Question de Mme BEAUDEAU Marie-Claude (Val-d'Oise - CRC) publiée le 22/04/1999

Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le recours abusif aux contrats de travail à durée déterminée. Aux termes de l'article L. 122-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée " ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise " et devrait donc rester exceptionnel. Elle lui rappelle que seules trois hypothèses justifient le recours à ce contrat : le remplacement d'un salarié absent, un accroissement temporaire de l'activité, le caractère saisonnier de certains emplois. Or elle observe que plus de la moitié des postes créés au cours des deux dernières années relèvent de la catégorie des emplois dits précaires. Elle lui fait remarquer que nombre d'entreprises ou d'administrations recourent à ce type de contrat, sans pour autant respecter strictement l'esprit de cette loi et à la limite de la légalité. Elle demande donc quelles mesures elle compte prendre afin d'éviter un dévoiement des contrats de travail à durée déterminée et de permettre à nombre de personnes d'éviter les risques de précarité qui en découlent systématiquement.

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Réponse du ministère : Emploi publiée le 26/08/1999

Réponse. - L'honorable parlementaire appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur le recours abusif aux contrats à durée déterminée. Elle demande quelles mesures sont envisagées afin d'éviter un dévoiement des contrats à durée déterminée et une précarisation accrue des salariés. Il est nécessaire tout d'abord de rappeler que la loi nº 90-613 du 12 juillet 1990 favorisant la stabilité de l'emploi par l'adaptation du régime des contrats précaires avait pour but de mieux encadrer l'utilisation des contrats précaires (contrats à durée déterminée et contrats temporaires), en clarifiant les conditions de recours et en mettant en place des moyens de contrôle plus efficaces et un régime de sanctions plus dissuasif. Ainsi, le rétablissement d'une liste limitative de cas de recours a permis de limiter l'utilisation des contrats précaires en facilitant la détection et la correction des pratiques abusives par les services d'inspection. Tous les recours aux contrats à durée déterminée ne constituent pas un détournement systématique de la loi par les employeurs. L'utilisation des contrats précaires peut répondre en effet à un besoin réel de certaines entreprises, qui disposent ainsi des souplesses nécessaires pour affronter la concurrence nationale et internationale et les aléas de la conjoncture économique. L'utilisation de contrats précaires s'effectue alors dans le cadre légal que représente le surcroît temporaire d'activité, cas de recours le plus largement répandu avec le remplacement de salarié absent. Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de dérives sont effectivement constatées dans le recours aux contrats précaires, dérives dues à une utilisation structurelle de ces contrats pour pourvoir des postes permanents. Plusieurs moyens ont été et seront mis en place pour encadrer le recours aux formes précaires d'emploi. Le recours aux contrats de travail précaires ne peut pas être en effet un mode de régulation permanent des effectifs dans une entreprise et cela d'autant moins, d'une part, que la stabilisation du taux de croissance devrait conduire les entreprises à embaucher désormais sur des contrats à durée indéterminée et, d'autre part, que le dispositif légal de réduction et d'aménagement du temps de travail permet de limiter le recours à la flexibilité externe, comme en témoignent déjà de nombreux exemples d'entreprises. Par ailleurs, un dispositif de sanctions civiles et pénales est prévu par la loi. Ainsi, le recours irrégulier aux contrats précaires entraîne par le juge la requalification en contrat à durée indéterminée au terme d'une procédure accélérée (affaires de requalification portées directement devant le bureau du jugement sans phase préalable de conciliation au même titre que l'absence d'écrit ou que la poursuite de la relation de travail après l'échéance du terme). A ce titre, la jurisprudence est très fournie en matière de requalification, les juges du fond vérifiant très attentivement la réalité du cas légal mentionné dans le contrat. Enfin, toute infraction aux dispositions de l'article L. 122-1-1 du code du travail fixant la liste des cas de recours aux contrats temporaires est soumise à des sanctions pénales prévues à l'article L. 152-1-4 du même code. Les contrôleurs et inspecteurs du travail font en l'espèce preuve d'une très grande vigilance. Outre les efforts de conseil et d'information que déploient les services déconcentrés du ministère de l'emploi et de la solidarité pour informer les entreprises qui recourent à ce type de contrat, ils effectuent de nombreux contrôles dans les entreprises qui aboutissent le plus souvent à une mise en conformité des contrats. Enfin, une démarche a été engagée en vue de mobiliser les partenaires sociaux, au niveau des branches professionnelles, afin qu'ils négocient et s'accordent pour faire baisser les taux excessifs de recours aux emplois précaires et proposent, en fonction des situations économiques et de l'emploi propres aux branches, des solutions visant à améliorer les trajectoires professionnelles des travailleurs précaires et à développer les moyens d'accès à la qualification.

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