver une image valorisante. Or c'est le moment précis que choisit la Caisse nationale d'assurance maladie pour annoncer que de nombreuses indications thérapeutiques ne seront plus remboursées. En l'état, la nouvelle est catastrophique, même si l'on a appris, depuis, que cette décision de la CNAM ne saurait être d'application immédiate. Elle plongerait de très nombreuses stations dans un marasme total (soixante-seize d'entre elles ne seraient plus remboursées et cinquante-trois auraient une prise en charge seulement partielle). Les curistes seront pénalisés dans leur majorité, car ils ne pourront assumer le coût des cures. La CNAM semble encore s'interroger sur le service médical rendu, point de vue que le secrétaire d'Etat admet comme prémices possibles de la discussion. Or la CNAM elle-même, dans son enquête de 1987, a été obligée de constater l'efficacité médicale du thermalisme, reconnue par l'Organisation mondiale de la santé. L'efficacité thérapeutique des cures est aujourd'hui incontestable, alors que leur coût social reste très modeste. Chacun sait qu'il est équivalent pour vingt et un jours à celui d'une seule journée d'hospitalisation, sans compter les effets induits, comme la baisse de consommation de médicaments. Le 14 mai dernier, au cours des Assises nationales du thermalisme à Toulouse, le problème était au c ur des discussions. Notre collègue député, président de la commission des finances à l'Assemblée nationale et maire d'Ax-les-Thermes, a fait état des réponses données aux questions posées à l'Assemblée nationale. Il semble qu'aucune décision ne sera prise tant que la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'an 2000 ne sera pas achevée. Il lui demande à quel moment il compte engager une véritable concertation, alors que ce texte doit être adopté avant la fin de l'année, et comment une orientation comme celle de la CNAM peut être envisagée alors que de profondes réformes, encouragées tant par l'Etat que par les collectivités territoriales, ont été engagées au cours des dernières années.

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Réponse du ministère : Droits des femmes publiée le 09/06/1999

Réponse apportée en séance publique le 08/06/1999

M. Marcel Bony. Madame la secrétaire d'Etat, vous savez bien que la décision de la Caisse nationale d'assurance
maladie, la CNAM, si elle est appliquée, condamnera à terme par sa brutalité nombre de stations thermales françaises.
Si ce n'est pas le cas, celles-ci continueront à jouer leur rôle dans le développement du territoire, car, comme vous le
savez, le thermalisme, qui s'exerce notamment en zone rurale et montagneuse, n'est pas une activité délocalisable.
C'est une activité complémentaire qui permet à ces zones de continuer à vivre. Et je ne précise pas le nombre d'emplois
qui en dépendent directement ou indirectement, emplois qui sont d'ailleurs source de cotisations pour la CNAM !
Mais ce sont surtout les curistes qui seront pénalisés car nombre d'entre eux ne pourront assumer seuls le coût des
cures, qui, aujourd'hui, est déjà parfois remboursé tardivement.
Les élus de régions thermales pourraient, comme moi, multiplier les témoignages de curistes qui confirment l'enquête
que la CNAM elle-même avait conduite en 1987 et qui avait conclu à une amélioration clinique notable chez 71 % des
curistes atteints d'affections respiratoires et ORL dès la première année. Un grand nombre de personnes précisent en
outre qu'elles ne prennent plus ou prennent très peu de médicaments.
De même les soins en rhumatologie apportent un réel soulagement et évitent souvent des traitements médicamenteux
lourds et beaucoup plus coûteux. Comme pour les voies respiratoires, ils sont irremplaçables pour des affections
chroniques ou invalidantes à l'égard desquelles les médicaments n'ont qu'une action palliative, voire éphémère ou
générant des effets secondaires.
Quant à certaines maladies cardio-artérielles, il semble qu'il n'existe pas d'autre solution thérapeutique que le gaz
thermal, employé à Royat dans le Puy-de-Dôme, par exemple.
L'efficacité des cures est donc aujourd'hui incontestable, alors que leur coût social reste très modeste. Chacun sait qu'il
est équivalent pour vingt-et-un jours de cure à celui d'une journée d'hospitalisation, sans compter les effets induits,
comme la baisse de consommation des médicaments.
Dès lors qu'au cours des assises nationales du thermalisme, qui se sont déroulées dernièrement à Toulouse, il a été
rappelé que la convention thermale de 1997 était valable pour cinq ans, sauf renégociation des parties signataires, j'ai
demandé à M. le secrétaire d'Etat à quel moment il comptait engager la concertation et comment une orientation
comme celle de la CNAM pouvait être envisagée alors que la réforme est seulement en cours d'application.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, la
Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, a effectivement lancé une réflexion sur les
moyens de parvenir à une meilleure utilisation des ressources de l'assurance maladie. Cette démarche, qui englobe le
thermalisme, activité de soins remboursée par l'assurance maladie, s'inscrit dans la logique de ses compétences et
n'est pas, en soi, contestable, ne serait-ce que parce que les derniers chiffres disponibles concernant ce secteur font
état d'une augmentation importante - de 5 % en 1998 par rapport à 1997 - des dépenses thermales remboursées.
Le plan stratégique, adopté dans son principe par le conseil d'administration de la CNAMTS le 30 mars 1999, comporte
notamment une mesure de restriction de la prise en charge des cures, laquelle serait limitée à deux orientations
thérapeutiques, concernant plus particulièrement les jeunes enfants, d'une part, et les brûlés, d'autre part. Ce plan doit
être compris comme le point de départ d'une discussion avec tous les partenaires concernés et nous souhaitons que
cette discussion s'engage dans les meilleurs délais.
Les propositions actuellement formulées dans ce plan relèvent de l'entière responsabilité de la CNAMTS, et les débats
qui s'ensuivront devront prendre en compte, à l'évidence, les réflexions concernant l'efficacité et l'utilité médicale du
thermalisme. Le Gouvernement n'a pas encore arrêté de position sur ces propositions ; il ne le fera qu'à l'issue de cette
concertation approfondie avec l'ensemble des acteurs concernés par le thermalisme.
Soyez convaincu, monsieur le sénateur, que le Gouvernement a pris l'exacte mesure de la dimension économique et
sociale du thermalisme - on peut évoquer ici les 130 000 emplois directs et indirects ainsi que les recettes de taxe
professionnelle - de son importance en matière d'aménagement du territoire - plus de cent stations réparties sur
quarante-cinq départements - et des potentialités qu'il présente en matière touristique, y compris pour les catégories
les plus défavorisées.
Je redis, s'il en était besoin, qu'à ce jour aucune décision de réforme des conditions de prise en charge du thermalisme
n'a été prise.
M. Marcel Bony. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Bony.
M. Marcel Bony. Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, de votre réponse qui se veut rassurante mais qui
laisse néanmoins subsister beaucoup d'inquiétudes.
La réforme tarifaire issue de la convention thermale du 5 mars 1997 a un coût, certes, comme toute réforme. Elle était
nécessaire, mais il convient de préciser que les établissements thermaux assurent une partie de ce coût puisqu'il n'y a
pas eu de revalorisation des tarifs en 1998 et en 1999.
Si la vraie question, souvent évoquée, est celle de la valeur médicale de la crénothérapie, il convient de mettre au point
un dispositif d'accréditation-évaluation, avec l'aide des universités enseignant le thermalisme, en collaboration avec
l'ANAES, l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation scientifique, et en liaison avec l'INSERM, l'Institut national de
la santé et de la recherche médicale. Cette valeur peut être démontrée à trois niveaux : observation clinique, études
statistiques et recherche expérimentale. C'est d'ailleurs la proposition du groupe sénatorial d'études sur le thermalisme.
Le prochain contrat de plan est une bonne occasion de contribuer à établir ce bilan d'évaluation des pratiques. Je m'en
suis récemment ouvert à un membre du cabinet de M. le Premier ministre.
En tout état de cause, les curistes et les stations qui les accueillent comptent beaucoup sur le secrétaire d'Etat à la
santé pour défendre la médicalisation, qui fonde la légitimité du thermalisme français depuis plus de cinquante ans.
N'oublions pas que les maladies chroniques traitées dans les stations thermales augmentent rapidement du fait du
vieillissement de la population française et de l'urbanisation. Par exemple, avant-hier, une émission télévisée faisait état
d'une augmentation du nombre des asthmatiques : ceux-ci sont aujourd'hui trois millions en France, chiffre énorme.
Tout cela justifie qu'une attention particulière soit portée au développement du thermalisme, dont l'efficacité a été
reconnue voilà bien longtemps par l'Organisation mondiale de la santé.

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