Question de M. BARRAUX Bernard (Allier - UC) publiée le 15/10/1997

M. Bernard Barraux attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur l'urgente nécessité d'améliorer le statut des élus locaux et notamment des maires des communes rurales. Il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures que le Gouvernement envisage de prendre visant à donner suite à cette préoccupation.

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Transmise au ministère : Intérieur


Réponse du ministère : Éducation publiée le 17/12/1997

Réponse apportée en séance publique le 16/12/1997

M. Bernard Barraux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun d'entre nous connaît les
immenses services rendus par les maires, leurs mérites, leurs qualités et leur infini dévouement. Nous savons également
que plus la taille de la commune diminue et plus les difficultés augmentent.
Or, les maires doivent tout faire, tout savoir faire et, surtout, ne jamais se tromper.
Ils sont officiers d'état civil, officiers de police judiciaire, responsables de la tranquillité publique et, à ce titre,
responsables aussi, lorsqu'elle existe, de la police municipale - que l'on veut désarmer aujourd'hui. Ils sont également
responsables de l'urbanisme, de la voirie, en cas d'existence de régies directes, responsables aussi des réseaux d'eau et
d'assainissement. Bien entendu, ils sont impopulaires quand ils augmentent le prix de l'eau. Parfois, ils sont même
responsables d'une régie d'électricité.
Ils sont souvent conciliateurs, confidents, quelquefois même confesseurs, et toujours à l'écoute des préoccupations de la
population qu'ils administrent.
Mais ils sont civilement et désormais pénalement responsables de tous leurs actes.
Sur le plan financier, le contrôle a priori des délibérations du conseil municipal et, notamment, des décisions financières
a été remplacé par un contrôle a posteriori particulièrement tatillon, effectué par les chambres régionales des comptes,
contrôle dont on ne sait jamais où finit la régularité et où commence l'opportunité.
En tout état de cause, les maires sont passibles de la cour de discipline budgétaire et financière.
Par ailleurs, nos concitoyens sont de plus en plus exigeants vis-à-vis de leurs élus locaux et, bien souvent, de moins en
moins reconnaissants à l'égard de l'immense travail qu'ils accomplissent.
Et tout cela, monsieur le ministre, pour une indemnité de quelques centaines de francs par mois et une retraite dérisoire.
Les 36 000 maires des communes de France et leurs adjoints ont, me semble-t-il, bien du mérite de continuer à exercer
ces nobles responsabilités pour en être aussi peu remerciés !
Toutefois, prenons garde, car, si rien ne devait être fait pour améliorer le statut des élus locaux, nous risquerions
d'assister à une terrible désaffection de la part de nos concitoyens pour l'exercice de ces responsabilités, et c'est la
démocratie française tout entière qui serait alors touchée de plein fouet.
Certes, une loi de 1992 a très légèrement amélioré les conditions d'exercice des mandats locaux. Cependant, avec le
recul, ses insuffisances paraissent nombreuses et notoires, notamment pour les élus des communes rurales dont le régime
indemnitaire, eu égard aux immenses responsabilités qui sont les leurs, est toujours aussi dérisoire.
Cela vaut également pour les maires de communes moyennes. Etre maire d'une commune moyenne, en cette fin du xxe
siècle, nécessite, en effet, presque une présence à plein temps et devrait donc se traduire par une rémunération et une
couverture sociale correctes, ainsi que par des droits à retraite décents.
Il est urgent de s'attaquer à ce problème, sinon nos communes ne seront plus administrées que par deux catégories
sociales : les retraités et les fonctionnaires.
Monsieur le ministre, plutôt que de nous faire légiférer sur cette « vieille lune » qu'est le cumul des mandats et des
fonctions, ne pensez-vous pas qu'il vaudrait mieux prendre des initiatives visant à améliorer de manière significative le
statut des élus locaux, et notamment des maires qui, compte tenu des responsabilités qui sont les leurs, ne peuvent
absolument plus simultanément exercer une activité professionnelle et administrer correctement leur collectivité ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, mon collègue Jean-Pierre Chevènement étant retenu par la réunion des préfets, je
répondrai à sa place.
Monsieur Barraux, la démocratisation de l'accès aux mandats locaux et l'amélioration des conditions d'exercice de ces
mandats, gages du renforcement de la démocratie locale, constituent une préoccupation essentielle du Gouvernement.
La loi du 3 février 1992 a marqué une étape importante dans ce domaine. Elle a instauré des dispositions de nature à
permettre aux élus locaux un exercice plus serein de leurs fonctions : garanties accordées sous forme de disponibilité en
temps - autorisations d'absence et crédits d'heures - et, dans l'activité professionnelle, reconnaissance d'un droit à une
formation adaptée à leurs fonctions, droits à la protection sociale et à pension de retraite ainsi que, natuellement,
indemnités de fonctions, lesquelles ont été revalorisées de façon significative, notamment pour les élus des petites
communes et des villes moyennes.
A titre d'exemple, le maire d'une commune de moins de 1 000 habitants, qui percevait une indemnité de 1 880 francs
avant la loi de 1992, reçoit aujourd'hui une indemnité de 3 770 francs.
De plus, l'institution d'une dotation particulière aux petites communes rurales, prélevée sur les recettes de l'Etat, assure
aux collectivités concernées les moyens financiers adaptés à la mise en oeuvre des dispositions relatives aux conditions
d'exercice des mandats locaux. Son montant s'élève à près de 262,5 millions de francs pour 1997. Cette dotation aide
les petite communes rurales à financer les indemnités et la formation de leurs élus.
C'est donc une avancée substantielle qui a été ainsi réalisée.
L'essentiel des difficultés qui subsistent dans l'exercice de la démocratie locale réside, selon nous, dans les situations de
cumuls de mandats, alors même que les fonctions exécutives locales requièrent, pour la plupart d'entre elles, comme
vous l'avez dit, monsieur le sénateur, la totale disponibilité de ceux qui les exercent.
Le Gouvernement travaille à un projet de réforme de la législation sur les cumuls de mandats qui sera prochainement
soumis au Parlement.
Il est, à cette occasion, naturellement conduit à réfléchir également aux implications qu'une telle réforme pourrait avoir
sur quelques aspects des conditions d'exercice des mandats locaux, implications qui pourraient l'amener à en revoir
certaines dispositions.
Cette réflexion concernera aussi bien la situation des élus dans les grandes villes que celle des élus des communes
rurales.
M. Bernard Barraux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Barraux.
M. Bernard Barraux. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous venez d'apporter. Toutefois, je
précise au passage que les maires auxquels j'ai fait allusion n'ont rien à voir avec le cumul des mandats. En effet, si
certains élus détiennent peut-être trop de mandats, la plupart des maires des petites communes ne sont pas concernés
par ce problème, et la question ne sera pas résolue par le projet de loi annoncé.
Quant à la loi de 1992, je la connais bien : elle a accru les responsabilités des maires. Certes, sur le plan matériel,
quelques petites améliorations ont été apportées. Cependant, le montant des indemnités et des retraites accordées à des
maires qui ont parfois exercé leur mandant pendant vingt ans ou trente ans est ridicule au regard des responsabilités qui
ont été les leurs et du temps qu'ils y ont consacré.

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