Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 11/03/1999

M. René Trégouët appelle l'attention de M. le Premier ministre sur la grave question de la responsabilité pénale des fournisseurs d'accès à l'Internet qui hébergent sur leurs sites, à titre gratuit, et de façon anonyme, les pages personnelles mises en ligne par des tiers. Une récente décision de justice a en effet condamné à une lourde amende un fournisseur d'accès à l'Internet, prestataire d'hébergement, au motif qu'il était entièrement responsable de la totalité du contenu des pages hébergées sur son site. Ces décisions de justice conduisent à la cessation d'activité de ces prestataires d'hébergement à titre gratuit et entraînent une délocalisation, sur des sites situés à l'étranger, de ces pages personnelles de plus en plus nombreuses, ce qui risque de pénaliser la présence française sur l'Internet. En outre, il est injuste de faire porter sur le seul prestataire d'hébergement l'entière responsabilité du contenu des pages hébergées alors que les auteurs de ces pages incriminées ne sont même pas poursuivis. Cette situation juridique est d'autant plus anormale que les fournisseurs prestataires d'hébergement ont à présent les moyens techniques qui leur permettent de lever l'anonymat des auteurs de pages dont le contenu enfreint la loi. Tout l'intérêt de l'Internet, en tant que nouveau moyen d'information et d'expression, réside dans le fait que chacun peu gratuitement et, le cas échéant, anonymement, publier ses pages personnelles sur le réseau et les mettre à la disposition de tous. Il convient donc de trouver rapidement un nouveau cadre juridique qui permette de concilier la liberté d'expression et d'information et la responsabilité pénale des véritables auteurs de pages dont le contenu appelle des poursuites judiciaires. Il lui demande donc quelles sont les intentions du Gouvernement pour adapter notre cadre législatif à ce nouvel outil d'information qu'est l'Internet. Il lui demande notamment s'il ne conviendra pas de s'inspirer des recommandations du Conseil d'Etat, qui suggère de maintenir la responsabilité éditoriale à la fonction d'édition de contenus, mais de retenir un régime de responsabilité de droit commun pour toutes les autres fonctions exercées sur le réseau. Dans ce cadre, un fournisseur d'accès ne serait responsable, a priori, que de ses propres contenus, édités par lui-même, mais non de ceux auxquels il donne accès ou qu'il héberge. Une responsabilité de droit commun s'appliquerait toutefois pour les prestations autres qu'éditoriales afin de permettre les poursuites de fournisseurs d'accès en matière de complicité. Ce nouveau cadre permettrait également de se conformer à l'article 14 de la proposition de directive européenne du 23 décembre 1998 relative à certains aspects juridiques du commerce électronique, qui prévoit que la responsabilité du prestataire d'hébergement ne peut être engagée, sauf si celui-ci a eu effectivement connaissance du contenu illicite des pages hébergées et n'a pas agi rapidement pour rendre l'accès à ces pages impossible.

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 13/05/1999

Réponse. - L'honorable parlementaire attire l'attention du Premier ministre sur la responsabilité des fournisseurs d'accès à l'Internet. A l'occasion de sa rencontre avec les acteurs français de l'Internet le 17 mars 1999, le Premier ministre a affirmé la nécessité d'adapter le régime juridique applicable à l'Internet pour que s'établisse un équilibre entre la liberté d'expression et le respect des droits essentiels, notamment le respect de la vie privée. Les solutions relèvent à la fois de la loi et des règles déontologiques propres aux prestataires techniques. Le rapport " Internet et les réseaux numériques " que lui a remis le Conseil d'Etat formule des propositions pour l'adaptation du droit de la communication. Un travail interministériel est actuellement en cours qui, selon les v ux exprimés par le Premier ministre, permettra d'éclairer avant l'été les choix qu'il conviendra de faire en ce domaine.

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