Question de M. VIDAL Marcel (Hérault - SOC) publiée le 24/07/1997

M. Marcel Vidal attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur certains effets négatifs de la politique de gestion des forêts françaises. En effet, des études récentes soulignent qu'en France métropolitaine les surfaces boisées ne cessent de gagner du terrain. Elles ont ainsi conquis quatre millions d'hectares supplémentaires en cinquante ans. Poutant, derrière le succès quantitatif de cette reconquête, se profile la disparition progressive d'un type de forêt dite linéaire. On appelle ainsi, par opposition à la forêt dense traditionnelle, l'ensemble des arbres épars qui constituent les haies, les bosquets, les vergers, les alignements de bords de rivière ou de route. Au total, depuis le début du sièce, près de 3 millions d'hectares de forêt linéaire ont été sacrifiés. Aujourd'hui, il ne resterait que 1,6 millions d'hectare de même nature. Une telle disparition des arbres constitue une perte inestimable pour le patrimoine paysager, mais aussi pour le rôle qu'ils jouent dans l'équilibre écologique. La gestion de l'Office national de la forêt (ONF) soulève, par ailleurs, de plus en plus d'interrogations. Si personne ne conteste que la forêt doit être entretenue, l'approche de cet établissement passe essentiellement par un enrésinement de la surface boisée. La nature de la forêt se modifie donc peu à peu. Mais, surtout, les résineux accroissent l'acidité des sols. Ils réduisent la diversité biologique des sous-bois et fragilisent l'ensemble de la forêt par leur sensibilité plus marquée que les feuillus traditionnels aux maladies et aux pollutions. La part des résineux s'accroît d'autant plus vite que la croissance de ces arbres est plus rapide, favorisant un profit commercial quasi immédiat. Il demande donc quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour que la France conserve la variété de ses espèces d'arbres et que la forêt ne soit pas considérée comme une simple source de profit commercial, mais un investissement au sens durable du terme pour nos générations futures. Il souhaiterait connaître sa potion sur cette perspective.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 02/10/1997

Réponse. - Comme le souligne l'honorable parlementaire, la période récente a été marquée par une progression globale des superficies forestières, parallèlement à une forte diminution des espaces boisés non forestiers. Cette tendance générale doit toutefois être nuancée pour rendre compte de la diversité des situations locales : ainsi, dans la plupart des départements littoraux, comme l'Ile-de-France, la forêt régresse ou est menacée par l'urbanisation, et dans certaines régions (Champagne, Nord - Pas-de-Calais par exemple) cette réduction atteint un niveau alarmant. En ce qui concerne les boisements non forestiers, le rôle des surfaces occupées par les bosquets, haies et arbres isolés est aujourd'hui reconnu par les aménageurs, que ce soit pour leur valeur paysagère ou pour leurs fonctions écologiques en matière de régulation et d'épuration des eaux ou de maintien de la biodiversité. Leur diminution est liée d'une part à leur arrachage volontaire (travaux annexes des opérations d'aménagement foncier, urbanisation, servitudes de passages de lignes électriques et téléphoniques), mais aussi à leur disparition spontanée (maladie de l'orme, retour à la friche). Des dispositifs juridiques et financiers ont été mis en place ces dernières années pour tenter de freiner la disparition de ces boisements, en assurant leur protection dans le cadre des procédures d'aménagement foncier, des baux à ferme et des plans d'occupation des sols et en permettant le financement de plantations de haies ou d'actions d'entretien de haies en milieu rural. Les mesures nécessaires sont complexes et convergent avec les actions destinées à encourager les pratiques respectueuses de l'environnement, ces formations boisées ayant été créées par l'homme et ne subsistant que grâce à un entretien constant, difficilement compatible avec les modes de gestion intensive et les exigences de rentabilité imposées aujourd'hui aux exploitations agricoles. En ce qui concerne l'action de l'Office national des forêts, il convient de rappeler que cet établissement gère le patrimoine forestier de l'Etat et des collectivités territoriales, soit environ 30 % des 15 millions d'hectares de forêts constituées. Sur cet ensemble, les peuplements de feuillus représentent 62 %, les résineux 38 %. Le choix des essences utilisées est effectué en fonction des caractéristiques des stations forestières, les résineux se révélant adaptés aux stations plus difficiles, et notamment aux sols naturellement très acides. Leur installation et leur sylviculture sont mises en oeuvre dans un souci d'intégration paysagère. D'une façon générale, le type d'aménagement encouragé depuis la loi forestière de 1985 privilégie la futaie régulière de qualité plus favorable à la diversité des essences. En outre des choix d'aménagement particuliers peuvent être exercés compte tenu de la demande sociale et de l'intérêt de protéger un écosystème spécifique. A noter que, pour les forêts des collectivités, les aides accordées sur le Fonds forestier national permettent aussi bien le financement de reboisements en essences feuillues qu'en résineux, peupliers ou noyers.

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