Question de M. FAYOLLE Gérard (Dordogne - RPR) publiée le 14/11/1997

Question posée en séance publique le 13/11/1997

M. le président. La parole est à M. Fayolle.
M. Gérard Fayolle. Ma question s'adresse à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame le ministre, je voudrais appeler votre attention sur la grève des routiers, qui a récemment pris fin. Il convient en
effet que soient tirées les leçons de ce type de manifestation.
Il n'est pas question de dénoncer la légitimité des revendications de la profession concernée. Il faut, en revanche, évoquer
les entraves que de semblables mouvements causent à un principe tout aussi fondamental que le droit de grève, celui de la
liberté de circulation des personnes, inscrit à l'article V du préambule de la Constitution et dont l'Etat est le garant. Il faut
encore souligner les atteintes que de telles manifestations portent à la liberté du travail et, par voie de conséquence, à
l'emploi.
S'agissant de la liberté de manifestation, l'Etat assume ses responsabilités. Il prend les mesures susceptibles de garantir
l'ordre public et la liberté d'aller et de venir de nos concitoyens. Or, quand il s'agit d'un blocage routier, à l'occasion
duquel 153 barrages se dressent, paralysent une bonne part de notre vie économique, notamment les petites entreprises
de notre pays - je vous assure, madame le ministre, que cela a été le cas en Périgord - et occasionne des perturbations,
parfois graves, dans la vie quotidienne des Français, l'Etat semble impuissant à faire respecter le droit.
Cette attitude paraît d'autant plus incompréhensible que c'est l'Etat, c'est-à-dire les contribuables, qui devra indemniser,
au titre de la loi de 1983, les dommages résultant de ce type d'entraves.
Par surcroît, l'Etat ne devrait-il pas répondre favorablement aux demandes de nos partenaires européens en prévoyant
des itinéraires de contournement, qui lui éviteraient les indemnisations ultérieures, supportées une fois de plus par nos
concitoyens ?
Le Gouvernement entend légiférer sur la profession de transporteur routier. N'est-ce pas l'occasion, madame le ministre,
qu'il rappelle avec force les principes que je viens d'évoquer ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. Le gouvernement que vous souteniez fut moins habile !

- page 3436


Réponse du ministère : Justice publiée le 14/11/1997

Réponse apportée en séance publique le 13/11/1997

M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, la meilleure façon d'assurer la
liberté de circulation, c'était justement de faire en sorte que le conflit prenne fin.
Un sénateur socialiste. Eh oui !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Et il a pris fin, cette fois-ci, après cinq jours. C'est beaucoup, mais c'est
moins que les douze jours de la précédente grève. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Josselin de Rohan. Justement, vous étiez avertis !
M. René-Pierre Signé. Vous nous avez donné des leçons !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. La position du Gouvernement a consisté à favoriser
ce qui est primordial, à savoir le dialogue entre les partenaires sociaux, et également à prendre les mesures qui relèvent de
sa compétence afin d'assurer les conditions d'exercice de la profession.
C'est ainsi, je le rappelle, qu'un décret a été pris dès le vendredi 6 novembre et qu'un projet de loi a été examiné par le
conseil des ministres lundi dernier, justement pour améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur
routier et faire en sorte que les accords conclus et la réglementation soient effectivement respectés.
Vous avez raison d'affirmer que le droit de grève s'exerce et qu'il est garanti par la Constitution, de même d'ailleurs que la
liberté de circulation. Je crois précisément que la législation en vigueur est tout à fait adaptée à la conciliation de ces deux
droits constitutionnels.
J'avais moi-même mis en place, à la Chancellerie, une cellule d'urgence, afin d'être tenue en permanence informée de
l'évolution de la situation et d'être en mesure, à tout moment, de donner aux procureurs généraux, si cela s'imposait, des
directives générales permettant d'avoir la même attitude sur l'ensemble du territoire.
Je crois, monsieur le sénateur, que la détermination du Gouvernement et le sens des responsabilités des partenaires
sociaux nous ont permis de faire face à ce conflit avec, encore une fois, le souci de maintenir un équilibre entre ces deux
droits constitutionnels que sont le droit de grève et la liberté de circulation. (Applaudissements sur les travées
socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

- page 3436

Page mise à jour le