Question de M. LESEIN François (Aisne - RDSE) publiée le 06/11/1997

M. François Lesein appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les coûts excessifs occasionnés par le taux de TVA à 20,6 % en ce qui concerne la consommation de gaz, d'électricité et de fuel ménager. Sachant qu'un taux dérogatoire de 5,5 % est reconnu pour favoriser la consommation de certains produits de première nécessité, il est étonnant de constater que le gaz, l'électricité et le fuel ménager n'entrent pas dans cette catégorie de produits. On ne saurait envisager un seul instant de pouvoir vivre sans l'un ou l'autre de ces trois éléments indispensables au confort minimum de nos habitations, aussi modestes soient-elles. C'est pourquoi il lui demande s'il ne serait pas plus juste et équitable d'appliquer, pour chacun de nos concitoyens, un taux de TVA de 5,5 % pour toute opération de consommation de gaz, d'électricité et de fuel domestique.

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Transmise au ministère : Budget


Réponse du ministère : Logement publiée le 04/02/1998

Réponse apportée en séance publique le 03/02/1998

M. François Lesein. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais vous faire part des difficultés soulevées par la TVA dans la
vente d'électricité. Cette dernière, rappelons-le, est assujettie au taux normal de 20,6 %. Un tel taux me semble excessif
au vu du niveau de vie des ménages français. En effet, les derniers mouvements sociaux ont révélé que l'insatisfaction des
personnes les plus démunies liée au coût excessif de l'électricité est un facteur aggravant de fracture sociale.
C'est pourquoi une nette diminution du taux de la TVA perçue sur les ventes d'électricité faciliterait le paiement de leurs
factures par tous les usagers.
La revendication des chômeurs relative à l'arrêt des coupures d'électricité dans les logements des familles les plus
défavorisées est particulièrement significative. Pourquoi imposer à des millions de ménages le taux maximum de TVA
alors qu'EDF fournit un produit de première nécessité et que le taux adéquat devrait donc être réduit à 5,5 % ?
Aujourd'hui, il semble difficilement concevable de ne pas considérer l'électricité comme un élément indispensable au
bien-être de nos concitoyens, au même titre que l'eau, les produits alimentaires. Pourtant, on constate aisément que, si
l'achat de chocolat, de caviar ou d'oeuvres d'art est une opération de première nécessité, la consommation d'électricité,
quant à elle, ne parvient pas à entrer dans la catégorie des taux réduits de TVA.
A ce propos, monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi d'étayer mes arguments par deux remarques.
La première s'appuie sur le taux de TVA normal en vigueur dans les Etats membres de l'Union européenne. Ici encore, on
constate à quel point le taux français est particulièrement élevé : 20,6 %, contre 15 % en Allemagne, 16 % en Espagne,
18 % en Grèce, 19 % en Italie, 15 % au Luxembourg et 17,5 % au Royaume-Uni. Et je ne parlerai pas des Açores et de
Madère, où le taux maximum de TVA s'établit à 12 %.
Ma seconde remarque se réfère au système italien, qui est intéressant. En effet, l'Etat italien impose un taux réduit de TVA
de 10 % pour les ventes d'électricité « domestique », c'est-à-dire l'électricité consommée par l'ensemble des ménages, et
un taux de TVA de 10 % à 19 % sur les ventes d'électricité « non domestique ». Cela revient à faire payer plus cher
l'utilisation industrielle d'électricité avec un taux variant en fonction de critères bien définis, tels que la pollution, la
surconsommation, etc.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi la France, à l'instar de ce qui se fait chez nos voisins italiens
comme dans d'autres pays européens, tels l'Irlande et de Luxembourg, où les taux de TVA sont extrêmement réduits,
n'instaurerait-elle pas un taux de TVA à 5,5 % qui assimilerait la vente d'électricité à l'usage de produits de première
nécessité ?
M. Charles Descours. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence
de M. Sautter, retenu par une obligation.
Comme vous le savez, monsieur le sénateur, le Gouvernement souhaite tout à la fois rendre la fiscalité plus équitable,
notamment en rééquilibrant fiscalité indirecte et fiscalité directe, la première pesant lourdement sur les revenus les plus
modestes, et accélérer le dynamisme de notre économie et la création d'emplois tout en améliorant la protection de
l'environnement.
C'est bien sûr dans cette perspective qu'il convient d'apprécier votre proposition d'abaissement du taux de la taxe sur la
valeur ajoutée sur la consommation d'électricité.
Bien évidemment, il faut s'interroger sur les répercussions d'une telle mesure en matière d'emploi, d'environnement et
d'économie d'énergie. Sa compatibilité avec le droit communautaire doit également être expertisée.
Il est clair que, comme vous en avez conscience, cette mesure poserait un problème budgétaire significatif puisque
l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée à la consommation de gaz, d'électricité et de fioul domestique
entraînerait des pertes de recettes de l'ordre de 20 milliards de francs.
Le Gouvernement est tout à fait conscient des difficultés qu'éprouvent un certain nombre de personnes et de ménages
dans notre pays devant cette charge de l'énergie liée à l'habitat. Il a ouvert un dialogue avec EDF, qui a d'ores et déjà pris
certaines mesures et qui a décidé de les amplifier, comme l'a indiqué la semaine dernière, à l'Assemblée nationale, Mme
Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, dans sa réponse à une question posée par Mme Muguette
Jacquaint, réponse à laquelle je vous invite à vous reporter.
En tout état de cause, s'agissant de l'abaissement du taux de TVA applicable à la consommation d'électricité, de gaz et de
fioul domestique, seules pourront être étudiées des solutions compatibles avec l'état de nos finances publiques et
susceptibles de s'inscrire dans les priorités que le Gouvernement s'est fixées pour la réforme de la fiscalité. Cette réforme
sera élaborée en 1998 et trouvera sa traduction dans le budget de 1999.
La loi de finances pour 1998 a déjà fait un pas très important en direction de l'habitat avec la baisse du taux de la TVA
applicable aux travaux réalisés par les organismes d'HLM dans leur patrimoine immobilier. L'évaluation du coût pour les
finances publiques, en année pleine, est de 2,8 milliards de francs, car sont visées non seulement les opérations de type
PALULOS, c'est-à-dire les opérations ouvrant droit à la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à
occupation sociale, mais également les grosses réparations réalisées sur fonds propres.
A cet effort s'ajoute un avantage fiscal nouveau, sous forme de crédit d'impôt ou de remboursement de la TVA sur
facture acquittée par ménage, dans la limite de 10 000 francs de travaux par an. L'évaluation de la dépense pour le
budget de l'Etat est de 1 milliard à 1,2 milliard de francs.
Des efforts importants ont été réalisés cette année pour l'habitat.
Le Gouvernement ne manquera pas d'être attentif à vos suggestions sur les problèmes d'énergie, tels que vous venez de
les exposer, monsieur le sénateur.
M. François Lesein. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai tout à fait conscience des contraintes budgétaires. Il n'en reste
pas moins vrai qu'EDF a obtenu tout récemment de conserver l'essentiel de ses prérogatives sur le plan européen, à la
seule condition que soit respectée la transparence de ses comptes.
Or la lecture des comptes permettra d'opérer des comparaisons qui risquent d'être peu flatteuses pour EDF : si les élus et
les gouvernants comprendront les difficultés, les utilisateurs n'ayant pas de quoi payer leur facture en fin de mois, eux, se
fâcheront en voyant l'affectation des comptes d'EDF ; et je ne citerai à cet égard que le comité d'entreprise.
La somme de 20 milliards de francs que vous indiquez, monsieur le secrétaire d'Etat, est certes importante. Mais il serait
bon, à mon avis, de faire quand même un geste important sur ce point, en tout cas vis-à-vis des personnes les plus
déshéritées. En effet, l'électricité est devenue un produit de consommation courante. Il n'y a donc pas de raison qu'elle
supporte un taux de TVA plus élevé que les autres produits de première nécessité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, tout en notant que l'effort n'est pas suffisant.

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