Question de M. PONCELET Christian (Vosges - RPR) publiée le 10/10/1997

Question posée en séance publique le 09/10/1997

M. le président. La parole est à M. Poncelet.
M. Christian Poncelet. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'avoue ne pas comprendre la politique du Gouvernement dans le
domaine de l'emploi. (Marques d'approbation sur les travées du RPR. - Exclamations sur les travées socialistes.)
Je m'explique démocratiquement.
Vous supprimez les aides à l'emploi du secteur marchand, du secteur productif, au bénéfice de l'aide à l'emploi public, à
l'emploi qualifié de non solvable par les uns et par les autres.
Dans le projet de budget pour 1998, vous freinez très fortement l'allégement des charges sociales patronales sur les bas
salaires mis en oeuvre courageusement par le gouvernement Juppé dans tout le secteur productif. Vous abaissez le seuil
des salaires concernés de 1,33 fois à 1,30 fois le SMIC. L'aide au secteur marchand, celui qui apporte des richesses au
pays, est donc réduite de 6 milliards de francs. (Très bien ! sur les travées du RPR.).
Dans le secteur textile, la décision du Gouvernement est encore plus grave, puisque le seuil des salaires touchés par la
mesure passe de 1,50 fois - il s'agissait, bien sûr, de l'application du plan textile que vous connaissez bien, monsieur le
secrétaire d'Etat - à 1,30 fois le SMIC. La recette pour l'Etat s'élèvera de 2 milliards de francs.
Je tiens à préciser que les mesures Juppé ajoutées au plan textile ont permis - je parle sous le contrôle d'un membre du
Gouvernement, M. Christian Pierret - de sauver dans le textile des milliers et des milliers d'emplois. Lui-même, à une
certaine époque, l'a reconnu.
Permettez-moi de vous faire remarquer que vous retirez du secteur marchand une aide de 8 milliards de francs pour
financer, à hauteur de 8 milliards de francs dans le budget pour 1998, des emplois dits publics qui ne créent aucune valeur
ajoutée. Vraiment, non, je ne comprends pas.
Un sénateur du RPR. Très bien !
M. Christian Poncelet. De plus, dans le domaine textile, vous alourdissez les charges de ce secteur industriel en
supprimant le recours aux provisions pour fluctuation des cours. Dans le secteur textile, je vous l'affirme, monsieur le
secrétaire d'Etat, en le regrettant - ce n'est pas mon souhait, et cela ne doit pas être le vôtre non plus - de nouveaux
licenciements vont être prononcés.
M. Adrien Gouteyron. C'est certain !
M. Christian Poncelet. Quelles mesures prévoyez-vous alors, monsieur le secrétaire d'Etat, pour faire face, dans le
secteur textile, à une évolution aussi pénalisante pour celui-ci ?
De grâce, n'invoquez pas par ailleurs la réduction négociée du temps de travail. Celle-ci ne saurait être la panacée, le
remède miracle à toutes les questions posées ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du ministère : Industrie publiée le 10/10/1997

Réponse apportée en séance publique le 09/10/1997

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, auprès du ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie. Monsieur le sénateur, il y a, de mon côté aussi, une incompréhension. Je vous la livre amicalement, vous le
savez.
Je ne comprends pas que les thuriféraires du marché, de la libre entreprise, de la liberté d'entreprendre... (Protestations
sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Patrick Courtois. C'est vous qui avez créé cela !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... soient systématiquement aussi acharnés à défendre l'intervention de l'Etat,
les subventions de l'Etat, les aides de l'Etat alors que, par ailleurs, ils n'ont de cesse, sans doute à juste titre, de défendre
l'entreprise et les perspectives de la libre entreprise !
Je ne comprends pas vraiment pourquoi, chaque fois qu'on évoque les difficultés d'un secteur économique, ce sont les
plus libéraux qui en rajoutent systématiquement, toujours plus, sur l'aide de l'Etat et les subventions publiques que, par
ailleurs, dans d'autres discours, ils fustigent ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Protestations sur les travées du RPR.)
J'en viens plus directement au textile.
Vous le savez, monsieur le sénateur, il est impossible de renouveler le plan textile provisoire qui a été mis en oeuvre par le
précédent gouvernement et dont l'application court, en prévision, jusqu'au 31 décembre 1997. Il s'agit d'une aide
sectorielle qui, chacun le sait, est prohibée par le traité de Rome...
M. Emmanuel Hamel. Libérez-vous du traité de Rome !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et par les différentes directives de l'Union européenne.
Je crois - et je le dis sans aucun esprit de polémique - que mon prédécesseur, M. Borotra, avait mal évalué le risque qu'il
faisait courir ainsi aux entreprises en engageant plusieurs centaines d'entre elles à recevoir des aides et des subventions
qui, nous le savions dès l'origine, étaient radicalement contraires aux règles européennes.
Aujourd'hui se pose donc un problème budgétaire lié au non-provisionnement de cette somme dans le budget de 1997
par nos prédécesseurs. Mais il faut penser aussi au remboursement éventuel des sommes perçues par les entreprises de
manière illégale au regard des lois de l'Union européenne.
M. Serge Vinçon. Et Air France !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je répète qu'il n'est sans doute pas envisageable, de manière sérieuse, et ce
pour une raison évidente, d'élargir le système à l'ensemble des secteurs économiques. Il en coûterait en effet 35 milliards
de francs. Chacun sait - et le gouvernement précédent qui ne l'a pas mis en oeuvre le savait bien - que cette mesure est
impossible à engager.
Il s'agit aujourd'hui de faire en sorte que les difficultés structurelles du textile puissent être résolues grâce au dynamisme du
secteur (Ah ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) certes encouragé par le Gouvernement et
par l'Etat...
M. Jean Chérioux. Comment ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... dans une heureuse harmonie d'actions.
C'est en effet un secteur important, qui occupe 330 000 employés, qui touche toutes les régions et qui a montré son
dynamisme en maintes occasions. Ce secteur bénéficie aujourd'hui, il faut le rappeler, de l'évolution favorable de la lire, de
la peseta et du dollar, et il devrait profiter de la reprise de la demande qui va nécessairement suivre les mesures qui ont été
ou vont être adoptées par le Gouvernement.
Eh ! oui, monsieur le sénateur, à ce propos on peut évoquer la baisse du temps de travail ou, plus exactement,
l'organisation différente du travail au cours de l'année, laquelle permettra certainement à ce secteur de retrouver une
deuxième jeunesse grâce à une plus grande souplesse sans tomber dans une flexibilité que je condamnerais. (Murmures
sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il s'agit de faire en sorte que le secteur trouve lui-même en son sein les ressources de son développement.
Toutefois, monsieur Poncelet, avec l'autorisation de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, je peux
vous indiquer que le Gouvernement va engager dans les prochaines semaines, en liaison avec les professions concernées,
l'examen d'un dispositif d'appui à l'emploi dans les industries de main-d'oeuvre, dispositif qui doit être conforme aux
engagements européens et internationaux de la France, et qui devrait être régionalisé pour répondre aux problèmes
spécifiques de certains bassins d'emplois. Je pense ainsi vous donner pleinement satisfaction. (Applaudissements sur les
travées socialistes.)

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