Question de M. ALTHAPÉ Louis (Pyrénées-Atlantiques - RPR) publiée le 05/03/1999

Question posée en séance publique le 04/03/1999

M. Louis Althapé. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Mme Maestracci, présidente de la mission interministérielle de lutte contre la drogue, a remis dernièrement au Premier
ministre un rapport qui a ranimé à l'intérieur même du Gouvernement la controverse sur l'usage des drogues douces.
Votre persévérance à vouloir banaliser l'usage de drogues douces, malgré les réserves expresses de vos collègues de
l'intérieur et de la justice, se fondent sur des études démontrant que l'alcool et le tabac font plus de morts que le
cannabis, ce qui relativiserait donc la gravité de l'usage de celui-ci.
Cette approche purement médicale, qui amalgame tout, ne sert ni la lutte contre la drogue ni la lutte contre le
tabagisme et l'alcoolisme.
Par ailleurs, il est certain qu'un lien très fort existe entre les flambées de violence urbaine et le phénomène de la
drogue. Derrière les jeunes qui incendient les voitures, il y a ceux qui les excitent, leur fournissent des cocktails
Molotov et pour qui il est essentiel de faire de certaines zones des lieux de non-droit où la police ne mettrait plus les
pieds, afin de développer en toute impunité le trafic de drogue.
Il est donc grand temps de rappeler l'impérieuse nécessité de l'interdit pour défendre ce qui est mauvais pour l'individu et
la société, de souligner que l'usage du cannabis est extrêmement néfaste pour la santé, de mettre un terme à des
amalgames qui ne favorisent ni la lutte contre la drogue, ni la lutte contre le tabagisme, ni la lutte contre l'alcoolisme.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quelles mesures comptez-vous prendre pour réparer le mal déjà fait et effacer la profonde
confusion que vous avez jetée dans l'esprit du public ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du ministère : Santé publiée le 05/03/1999

Réponse apportée en séance publique le 04/03/1999

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, si une confusion doit
être effacée, c'est dans votre esprit, et je vais m'y employer. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Ici même, monsieur le sénateur - mais en votre absence, je le regrette - a eu lieu sur le sujet que vous évoquez le vrai,
le seul, l'unique débat au cours duquel les sénateurs et le Gouvernement ont pu échanger des arguments de santé
publique et d'ordre public.
Mme Odette Terrade. C'est vrai !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, d'où sortez-vous notre goût pour la dépénalisation ?
Nous l'avons affirmé ici et je l'ai écrit depuis dix ans, personne ne veut dépénaliser les drogues douces, au contraire !
(M. Althapé fait un signe dubitatif.) Non, ne faites pas ce geste ! C'est écrit partout ! Nous en avons débattu dans cette
enceinte !
Il importe de mettre en perspective, pour des raisons de santé publique - parce qu'il faut réduire tous les risques et pas
seulement ceux qui sont allégués et diabolisés - les risques liés aux toxiques légaux et illégaux, certains étant
d'ailleurs plus importants que d'autres, mais je ne développerai pas ce point puisque je ne dispose malheureusement
que de deux minutes et demie.
Quoi qu'il en soit, il faut considérer non pas le produit mais la personne. Nous allons ainsi essayer d'établir ensemble
des mesures plus fortes pour prendre en charge les nouveaux toxiques très graves que sont les toxiques synthétiques
qui sont fabriqués dans nos pays, sans oublier que l'on va souvent d'un toxique, qu'il soit légal ou non, à un autre. Pour
la meilleure protection de notre jeunesse, nous établirons donc tous ensemble un certain nombre de mesures nouvelles
autour de la réduction des risques.
J'ai rencontré ce jour Mme le ministre de la santé de Norvège. Elle a reconnu que, les politiques étant à peu près
semblables dans nos deux pays, nous avions eu le courage de notre opinion, sans vouloir stigmatiser le moindre de
nos produits : nous ne sommes pas en train de dire qu'il n'est pas bien de consommer de l'alcool, du vin ou du tabac,
nous soutenons simplement que, la consommation de ces différents produits s'additionnant, il faut absolument que
nous débarrassions nos adolescents de leurs effets nocifs.
Bien entendu, nous devons agir ensemble et privilégier à l'approche idéologique l'approche de santé publique.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)

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