Question de M. CANTEGRIT Jean-Pierre (Français établis hors de France - UC) publiée le 16/04/1999

M. Jean-Pierre Cantegrit appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur les négociations qui ont été entreprises par la division des affaires européennes et internationales de son ministère avec ses homologues polonais. Lors de cette négociation à Varsovie, les 3 et 5 mars 1999, la situation de la Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger (CFE) dont il préside le conseil d'administration a été abordée. En effet, au cours des discussions, la couverture apportée par cette caisse aux entreprises françaises adhérentes a été l'objet de réclamations émanant de la partie polonaise, laquelle entend mettre fin de façon rétroactive à la dispense d'adhésion au système de sécurité sociale polonais qui prévalait jusqu'à présent pour les entreprises adhérentes de la CFE et d'obliger par conséquent ces dernières soit à payer une double cotisation, polonaise et française, soit à quitter le système d'assurance volontaire de la CFE. Il s'étonne que les négociateurs français n'aient pas défendu la position de la CFE - alors même qu'ils siègent au conseil d'administration de cette dernière - pour n'envisager dans leurs négociations que le régime du détachement au titre de la sécurité sociale. Il lui rappelle à ce sujet que pour des prestations équivalentes, les cotisations des entreprises françaises à la CFE - qui sont soumises sur place à une concurrence importante - sont trois fois inférieures à celles qu'elles paieraient dans le cas où elles choisiraient la formule du détachement. Il lui rappelle également que les entreprises françaises ont été à l'origine de la création de la CFE, qu'elles ont toujours été solidaires des actions de solidarité que cette dernière a menées notamment dans le cas où nos compatriotes étaient en difficulté comme par exemple dans les pays du Golfe ou dans l'ex-Zaïre et qu'elles ont été parties prenantes aux actions menées pour faciliter l'envoi de jeunes Français à l'étranger en les dispensant de cotisations. Compte tenu de ce qui précède, il se demande dans ces conditions comment la CFE peut assurer l'équilibre de ses comptes - auquel il la sait attachée - si on la prive de la faculté de pouvoir assurer des entreprises françaises installées en Pologne. A ce jour, la Pologne n'est pas membre de l'Union européenne même si des pourparlers sont en cours en vue de son admission. Aussi se demande-t-il s'il est opportun par le biais de conventions bilatérales d'alourdir la charge des entreprises qui oeuvrent pour notre pays.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 19/05/1999

Réponse apportée en séance publique le 18/05/1999

M. Jean-Pierre Cantegrit. Je voulais attirer l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité - et, monsieur
le secrétaire d'Etat, c'est donc vous qui allez me répondre - sur la négociation qui a été entreprise par la division des
affaires européennes et internationales du ministère des affaires sociales avec son homologue polonais.
Lors de cette négociation, qui s'est tenue à Varsovie les 3 et 5 mars 1999, la situation de la caisse de sécurité sociale
des Français de l'étranger, la CFE, dont je préside le conseil d'administration, a été abordée.
En effet, au cours des discussions, la couverture apportée par cette caisse aux entreprises françaises adhérentes a été
l'objet de réclamations émanant de la partie polonaise, laquelle entend mettre fin de façon rétroactive à la dispense
d'adhésion au système de sécurité sociale polonais qui prévalait jusqu'à présent pour les entreprises adhérentes à la
CFE et obliger, par conséquent, ces dernières soit à payer une double cotisation, polonaise et française, soit à quitter
le système d'assurance volontaire de la CFE.
Je m'étonne que les négociateurs français n'aient pas défendu la position de la CFE, alors même qu'ils siègent au
conseil d'administration de cette dernière, pour n'envisager dans leurs négociations que le régime du détachement au
titre de la sécurité sociale.
Je vous rappelle à ce sujet que, pour des prestations équivalentes, les cotisations des entreprises françaises à la CFE,
qui sont soumises sur place à une concurrence importante, sont trois fois inférieures à celles qu'elles paieraient dans le
cas où elles choisiraient la formule du détachement.
Je vous rappelle également que les entreprises françaises ont été à l'origine de la création de la CFE ; lorsque l'on a fait
appel à elles, elles ont toujours été solidaires des actions de solidarité qui ont été menées, notamment dans le cas où
nos compatriotes étaient en difficulté comme dans les pays du golfe, dans l'ex-Zaïre et dans d'autres pays d'Afrique que
vous connaissez bien, et qu'elles ont été parties prenantes aux actions menées pour faciliter l'envoi de jeunes Français
à l'étranger en les dispensant de cotisations.
Dans ces conditions, je me demande comment la CFE peut assurer l'équilibre de ses comptes - auquel je sais que
Mme Aubry est attachée, elle me l'a dit - si on la prive de la faculté de pouvoir assurer des entreprises françaises
installées en Pologne. A ce jour, la Pologne n'est pas membre de l'Union européenne, même si des pourparlers sont en
cours de vue de son admission. Aussi je me demande s'il est opportun par le biais de conventions bilatérales d'alourdir
la charge des entreprises qui oeuvrent pour notre pays.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, vous avez appelé
l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, qui est désolée de ne pouvoir vous répondre elle-même, sur
les négociations qui ont été entreprises par ses services avec leurs homologues polonais, à la demande de ces
derniers.
Vous vous élevez contre le fait que les intérêts de la Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger y auraient
été mal défendus face à la volonté de la Pologne de mettre fin à la dispense de cotisation au régime polonais des
entreprises françaises adhérentes à la CFE.
Dans le cadre de la mise en place le 1er janvier 1999 d'un nouveau système d'assurance maladie, l'Institut de protection
sociale polonais - le ZUS - chargé du recouvrement des cotisations correspondantes a entrepris une série de contrôles
des entreprises étrangères établies sur son territoire et des entreprises polonaises créées depuis 1989.
Il entend vérifier que tous les salariés des entreprises exerçant sur le territoire polonais cotisent bien au régime polonais
de sécurité sociale, à l'exception des salariés détachés par leur entreprise. Ceux-ci restent, en effet, affiliés au régime
obligatoire de leur Etat d'origine pour une durée déterminée, par exemple, pour les salariés français, pendant les six
premiers mois de leur présence en Pologne, conformément à la convention signée en 1948 par la France avec ce pays.
Au-delà de ce délai, les entreprises doivent verser des cotisations au régime polonais.
De manière générale, les clauses de détachement prévues dans les conventions bilatérales de sécurité sociale, telles
que celles qui lient la France à la Pologne, déterminent les catégories de personnes qui sont maintenues pour un
temps dans le régime de base du pays d'origine bien qu'exerçant leur activité professionnelle à l'étranger. Elles ne
prévoient en aucune manière le transfert d'affiliation dans un organisme tiers volontaire, fût-il légal comme la CFE. Un tel
organisme n'existe, au demeurant, qu'en France et, dans une moindre mesure, en Belgique. La France elle-même veille
à l'application stricte de ces règles sur son propre territoire.
La campagne de contrôle engagée par la Pologne, qui ne touche pas que les entreprises françaises, a débuté en 1998.
Elle n'a aucun lien avec les discussions auxquelles vous faites référence sur les modalités d'application de la
convention de 1948, qui se sont déroulées à Varsovie du 3 au 5 mars dernier. Cette campagne de contrôle comme le
fait que certaines entreprises françaises aient choisi d'affilier leur personnel occupé en Pologne à la Caisse de sécurité
sociale des Français de l'étranger n'ont pas du tout été abordés lors de ces discussions.
L'équilibre financier du régime volontaire maladie de la Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger ne peut se
réaliser à l'encontre des règles que je viens de rappeler. Pour préserver l'avenir de la caisse, il faut trouver d'autres voies
qui soient cependant conformes à nos engagements internationaux.
Telle est la réponse que Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité voulait vous apporter, monsieur le sénateur.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de cette réponse, bien qu'elle ne me donne
pas entière satisfaction.
D'ailleurs, je vais écrire à vos collègues M. Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et M.
Dondoux, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, pour attirer leur attention sur la situation.
Je constate qu'une caisse de sécurité sociale comme la CFE, je l'ai indiqué tout à l'heure dans mon propos, est d'un
coût trois fois inférieur à celui du régime du détachement. En outre, et j'insiste sur ce point, il y a un effort important à
faire à l'égard de nos compatriotes français en matière de justice sociale. Ils ne relèvent pas du régime national de
sécurité sociale, qui se préoccupe, pour sa part, de mettre en oeuvre une justice sociale sur le territoire français. Je
tenais à appeler l'attention de Mme Aubry sur cette question importante.
Dans d'autres pays que la Pologne, nous constatons des situations comparables.
La Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger peut couvrir des entreprises françaises, quelquefois avec une
double cotisation. Malheureusement, en Pologne, le taux est de 48 %, comme vous le savez, monsieur le secrétaire
d'Etat, ce qui devient insurmontable pour nos entreprises françaises. Il y a donc là un réel problème, car c'est un pays
qui connaît un développement considérable en ce moment. Les entreprises françaises s'y installent ; elles doivent
pouvoir - ce n'est pas commode à réaliser - avoir toutes leurs chances vis-à-vis de leur concurrents, européens
notamment.

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