Question de M. OSTERMANN Joseph (Bas-Rhin - RPR) publiée le 11/09/1997

M. Joseph Ostermann attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur la loi no 91-32 du 10 janvier 1991, dite " loi Evin ". Lors de la Conférence nationale de santé, ce dernier s'est déclaré favorable, concernant le volet " alcool ", à un durcissement de la loi Evin, " y compris dans les lieux publics ". Ces déclarations suscitent de vives inquiétudes, notamment parmi les viticulteurs français déjà sévèrement pénalisés par cette loi. En effet, celle-ci nuit considérablement aux vins de qualité, symboles de notre culture, de tradition et d'art de vivre, les considérations de qualité pesant moins qu'avant sur les décisions des consommateurs. Les marques ayant été privées de la possibilité de faire valoir leurs différences au travers de la communication en général et de la publicité en particulier, le prix est devenu le premier critère de choix. La loi Evin porte donc manifestement atteinte au principe fondamental de libre concurrence. En outre, selon plusieurs études, il est permis de douter des effets de cette législation sur le nombre de cirrhoses du foie ainsi que sur la consommation d'alcool. C'est pourquoi il se demande si une politique de lutte contre l'alcoolisme véritablement efficace ne passe pas plutôt par la prévention, l'éducation, l'information et la responsabilisation. Il estime donc que, plutôt que de durcir une loi à la fois inefficace en terme de santé publique et préjudiciable sur le plan économique, il conviendrait d'assouplir notre législation et de mener, parallèlement, une politique plus complète de lutte contre l'alcoolisme. Il souhaiterait connaître la position du Gouvernement à ce sujet ainsi que les axes de la politique qu'il envisage de mener.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 12/11/1998

Réponse. - La loi nº 91-32 du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme a édicté des mesures de lutte contre les comportements manifestement nocifs liés à la consommation d'alcool et de tabac. Afin d'estimer l'impact des dispositions de la loi sur les comportements ainsi que sur les secteurs d'activités concernés, une commission a été mise en place le 24 mars 1997, sous l'égide du Commissariat général du plan. L'instance a rédigé un cahier des charges des travaux à commander à des équipes de chercheurs. Les résultats des études et enquêtes devraient être disponibles en juin 1998. Parallèlement, il a été procédé à des auditions d'experts et chercheurs travaillant dans le domaine de la santé publique sur les problèmes liés à la consommation d'alcool et de tabac. L'instance poursuit ses auditions, au nombre desquelles figurent, notamment, celles des associations et professions concernées par la loi en cause. Les représentants des viticulteurs pourront ainsi exprimer leur point de vue. Il convient de rappeler que la loi du 10 janvier 1991 a réservé une égalité de traitement à tous les types d'alcools, français et étrangers, sans distinction en fonction du degré d'alcool. Une égale vigilance doit être apportée à toutes les boissons alcooliques. La consommation nocive d'alcool est une des principales causes de morbidité et de mortalité évitable. De nombreuses causes de décès pourraient voir leur fréquence sensiblement diminuée si les habitudes de consommation d'alcool étaient modifiées. Si l'on ne considère que les pathologies liées à une consommation chronique d'alcool, on constate en 1994, que 8 050 hommes et 3 150 femmes sont morts de psychose alcoolique, de cirrhose ou lésions alcooliques du foie, que plus de 10 700 hommes et 1 500 femmes sont décédés d'un cancer des voies aérodigestives supérieures (lié le plus souvent à l'association d'alcool et de tabac), soit un total de 23 400 décès liés à un alcoolisme chronique. S'y ajoutent les décès survenus dans le cadre d'accidents de la circulation liés à la conduite en état d'ébriété, estimés à 3 000 par an. On considère que 5 millions de personnes ont un usage nocif de l'alcool et que 2 millions d'entre elles sont dépendantes de l'alcool. Les personnes ayant une consommation à risque d'alcool représentent plus de 25 % des patients vus en médecine générale et des malades hospitalisés pour des causes diverses, sans que cette consommation nocive ne soit repérée systématiquement. C'est pourquoi la lutte contre l'alcoolisme constitue une préoccupation majeure. Une politique globale et continue est menée, organisée autour de plusieurs axes. Le volet préventif, fondé sur l'information et la communication, comprend notamment des campagnes de communication nationales mises en uvre par le Comité français d'éducation pour la santé et la CNAM. Des actions de prévention sont également réalisées localement par les comités départementaux de prévention de l'alcoolisme (CDPA), les centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie (CHAA), les associations d'anciens buveurs, les comités départementaux d'éducation pour la santé (CDES). Le volet sanitaire s'appuie principalement sur un dispositif spécialisé financé par l'Etat, composé de 206 structures juridiques assurant une prise en charge spécialisée somatique et psychosociale, et complété par 32 centres de post-cure financés sur les crédits de l'assurance maladie. Parallèlement, pour améliorer la prise en charge hospitalière des personnes en difficulté avec l'alcool, ont été créées des équipes hospitalières d'alcoologie de liaison. En outre, afin de favoriser l'efficacité de la prise en charge de ces patients, des crédits destinés à financer des actions de promotion et de formation au travail en réseau ont été attribués aux régions ayant retenu l'alcool comme déterminant prioritaire de santé dans le cadre des conférences régionales de santé.

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