Question de M. TAUGOURDEAU Martial (Eure-et-Loir - RPR) publiée le 18/02/1999

M. Martial Taugourdeau rappelle à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité que les lois de décentralisation ont confié aux départements le domaine de l'aide médicale. Dans ce cadre, la compétence financière des départements est engagée dès lors que les bénéficiaires possèdent une résidence stable dans une commune. Et cette aide médicale est fort onéreuse. L'admission à cette aide est essentiellement prononcée au regard des ressources du demandeur et de ses facultés à faire face à ses dépenses de santé. S'agissant des ressortissants étrangers, l'admission à l'aide médicale n'est pas subordonnée à un titre de séjour en règle. D'après l'article 186 du code de la famille, une personne étrangère, en situation irrégulière peut bénéficier de l'aide médicale en justifiant d'une période de résidence ininterrompue de trois ans et de l'ensemble de soins médicaux sans durée de résidence. Cette situation n'est pas nouvelle mais grève de plus en plus le budget du département. Le Premier ministre a indiqué le 7 janvier dernier que les personnes non régularisées (63 000 d'après les chiffres gouvernementaux) ont vocation à retourner dans leurs pays, aidés en cela par une politique de codéveloppement. Il a donc confirmé la compétence et la responsabilité de l'Etat dans le suivi de la situation de ces personnes. A l'heure où se prépare un projet de loi visant à assurer une couverture maladie universelle sur le territoire, il lui demande si elle ne pense pas que la prise en charge de ces dépenses de santé envers ces ressortissants étrangers en situation irrégulière devrait figurer dans les dépenses prises en charge par l'Etat ? Il serait heureux de connaître son opinion sur ce point.

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Réponse du ministère : Ville publiée le 28/04/1999

Réponse apportée en séance publique le 27/04/1999

M. Martial Taugourdeau. Les lois de décentralisation ont confié aux départements la gestion de l'aide médicale. Dans
cette optique, la compétence financière desdits départements est engagée dès lors que les bénéficiaires de cette aide
possèdent une résidence stable dans une commune. Or cette prestation est fort onéreuse.
L'admission à son bénéfice est essentiellement prononcée au regard des ressources du demandeur et de ses facultés
à faire face à ses dépenses de santé.
S'agissant des ressortissants étrangers, cette admission n'est pas subordonnée à la présentation d'un titre de séjour en
règle. D'après l'article 186 du code de la famille, une personne étrangère en situation irrégulière peut bénéficier de l'aide
médicale si elle peut justifier de trois ans de résidence ininterrompue et de l'ensemble des soins médicaux sans
condition de durée de résidence. Cette situation n'est pas nouvelle, mais elle grève de plus en plus lourdement le
budget du département.
Le Premier ministre a indiqué, le 7 janvier dernier, que les personnes non régularisées - qui sont au nombre de 63 000
d'après les chiffres gouvernementaux - ont vocation à retourner dans leur pays, aidées en cela par une politique de
codéveloppement. Il a donc confirmé la compétence et la responsabilité de l'Etat en matière de suivi de la situation de
ces personnes.
A l'heure où Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité prépare un projet de loi visant à assurer une couverture
maladie universelle sur l'ensemble du territoire, les dépenses de santé engagées en faveur de ces ressortissants
étrangers en situation irrégulière ne devraient-elles pas figurer dans les dépenses prises en charge par l'Etat, ce qui
donnerait une meilleure répartition, la péréquation étant alors nationale ?
Je serais heureux de connaître votre point de vue sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le sénateur, vous demandez à Mme la ministre de l'emploi
et de la solidarité comment les étrangers qui ne peuvent justifier de la régularité de leur séjour sur le territoire national
seront pris en charge dans le cadre de la couverture maladie universelle.
Vous rappelez fort justement que ces personnes, d'après l'article 186 du code de la famille et de l'aide sociale, peuvent
bénéficier de l'aide médicale qui relève aujourd'hui de la compétence des départements. Je tiens à préciser que, dans
ce cadre, elles ont droit, sous condition de ressources, à la prise en charge des dépenses de soins hospitaliers
lorsqu'elles séjournent depuis moins de trois ans en France et à la prise en charge de l'ensemble des soins - soins
hospitaliers et soins de ville - lorsqu'elles résident sur le territoire national depuis plus de trois ans.
Le projet de loi sur la couverture maladie universelle ne modifie en rien ces conditions et ces règles. Cependant, comme
vous paraissez vous-même le souhaiter, il transfère le poids de cette prise en charge à l'Etat. Ces dispositions sont, en
effet, inscrites dans le titre III du projet de loi et le Sénat, monsieur le sénateur, aura l'occasion d'en débattre très
prochainement.
M. Martial Taugourdeau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Taugourdeau.
M. Martial Taugourdeau. Je remercie M. le ministre délégué à la ville, mais je veux ajouter qu'une autre question se
posera, celle des soins aux réfugiés kosovars.
Mon département n'en a pas encore accueilli, mais tous ces réfugiés auront besoin de soins hospitaliers, pour des
coûts variant de 1 500 francs à 7 000 francs par jour, qui seront pris en charge par les départements. Les départements
les plus généreux seront donc pénalisés par rapport aux autres.
Je souhaite que ces gens soient soignés convenablement. Ne conviendrait-il pas cependant, monsieur le ministre, de
mettre en place une péréquation nationale, même sans que l'Etat assume cette charge supplémentaire ? Pour ma part,
je propose que l'on taxe chaque département proportionnellement au nombre d'habitants. Ainsi, chaque département
participerait à cet effort de générosité, même si l'Etat ne peut le prendre en compte.
M. Charles Descours. C'est une bonne question ! Le département de l'Isère reçoit en effet 150 réfugiés kosovars ce
matin et il a débloqué 1 500 000 francs hier.
L'Etat est généreux avec l'argent des départements !
M. Alain Gournac. Et moi, j'en ai reçu 136 hier !
M. le président. Si vous pouviez nous éclairer, monsieur le ministre, ce serait intéressant d'autant que, demain, 600
Kosovars arriveront à Marseille.
M. Charles Descours. Le conseil général sera obligé de payer !
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le président, messieurs les sénateurs, je ne puis répondre
d'une manière précise à cette interrogation. Vous imaginez facilement que nous n'avions pas pu prendre en compte les
agissements du président Milosevic et qu'il était difficile de prévoir un texte de loi pour faire face à cette situation
inhumaine.
Dès mon retour au ministère, je transmettrai votre interrogation à Mme Aubry pour qu'elle étudie très précisément les
dispositions qui peuvent être prises pour mettre en place cette solidarité nationale indispensable.
M. Charles Descours. Indispensable, en effet, parce que ça « rouspète » dans les conseils généraux !

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