Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 10/07/1997

M. Nicolas About attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le coût des opérations militaires extérieures de la France. L'an passé, ces opérations auront coûté plus de cinq millions de francs contre un peu plus de quatre millions en 1995, soit une augmentation de 23 % en un an. Les deux tiers de ces sommes sont celles qu'implique notre présence dans l'ex-Yougoslavie, soit plus de trois millions de francs. Ce constat nous amène à nous interroger sur la pertinence de notre diplomatie dite préventive qui en fait est une diplomatie curative puisqu'elle intervient toujours après la crise ou le conflit. Le dernier exemple en date est celui de l'Albanie dont l'explosion sociale était prévisible, pourtant la France et l'Union européenne (UE) n'ont rien fait pour prévenir cette crise. Le pays ayant été mis à feu et à sang, l'UE décide d'envoyer une force multinationale chargée de " maintenir la paix civile ". Ce qui s'apparente à de la diplomatie préventive n'en n'est pas une car les Occidentaux se contentent de jouer les pompiers, les humanitaires. Pourquoi ne pas introduire le concept de prévention des crises et des conflits dans notre action diplomatique et plus largement dans la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), cette novation participerait à la nécessaire rénovation de notre diplomatie depuis la fin de la guerre froide et répondrait réellement à l'impératif de sécurité et de stabilité en Europe. Au lieu de dépenser des millions pour maintenir un cessez-le-feu, précaire et qui entérine souvent un partage territorial injuste, les Européens devraient les dépenser pour prévenir ces conflits, en investissant dans l'économie de ces pays pauvres, dans la formation des militaires et des dirigeants pour qu'il soit mis fin à leurs modes de pensée belliqueux et enfin en oeuvrant pour le désarmement des régions sous tension. Voilà la véritable prévention des conflits, celle qui a le souci des êtres humains et non pas celle qui se contente d'agir après pour justifier l'entretien de troupes professionnelles, dites " forces projetables ", au service de pseudo " opérations de maintien de la paix ". Il lui demande donc si le Gouvernement entend modifier sa perception de la prévention des conflits en Europe et dans le reste du monde, au regard de la réflexion apportée ci-dessus.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 21/08/1997

Réponse. - La France, membre permanent du Conseil de sécurité, ne peut se désintéresser de la paix et de la sécurité internationale. Il en va de son rang autant que de son image de patrie des droits de l'homme. Elle participe activement aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, dont le financement est en principe assuré par le budget dévolu à ces opérations par l'ONU, avec près de 500 casques bleus au 31 mars. Aux côtés de ses alliés, la France prend également part à de nombreuses opérations. Elle a achevé, le 3 août, une mission en Albanie dans le cadre de la force multinationale de protection où elle avait engagé près de 1 000 hommes. En ex-Yougoslavie, 2 500 soldats français sont présents dans la force de consolidation. Au total, ainsi que le souligne l'honorable parlementaire, la rémunération des personnels et la maintenance des matériels engagés dans de telles opérations a un coût estimé à 5,1 milliards de francs en 1996. Avec le règlement de la crise de l'ex-Yougoslavie, cette charge est néanmoins appelée à diminue r. La diplomatie préventive, plus économe des ressources et, surtout, plus efficace, même si ses succès sont difficilement mesurables, doit évidemment se développer. La France s'y emploie. En Europe, elle a lancé, en mai 1994, l'idée d'un Pacte de stabilité. Visant à garantie le droit des minorités et le respect des frontières, ce pacte combine des traités bilatéraux et des exercices de concertation autour de tables rondes régionales. Cette initiative a incontestablement contribué à rapprocher les points de vue en Europe centrale et orientale. Dans le cadre des Nations unies, la France soutient la création d'un système d'alerte précoce susceptible de déceler les conflits potentiels avant qu'ils n'éclatent. Elle travaille, en particulier, avec ses partenaires américain, britannique et africains, à la mise au point d'une initiative pour le maintien de la paix en Afrique, visant à renforcer les capacités des Etats africains à participer au règlement des crises sur le continent. Plus généralement, elle prend part à de nombreuses opérations de diplomatie préventive menées dans un cadre régional, notamment la surveillance d'élections avec l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. Après le conflit, la France s'implique dans le processus de reconstruction économique et sociale afin d'accélérer la réconciliation des parties. Des experts français sont fréquemment dépêchés au sortir des conflits. L'Union européenne entreprend également de coordonner les initiatives des Etats membres en matière d'aide à la reconstruction. En Bosnie, elle a pris en charge l'administration de la ville de Mostar et elle a organisé le déploiement d'une mission de médiation et de vérification. La France défend désormais une conception " intégrée " du maintien de la paix, depuis la diplomatie préventive jusq'à l'aide à la reconstruction.

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