Question de M. OSTERMANN Joseph (Bas-Rhin - RPR) publiée le 12/03/1999

M. Joseph Ostermann attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans le secteur de la restauration. En effet, les taux de TVA applicables dans ce secteur sont très disparates : 5,5 % pour la vente à emporter et 20,6 % pour la restauration classique. Ces disparités sont à l'origine à la fois de difficultés de contrôle par l'administration fiscale et d'inégalités de traitement ainsi que de distorsions de concurrence au détriment de la restauration classique. En outre, la France constitue une exception parmi ses partenaires européens : sur les quinze Etats membres de l'Union européenne, huit, dont les principaux concurrents de la France sur le marché touristique, appliquent un taux réduit sans opérer de distinction entre la vente à emporter et la consommation sur place. Ces distorsions de concurrence, tant internes qu'internationales, nuisent à la bonne santé de ce secteur économique. Ainsi, son volume d'activité a-t-il reculé de 25 % depuis 1990 et le nombre d'entreprises défaillantes s'est accru de 150 % de 1989 à 1995. Ce lourd constat m'a conduit, ainsi que d'autres collègues sénateurs, à demander une harmonisation à 14 % du taux de TVA lors du débat sur le projet de loi de finances pour 1999. Sensible à cet appel, le ministre du budget a alors annoncé que le Gouvernement allait " continuer à faire pression pour que le droit européen change " et à " plaider ce dossier à Bruxelles ". Le Gouvernement semble aujourd'hui avoir été exaucé puisque la Commission européenne vient d'annoncer un projet visant à modifier le champ d'application des taux réduits de TVA en faveur des services à haute intensité de main-d' oeuvre. Il appartient à chaque gouvernement de faire des propositions en fonction des circonstances propres à chaque Etat membre. Le secteur de la restauration s'inscrit parfaitement dans les critères fixés par la commission, à savoir qu'il s'agit d'un service à haute intensité de main-d' oeuvre, à prédominance locale, fourni aux consommateurs finaux et qui utilise principalement une main-d' oeuvre peu qualifiée. Il lui rappelle qu'une étude montre, d'une part, que l'application d'un taux de TVA à 14 % conduirait à la création de 7 500 à 13 500 emplois dès la première année, sans compter les effets induits sur d'autres filières et, d'autre part, qu'elle serait une opération pratiquement neutre pour les finances publiques. Il est par conséquent urgent que la France saisisse l'opportunité qui lui est offerte pour mettre enfin un terme à la situation actuelle qui n'est nullement satisfaisante et répondre aux attentes du quatrième employeur privé de France. Il lui demande donc s'il entend inscrire une telle baisse de TVA dans le secteur de la restauration sur la liste qu'il soumettra à la Commission d'ici le mois de septembre.

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Réponse du ministère : Fonction publique publiée le 28/04/1999

Réponse apportée en séance publique le 27/04/1999

M. Joseph Ostermann. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur
la taxe sur la valeur ajoutée, dans le secteur de la restauration.
En effet, les taux de TVA applicables dans ce secteur sont très disparates : 5,5 % pour la vente à emporter et 20,6 %
pour la restauration classique. Ces disparités sont à l'origine à la fois de difficultés de contrôle par l'administration
fiscale et d'inégalités de traitement ainsi que de distorsions de concurrence au détriment de la restauration classique.
En outre, la France constitue une exception parmi ses partenaires européens : sur les quinze Etats membres de
l'Union européenne, huit, dont les principaux concurrents de la France sur le marché touristique, appliquent un taux
réduit sans opérer de distinction entre la vente à emporter et la consommation sur place.
Ces distorsions de concurrence, tant internes qu'internationales, nuisent à la bonne santé de ce secteur économique.
Ainsi son volume d'activité a-t-il reculé notoirement depuis 1990, et le nombre d'entreprises défaillantes s'est-il accru de
150 % de 1989 à 1995.
Ce lourd constat m'a conduit, avec d'autres collègues sénateurs, à demander une harmonisation à 14 % du taux de
TVA lors du débat sur le projet de loi de finances pour 1999. Sensible à notre appel, votre collègue Christian Sautter a
alors annoncé que le Gouvernement allait « continuer à faire pression pour que le droit européen change » et à « plaider
ce dossier à Bruxelles ».
Le Gouvernement semble aujourd'hui avoir été exaucé puisque la Commission européenne vient d'annoncer un projet
visant à modifier le champ d'application des taux réduits de TVA en faveur des services à haute intensité de
main-d'oeuvre. Il appartient à chaque gouvernement de faire des propositions en fonction des circonstances propres à
chaque Etat, et ce avant le 1er septembre 1999.
Le secteur de la restauration s'inscrit parfaitement dans les critères fixés par la Commission, à savoir qu'il s'agit d'un
service à haute intensité de main-d'oeuvre, à prédominance locale, fourni aux consommateurs finaux et qui utilise
principalement une main-d'oeuvre souvent peu qualifiée et située en zone rurale.
Une étude montre - je me permets de le préciser - d'une part, que l'application d'un taux de TVA à 14 % conduirait à la
création de milliers d'emplois dès la première année, sans compter les effets induits sur d'autres filières, et, d'autre part,
qu'elle serait une opération pratiquement neutre pour les finances publiques.
Il est par conséquent urgent que la France saisisse la possibilité qui lui est offerte de mettre enfin un terme à la
situation actuelle, qui n'est pas satisfaisante, et de répondre aux attentes du quatrième employeur privé de France.
Permettez-moi de demander si le Gouvernement entend inscrire une telle baisse de la TVA dans le secteur de la
restauration, ainsi que dans d'autres secteurs fort utilisateurs de main-d'oeuvre, sur la liste qu'il soumettra à la
Commission d'ici au mois de septembre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le
sénateur, je vous prie d'excuser M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, ainsi que M. le secrétaire
d'Etat au budget, qui ne peuvent être présents au Sénat ce matin et qui m'ont prié de vous répondre en leur lieu et
place.
La législation actuelle applicable en matière de taxe sur la valeur ajoutée ne permet pas d'appliquer un taux réduit de
taxe sur la valeur ajoutée aux biens et services autres que ceux qui sont visés à l'annexe H de la sixième directive et
qui n'en bénéficiaient pas au 1er janvier 1991.
Ainsi, la Commission européenne a récemment confirmé à la France qu'elle ne pouvait pas actuellement appliquer un
taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée au secteur de la restauration. C'est le point de départ de votre question.
Cela étant, je voudrais rappeler qu'il n'existe pas d'exception française en ce domaine. En effet, huit autres Etats
membres soumettent leurs opérations de ventes à consommer sur place à des taux de TVA compris entre 15 % et 25
%.
Certes, le Parlement vient d'être saisi d'une proposition de directive pour modifier le texte européen en matière de taux
de la TVA. Mais, outre que ce texte est une proposition qui devra être adoptée par l'ensemble des Etats membres, il
subordonne chaque application expérimentale de baisse de TVA à un accord préalable de la Commission.
Au surplus, il n'est pas très évident que le secteur de la restauration puisse entrer dans le champ défini par cette
proposition de modification de la directive.
En tout état de cause, il est difficile d'envisager l'application du taux réduit au secteur de la restauration. En effet, il faut
le savoir, cette mesure aurait un coût annuel de 22 milliards, ou de 9 milliards de francs, selon que le taux réduit
applicable à ces opérations serait fixé à 5,5 % ou à 14 %. Bien évidemment, un tel coût ne peut pas être accepté dans
le contexte budgétaire actuel.
J'ajoute qu'une baisse du taux de taxe sur la valeur ajoutée dans ce secteur ne revêtirait pas un caractère très
redistributif. En effet, même si elle était répercutée sur le consommateur, ce qui reste à vérifier, elle bénéficierait à des
catégories de populations plutôt favorisées ainsi qu'à des non-résidents effectuant de courts séjours en France.
C'est la raison pur laquelle, monsieur le sénateur, cette baisse ne semble pas pouvoir être envisagée dans un avenir
très proche.
M. Joseph Ostermann. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.
S'agissant de la directive européenne, que vous avez citée, je crois pouvoir affirmer que l'hôtellerie et la restauration sont
bien concernées par ces dispositions. Il s'agit en effet d'un secteur qui génère une main-d'oeuvre relativement
importante.
Les professionnels de l'hôtellerie et de la restauration attendent que le Gouvernement s'engage pour eux. En effet, non
seulement ce secteur génère un nombre important de créations d'emploi, mais il est aujourd'hui la vitrine touristique de
la France.
Une ouverture a été faite par l'Union européenne à travers cette directive, qui a été notifiée au Sénat le 29 mars dernier.
Le Gouvernement doit s'engager très fortement pour parvenir à réduire le taux de TVA applicable en la matière.

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