Question de M. COURTOIS Jean-Patrick (Saône-et-Loire - RPR) publiée le 18/03/1999

M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, quant à la possible suppression des tribunaux de commerce de Charolles et d'Autun en Saône-et-Loire, dans le cadre de la refonte de la carte judiciaire. Une mission chargée de la réforme de la carte judiciaire a été constituée en septembre 1998 à l'initiative de la chancellerie qui, après consultation des acteurs du monde judiciaire et des élus locaux, devra formuler des propositions pour optimiser le service public de la justice. Les tribunaux de commerce destinés à disparaître seraient ceux implantés dans les villes qui ne disposent pas, à ce jour, d'un parquet et d'un tribunal de grande instance. Quatre-vingts tribunaux de commerce sur les 227 existants devraient ainsi être rayés de la carte. En Saône-et-Loire, les villes d'Autun et de Charolles verraient leur tribunal de commerce disparaître. Après la disparition programmée des agences de la Banque de France, des sites militaires, des gendarmeries, des maternités, des hôpitaux et des bureaux de poste, une centaine de villes de " petite importance " vont être confrontées à la fermeture de leur tribunal de commerce et de son greffe. Autant de suppressions d'emplois locaux et des commerces situés à proximité du tribunal. Faute de prendre en compte l'intérêt des zones rurales françaises, la logique nationale va de nouveau générer l'hémorragie des emplois et de la diversification économique en zone rurale. Ce constat est d'autant plus flagrant dans le cas de la justice commerciale, qui de toute les juridictions, s'exerce sans financement de l'Etat et qui bien au contraire contribue à son désendettement, au maintien de la cohésion sociale, de la vie économique et commerciale en zone rurale. L'éventuel regroupement des tribunaux aurait pour conséquence fondamentale d'éloigner les entreprises de leurs juges naturels, surtout à une époque où le nombre de procédures est en progression constante, entraînant des pertes de temps, une augmentation des frais de déplacements, la méconnaissance des dossiers. Les entreprises justiciables verraient par là même une aggravation de leur situation. D'une manière générale, une éventuelle concentration apparaîtrait en totale opposition avec la politique de décentralisation entreprise ces dernières années. C'est pourquoi, il souhaiterait obtenir des assurances quant à la pérennité des tribunaux de commerce de Charolles et d'Autun.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 02/12/1999

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la réorganisation de la carte consulaire est une réforme de vaste ampleur. En effet, elle concerne à la fois l'organisation, le fonctionnement de la justice et son implantation territoriale. Sur ce dernier point, le souci de concilier la logique fonctionnelle et l'efficacité de la justice avec l'aménagement du territoire a conduit d'une part à créer une mission sur la réforme de la carte judiciaire, auprès du directeur des services judiciaires, d'autre part à lui demander de pratiquer une concertation approfondie, sur le terrain, avant toute proposition de réforme. Cette concertation, au cours de laquelle de nombreux points de vue ont été exprimés, s'est déroulée dans le département de la Saône-et-Loire, le 7 octobre 1998 puis le 23 avril dernier. L'examen de la situation des juridictions commerciales de Mâcon et de Chalon-sur-Saône, villes disposant d'une importante présence judiciaire, a permis de constater que leur activité se situait dans la moyenne nationale, ces juridictions traitant les trois quarts du contentieux commercial départemental. La situation de la juridiction commerciale de Charolles a donné lieu à un débat plus dense eu égard à l'étendue de son ressort, de son éloignement par rapport à Mâcon et de la desserte routière entre ces deux localités. Malgré une expertise complémentaire, ces éléments n'ont pas permis de faire contrepoids aux données quantitatives très faibles. La juridiction charollaise a en effet traité, en 1997, quatre-vingt-huit affaires en contentieux général, quarante-quatre en procédures collectives. Mais surtout, l'activité du tribunal s'est érodée fortement : 39 % en moins pour le contentieux général et 54 % pour les procédures collectives en cinq ans, obérant ainsi la viabilité de la juridiction et la possibilité de la faire fonctionner dans le cadre de la mixité et d'une présence accrue du parquet. L'analyse de la situation du tribunal de commerce d'Autun a montré que cette juridiction se situait dans un bassin d'activité regroupant les localités du Creusot et de Montceau-les-Mines. Cet élément a permis dans le cadre d'une concertation complémentaire de dégager une solution conciliant la recherche d'une juridiction de taille suffisante sans pour autant priver ce bassin d'une juridiction consulaire. Il a donc été décidé de procéder au rattachement du tribunal de commerce de Charolles à celui de Mâcon et de fusionner celui d'Autun à celui du Creusot, le ressort de cette juridiction étant élargi pour prendre en charge le contentieux commercial de Montceau-les-Mines. A ce jour les décisions qui ont été communiquées aux juridictions concernées par les chefs de cour ainsi qu'aux élus locaux par le préfet du département ont fait l'objet du décret nº 99-659 du 30 juillet 1999 portant suppression de tribunaux de commerce dans huit cours d'appel. Cette réforme permettra par ailleurs de limiter le risque d'atteinte à l'impartialité objective des juges consulaires mis en évidence par le rapport de la commission d'enquête parlementaire et le rapport des inspections générales des finances et des services judiciaires sur l'organisation et le fonctionnement des tribunaux de commerce. En effet, ce risque indépendant du comportement adopté dans l'instance par le juge concerné s'accroît dans les ressorts où l'étroitesse du vivier de recrutement et le faible nombre de justiciables potentiels renforcent la proximité des juges et des parties.

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