Question de M. PEYREFITTE Alain (Seine-et-Marne - RPR) publiée le 04/03/1999

M. Alain Peyrefitte attire l'attention de M. le Premier ministre sur la prochaine mise sur le marché de viande bovine britannique. En effet, la Commission de Bruxelles va sans doute très prochainement prendre une décision sur l'autorisation d'importation de la viande bovine britannique. La Commission se substituera une fois de plus aux " politiques " qui, n'ayant pas voulu faire preuve de courage dans un choix clair et net, lui ont laissé carte blanche. Le ministre français, lors du Conseil des ministres européens qui devait décider sur ce point de son ordre du jour, s'est abstenu - pour ne pas chagriner le Premier ministre britannique ? - alors que l'Allemagne par exemple, n'a pas hésité à voter contre cette levée de l'embargo. N'aurait-il pas mieux valu, en vertu du principe de précaution, prendre la même décision nette ? L'Académie de médecine a pourtant émis de sérieuses réserves sur la levée au printemps de cet embargo. Elle préconise d'attendre au moins 2001 - délai de 5 ans correspondant à la durée moyenne d'incubation de la maladie de Kreutsfeld-Jakob depuis les mesures prises en 1996. Compte tenu de la longue période d'infection silencieuse qui est de 5, 10, voire 25 ans, le Gouvernement a-t-il pris conscience qu'il ne pourra nier avoir été informé par les scientifiques sur les risques qui menacent nos concitoyens en autorisant l'importation de la viande bovine britannique ? Aurons-nous dans 15 ou 20 ans un nouveau scandale sanitaire à l'échelon national ?

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 16/09/1999

Réponse. - L'honorable parlementaire attire l'attention de M. le Premier ministre sur la prochaine mise sur le marché de viande bovine britannique. L'embargo sur les viandes et les produits à base de viande bovine d'origine britannique a été décidé en mars 1996 au titre du principe de précaution par certains Etats membres, dont la France, de façon unilatérale puis confirmée sous forme de décision par la Communauté. La situation à l'époque justifiait une telle position, tant en raison des incertitudes qui existaient au niveau scientifique que pour garantir aux consommateurs la sécurité des produits mis en marché. Toutefois, dès le mois de juin 1996, le principe d'un assouplissement progressif de l'embargo a été décidé lors du Conseil européen de Florence réunissant les chefs d'Etat et de gouvernement. A cet effet, une procédure a alors été clairement définie, afin d'apporter toutes les garanties nécessaires pour assurer la protection de la santé des consommateurs. Celle-ci implique notamment que les comités scientifiques communautaires se prononcent sur chaque proposition présentée dans ce sens par la commission ; que celle-ci effectue une (ou plusieurs) mission(s) d'inspection in situ pour vérifier la bonne application du schéma validé par ces comités et qu'en cas de résultat favorable de la mission, la commission fixe la date de reprise des échanges. Le Royaume-Uni a tout d'abord présenté un régime d'exportation basé sur la certification des troupeaux, donnant des garanties sur le statut indemne d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) des troupeaux d'origine. Ce système, limité à la mise en marché communautaire des seules viandes désossées et aux produits à base de ces viandes provenant de bovins nés et élevés en Irlande du Nord, a été expertisé par le comité scientifique vétérinaire et a fait l'objet d'une mission d'inspection communautaire. Cette dernière s'étant prononcée favorablement sur la fiabilité des contrôles, la commission a fixé au 1er juin 1998, après examen de la proposition en comité vétérinaire permanent puis en conseil des ministres de l'agriculture, la date en vigueur de la première phase de levées partielles de l'embargo. Les Britanniques ont ensuite présenté un nouveau régime d'exportation basé sur la date de naissance des animaux, en vue d'une extension de la levée partielle de l'embargo au reste du territoire. Il s'agit d'exclure systématiquement de la mise en marché communautaire les animaux nés avant le 1er août 1996. Les garanties reposent, outre sur la date de naissance des animaux, sur le statut sanitaire de l'ascendance au regard de l'ESB, sur l'âge des animaux à l'abattage même s'ils sont nés après la date butoir et sur un système efficace de traçabilité garantissant la séparation des produits issus d'animaux répondant à ce régime des autres produits. La date du 1er août 1996 correspond à la date d'interdiction opérationnelle de toute farine de viande et d'os de mammifères dans l'alimentation de tous les animaux d'élevage (entrée en vigueur le 4 avril 1996 au Royaume-Uni). Elle a été fixée après que les résultats de différents contrôles pour vérifier la bonne application de cette interdiction, notamment de la mission organisée par l'office alimentaire et vétérinaire de la DGXXIV du 22 au 26 juillet 1996, eurent permis de garantir que les animaux nés après le 1er août 1996 n'avaient pas été exposés au risque de contamination par l'alimentation. Par ailleurs, les mères de bovins concernés ne doivent pas présenter de signe clinique d'ESB et doivent avoir survécu au moins 6 mois après leur naissance, afin d'éliminer tout risque de transmission verticale. Enfin, les animaux à l'abattage doivent être âgés de plus de 6 mois, délai minimal pour contrôler la survie de la mère, et de moins de 30 mois, les bovins de plus de 30 mois faisant l'objet d'un programme spécifique de retrait du marché de la consommation du Royaume-Uni. Seules les viandes désossées des animaux éligibles précités seront admises aux échanges, l'abattage des animaux et le désossage des viandes étant réalisés dans des établissements strictement dédiés à l'exportation sous contrôle permanent de vétérinaires officiels. Cette obligation revêt une importance fondamentale car l'infectivité des muscles au regard du risques BSE n'a jamais été mise en évidence. Ce régime d'exportation fondé sur la date de naissance des animaux a été expertisé par le comité scientifique directeur, qui a conclu le 20 février 1998 qu'un tel système était de nature à apporter toutes les garanties requises en termes de protection de la santé des consommateurs. Les conditions prévues dans ce schéma sont d'ailleurs plus restrictives que les normes internationales fixées par le code zoosanitaire de l'Office international des épizooties. Lors du conseil des ministres de l'agriculture des 23 et 24 novembre 1998, une majorité simple d'Etats membres s'est prononcée en faveur de la décision de la commission concernant ce schéma. La décision confiant à la seule commission le soin de fixer la date de reprise des échanges, la France s'est abstenue car elle considérait que le choix de la date d'entrée en vigueur de cette deuxième phase de levée partielle de l'embargo relevait d'une décision en conseil des ministres, et qu'il convenait en conséquence qu'un nouveau vote formel ait lieu suite à la présentation du (des) rapport(s) d'inspection de l'office alimentaire et vétérinaire consécutifs à la vérification des exigences préalables à la levée de l'embargo. Au vu d'une part des conclusions favorables des deux missions d'inspections communautaires, et notamment de celle organisée du 12 au 16 avril 1999, et d'autre part, de la réception de garanties de la part des autorités britanniques concernant la prise en compte des recommandations formulées dans ce dernier rapport, la commission a estimé que toutes les conditions permettant la fixation et la date étaient remplies. Lors de sa réunion du 14 juillet 1999, le collège des commissaires a donc fixé au 1er août 1999 la date de reprise des échanges de viandes bovine d'origine britannique selon le régime d'exportation fondé sur la date. Ces échanges ne se feront toutefois que dans un cadre très contrôlé et ne porteront en ce qui concerne les viandes que sur celles qui seront entièrement désossées et ayant subi un retrait des tissus nerveux et lymphatiques apparents, sur les viandes hachées et produits à base viande issus de viande désossées après retrait des mêmes tissus. La sécurité du dispositif reposant aussi sur l'efficacité des contrôles menés par les services officiels du Royaume-Uni, la France demandera à ce que les experts nationaux de notre pays soient associés aux contrôles réguliers que l'office alimentaire et vétérinaire de la commission conduira au Royaume-Uni. Par ailleurs, la France a toujours considéré qu'il était primordial de renforcer les mesures concernant l'information des consommateurs sur l'origine des viandes. Le décret nº 98-764 du 28 août 1998, pris en application du règlement communautaire nº 820/97 du conseil du 21 avril 1997 établissant un système d'identification et d'enregistrement des bovins relatif à l'étiquetage de la viande bovine et des produits à base de viande bovine, permet d'améliorer la traçabilité par la mise en place d'une base de données nationale d'identification et de traçage des bovins et de leurs produits dans laquelle sera répertorié tout bovin né en France ou en provenance d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un pays tiers. Ce système sera généralisé dans l'Union européenne à la fin de l'année 1999. Pour assurer une parfaite transparence du système, il reste toutefois à améliorer l'information des consommateurs au niveau de la restauration collective. C'est pourquoi, des réflexions sont actuellement menées pour trouver très rapidement une solution à ce problème.

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