Question de M. BRAYE Dominique (Yvelines - RPR) publiée le 24/09/1997

M. Dominique Braye appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation de l'emploi industriel dans le Mantois, suite à l'annonce d'un plan de restructuration à l'usine Sulzer de Mantes-La Ville (78) qui conduirait à la suppression de 238 postes, soit 130 à 140 licenciements secs. L'entreprise Sulzer qui produit des moteurs destinés à la construction navale et aux centrales électriques subit aujourd'hui la loi de la modernisation de ce marché, et le nouvel actionnaire principal - un groupe finlandais - a décidé une restructuration interne de la production. Cette restructuration intervient dans un contexte local bien particulier. Ces dernières années, le tissu industriel s'y est gravement détérioré : 800 emplois détruits (Porcher, Driver Harris, Seratherm...) contre seulement une centaine de nouveaux emplois créés. Cette situation désastreuse obère lourdement les résultats attendus de la mise en place du grand projet urbain dont l'agglomération mantaise est bénéficiaire. Aujourd'hui, les efforts acharnés des élus locaux pour créer de nouveaux emplois et les conditions d'un redémarrage économique du Mantois paraissent ainsi largement compromis. Face à cette situation dramatique, il est bien évident que ces mêmes élus locaux se mobilisent et mettent à la disposition du personnel licencié l'ensemble des structures ad hoc qu'ils ont mises en place : mission pour l'insertion socioprofessionnelle du Mantois (MISPROM) et comité d'expansion économique du Mantois. Pourtant, il est absolument nécessaire que des mesures exceptionnelles soient prises par le Gouvernement, en particulier grâce à un effort significatif d'aménagement du territoire. En conséquence, il lui demande donc quelles mesures il compte prendre pour rendre rapidement le Mantois éligible à la prime d'aménagement du Territoire (PAT), afin de contrebalancer de cette manière décisive cet effondrement de l'emploi industriel dans l'agglomération, et ainsi redonner espoir à des acteurs locaux rudement éprouvés par l'ampleur des problèmes socioéconomiques du Mantois.

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Transmise au ministère : Industrie


Réponse du ministère : Industrie publiée le 05/11/1997

Réponse apportée en séance publique le 04/11/1997

M. Dominique Braye. Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais attirer votre attention sur la situation de l'industrie
Sulzer, à Mantes-la-Ville, qui produit des moteurs destinés à la construction navale et aux centrales électriques et qui subit
aujourd'hui les conséquences les plus négatives de la réorganisation mondiale de l'économie.
L'un de ses principaux concurrents, le groupe finlandais Wartsila, est devenu, en 1996, son principal actionnaire pour
mieux la faire disparaître deux ans après, en prétextant une restructuration interne de la production.
Cette restructuration intervient dans un contexte local bien particulier, celui de la Seine-aval ; ces dernières années, le tissu
industriel s'y est gravement détérioré : 800 emplois ont été détruits en deux ans contre seulement une centaine de
nouveaux emplois créés.
Cette situation est d'autant plus désastreuse qu'elle intervient dans un bassin d'emplois reconnu par tous les acteurs
politiques, économiques et sociaux comme particulièrement défavorisé, à tel point qu'il fait l'objet de mesures
exceptionnelles que je me dois d'énumérer et pour lesquelles tous les partenaires publics s'investissent lourdement : zone
franche urbaine et grand projet urbain pour l'Etat, contrat d'aménagement régional et contrat de développement urbain
pour la région, politique d'aide spécifique exceptionnelle pour la Seine-aval pour le département, fonds structurel de
l'Union européenne, sans compter, naturellement, les efforts acharnés et les initiatives ambitieuses des élus locaux.
Or, aujourd'hui, ce sont précisément dans les deux agglomérations des Yvelines concernées par ces mesures que, par le
biais de restructurations, l'emploi va être touché de plein fouet : à Mantes-la-Ville, l'entreprise Sulzer et ses sous-traitants
vont perdre 229 emplois directs et près de 750 emplois indirects ; aux Mureaux, Aérospatiale et ses sous-traitants vont
supprimer 300 emplois directs et environ 900 emplois indirects. Sur ce dernier point, je dois d'ailleurs préciser que c'est la
diminution des crédits d'équipement du budget du ministère de la défense, amputés de près de 8 milliards de francs en
1998, qui sera responsable de la disparition de ces emplois.
Tous ces fonds de l'Etat, de la région, du département, des collectivités locales et de l'Europe, qui se chiffrent, je le
rappelle, en centaines de millions de francs, sont investis pour créer de nouveaux emplois et mettre en place les conditions
d'un redémarrage économique. Ces efforts semblent aujourd'hui largement compromis par ces mauvais coups portés à
l'emploi industriel et, si rien n'est fait pour empêcher ces licenciements, ils apparaîtront à l'opinion publique et aux élus
comme un gigantesque gâchis.
Dans le cas de l'entreprise Sulzer, il semble en effet inacceptable que, d'un côté, l'Etat investisse pour créer de l'activité
économique et de l'emploi et que, de l'autre côté, il finance des licenciements de « confort » d'une entreprise étrangère.
Face à cette situation dramatique, les élus locaux, c'est bien évident, se mobilisent et s'apprêtent à mettre à la disposition
du personnel l'ensemble des structures ad hoc qu'ils ont mises en place. Mais celles-ci ne sont naturellement pas à
l'échelle de la catastrophe annoncée ; il est donc absolument indispensable que des mesures exceptionnelles soient prises
par le Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis sûr que vous êtes particulièrement sensible au sort que connaîtra le siteSulzer de
Mantes-la-Ville, puisque votre père, si mes renseignements sont exacts, fut, voilà quelques dizaines années, le premier
directeur de cet établissement.
En conséquence, je vous demande quelles mesures vous comptez prendre, d'une part, pour empêcher ces licenciements
d'avoir lieu et, d'autre part, pour rendre rapidement le Mantois éligible à la prime d'aménagement du territoire, la PAT, ce
qui semble être le seul moyen de contrebalancer de manière décisive cet effondrement de l'emploi industriel dans
l'agglomération.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, l'annonce récente de la restructuration
industrielle de l'usine New Sulzer Diesel, à Mantes, dont l'effectif pourrait, en effet, passer de 440 personnes à 210
personnes dans le courant de l'année 1998, constitue, comme vous venez de le souligner, une nouvelle grave.
Ce projet s'inscrit, un an seulement après le rachat du site, dans une opération de rationalisation de l'outil de production
engagée par le groupe Wartsila.
Dès l'annonce de cette restructuration, mon cabinet et, à ma demande expresse, le directeur général des stratégies
industrielles du secrétariat d'Etat à l'industrie ont pris des contacts avec Mme Peulvast-Bergeal, député-maire de
Mantes-la-Ville, avec les représentants du groupe ainsi qu'avec les représentants des salariés et des organisations
syndicales pour procéder à une expertise approfondie de la situation et pour étudier les possibilités, d'ailleurs ténues, de
solutions alternatives. La situation générale du marché des moteurs Diesel semi-rapides, spécialité de pointe de l'usine de
Mantes, est aujourd'hui difficile et n'a pas permis d'identifier, pour l'instant, de solution de reprise.
Cette restructuration, si elle se confirme, fragilisera encore plus, comme vous l'avez dit avec justesse, un tissu industriel
déjà touché par la perte d'emplois sur d'autres sites proches au cours des dernières années. Des efforts de
réindustrialisation seront menés sur le site, mais il faut réfléchir plus avant au véritable problème d'aménagement du
territoire, qui concerne l'ensemble de la région parisienne, plus particulièrement le Mantois.
La répartition des zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire pour les projets industriels, telle qu'elle a été
finalisée tant dans le décret du 6 mai 1982 que dans celui du 6 février 1995, résulte de priorités définies par la
Commission de l'Union européenne dans le cadre que celle-ci a fixé en application de ses compétences en matière de
contrôle des règles de concurrence. C'est ainsi qu'elle a posé en préalable aux dernières propositions du gouvernement
français la réduction de la population éligible à la PAT et le rapprochement du nouveau zonage avec ceux des fonds
structurels, objectifs 1, 2 et 5B.
Dans ce contexte, le département des Yvelines, qui fait partie du bassin parisien et qui bénéficie à ce titre des effets de
l'attractivité économique de l'Ile-de-France, n'a pu être concerné par ce dispositif, lequel privilégie à juste titre,
reconnaissons-le, les régions en retard de développement ou se trouvant confrontées à des difficultés structurelles
importantes qui justifient un traitement dérogatoire par rapport aux principes du traité de Rome.
Du reste, le bassin parisien dans son ensemble a été exclu de toute forme d'aide dès l'élaboration du décret du 6 mai
1982, au même titre que l'agglomération lyonnaise. Ce dispositif, dur, il est vrai, a été reconduit par le décret du 6 février
1995, à partir de critères d'appréciation des zones éligibles définis de manière encore plus restrictive, qui n'ont pas justifié
de modification par rapport à la situation du bassin parisien.
Toutefois, le Gouvernement est conscient qu'en dépit de la richesse globale de l'ensemble de la région d'Ile-de-France il
existe des problèmes spécifiques dans plusieurs points gravement touchés de l'agglomération parisienne, qui connaissent
des situations tant économiques que sociales difficiles. C'est le cas du Mantois.
Cette zone urbaine fragile, qui a été reconnue comme pôle de développement dans le cadre du schéma directeur de
l'Ile-de-France, doit être traitée avec une grande vigilance. Sa situation fera l'objet, monsieur le sénateur, soyez-en assuré,
d'un examen particulièrement attentif à l'occasion de la réflexion sur la révision de l'ensemble des zonages actuellement en
discussion avec l'Union européenne. Cela sera fait au cours des mois prochains, dans la perspective de la réforme des
fonds structurels à laquelle la France apportera sa contribution.
Je serai personnellement très vigilant sur la situation de l'usine Sulzer de Mantes et si, comme je l'espère, nous avons
l'occasion de la réexaminer, nous le ferons avec l'ensemble des élus concernés.
M. Dominique Braye. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de ces éléments de réponse.
Ces phénomènes de restructuration apparaissent effectivement sur un territoire déjà particulièrement sinistré. Nous avons
connu la disparition de l'usine Porcher de Gargenville, avec la perte de trois cents emplois, celle de Driver Harris, à
Mantes-la-Jolie, qui s'est traduite par la perte de quatre-vingt-dix emplois, celle de la Seratherm, avec également une
perte de soixante-dix emplois, et c'est maintenant l'usine Sulzer.
Plusieurs paramètres sont à prendre en compte. Le département des Yvelines est éminemment dual, avec, d'un côté, une
certaine opulence, une certaine richesse et, de l'autre, à l'extrême ouest, dans la vallée de la Seine, toute la pauvreté
concentrée ainsi que les problèmes économiques et sociaux.
On en vient même parfois à se demander si le fait d'être compris dans la région d'Ile-de-France ne constitue pas un lourd
handicap pour ceux qui sont à l'extrême ouest, dans la mesure où l'aide qui leur fait cruellement défaut est attribuée à des
départements voisins qui, pourtant, ne connaissent pas les mêmes problèmes sociaux et économiques qu'eux.
Quoi qu'il en soit, je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir me tenir informé personnellement de ce
qui se fera pour le Mantois, notamment sur le site de l'usine Sulzer.

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