Question de M. CHARMANT Marcel (Nièvre - SOC) publiée le 26/02/1997

M. Marcel Charmant rappelle à M. le ministre de l'économie et des finances que M. le Premier ministre a engagé dès 1995, une réflexion avec le mouvement associatif dans le cadre du Conseil national de la vie associative. Des propositions concrètes sont nées de cette concertation et ont donné lieu à des applications qui ont recueilli la totale approbation du monde associatif. D'autres mesures sont actuellement en discussion qui font craindre une remise en cause des conditions d'exercice et de développement de la vie associative telles qu'elles découlent de la loi de 1901. Le mouvement associatif est inquiet. Si le président de la République lors de la cérémonie de présentation des voeux aux associations a rappelé tout l'intérêt qu'il portait à la vie associative et combien il comptait sur les associations pour réduire la fracture sociale, les mesures de restriction budgétaire inscrites dans la loi de finances 1997 atteignent directement les associations. Les crédits des principaux ministères qui oeuvrent en partenariat avec le mouvement associatif sont largement amputés et les répercussions sont lourdes sur les moyens de fonctionnement des associations. La participation au financement des contrats emploi solidarité est portée de 5 à 15 % et l'Etat transfère, aux associations qui les accueillent, les charges afférentes aux objecteurs de conscience. Autant de mesures qui limitent la capacité d'action des associations. Mais le plus inquiétant est le projet d'instruction fiscale préparé par le ministère des finances qui envisage, sous le prétexte de la clarification, de modifier les dispositions fiscales applicables à la vie associative et notamment d'assujettir les associations locales à la TVA. Ce projet interpelle la représentation nationale à double titre : d'une part, cette réforme unilatérale de la fiscalité des associations aurait des répercussions énormes sur la vie associative et tout particulièrement sur celle de toutes les petites associations locales qui animent et dynamisent nos communes grâce aux bénévoles qui mettent au service de l'intérêt général leur temps, leur compétence et leur immense bonne volonté ; celles qui ne disposent d'autres ressources que celles qui proviennent de leurs adhérents et des manifestations qu'elles organisent pour financer leurs activités. Ce sont les plus nombreuses et leur utilité sociale n'est plus à démontrer. D'autre part, si le processus qui est engagé est mené à terme, le gouvernement décidera de modifier le régime fiscal applicable aux associations sans que le Parlement ait eu à se prononcer sur l'opportunité d'une telle réforme. Le 16 juillet 1971, le Conseil constitutionnel rappelait que " la liberté d'association constitue l'un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République " et confirmait que seul le législateur était en mesure de préciser, si nécessaire, le contenu de cette liberté publique. En conséquence, il lui demande de renoncer à la mise en oeuvre de ce projet d'instruction fiscale et de saisir le Parlement de tout projet visant à modifier la fiscalité applicable aux associations.

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Réponse du ministère : Recherche publiée le 12/03/1997

Réponse apportée en séance publique le 11/03/1997

M. Marcel Charmant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, M. le Premier ministre
a engagé, dès 1995, une réflexion avec le mouvement associatif dans le cadre du Conseil national de la vie associative.
Des propositions concrètes sont nées de cette concertation et ont donné lieu à des applications qui ont recueilli la totale
approbation du monde associatif.
D'autres mesures sont actuellement en discussion qui font craindre une remise en cause des conditions d'exercice et de
développement de la vie associative telles qu'elles découlent de la loi de 1901.
Le mouvement associatif est inquiet. Si le Président de la République lors de la cérémonie de présentation des voeux aux
associations a rappelé tout l'intérêt qu'il portait à la vie associative et combien il comptait sur les associations pour réduire
la fracture sociale, les mesures de restriction budgétaire inscrites dans la loi de finances pour 1997 atteignent directement
les associations. Les crédits des principaux ministères qui oeuvrent en partenariat avec le mouvement associatif sont
largement amputés et les répercussions sont lourdes sur les moyens de fonctionnement des associations. La participation
au financement des contrats emploi-solidarité est portée de 5 % à 15 % et l'Etat transfère, aux associations qui les
accueillent, les charges afférentes aux objecteurs de conscience. Ce sont autant de mesures qui limitent la capacité
d'action des associations
Le plus inquiétant est le projet d'instruction fiscale préparé par le ministère des finances qui envisage, sous le prétexte de
la clarification, de modifier les dispositions fiscales applicables à la vie associative, notamment d'assujettir les associations
locales à la TVA.
Ce projet interpelle la représentation nationale à double titre.
D'abord, cette réforme unilatérale de la fiscalité des associations aurait des répercussions énormes sur la vie associative et
tout particulièrement sur celle de toutes les petites associations locales qui animent et dynamisent nos communes grâce aux
bénévoles qui mettent au service de l'intérêt général leur temps, leur compétence et leur immense bonne volonté,
associations qui ne disposent d'autres ressources que celles qui proviennent de leurs adhérents et des manifestations
qu'elles organisent pour financer leurs activités. Ce sont les plus nombreuses et leur utilité sociale n'est plus à démontrer.
Ensuite, si le processus qui est engagé est mené à terme, le Gouvernement décidera de modifier le régime fiscal applicable
aux associations sans que le Parlement ait eu à se prononcer sur l'opportunité d'une telle réforme.
Or, le 16 juillet 1971, le Conseil constitutionnel rappelait que « la liberté d'association constitue l'un des principes
fondamentaux reconnus par les lois de la République » et confirmait que seul le législateur était en mesure de préciser, si
nécessaire, le contenu de cette liberté publique.
En conséquence, je demande à M. le ministre de l'économie et des finances de renoncer à la mise en oeuvre de ce projet
d'instruction fiscale et de saisir le Parlement de tout projet visant à modifier la fiscalité applicable aux associations.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François d'Aubert, secrétaire d'Etat à la recherche. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du ministre
de l'économie et des finances sur les inquiétudes du secteur associatif au regard des conditions d'exercice et de
développement de la vie associative.
En ce qui concerne tout d'abord la capacité d'action des associations, je dois vous préciser que les mesures de restriction
budgétaire qui on été prises s'inscrivent dans le cadre d'une politique globale de solidarité et de maîtrise des dépenses.
Ces mesures ont pu conduire, il est vrai, à réduire la part des subventions publiques perçues par les associations.
Cependant, les mesures prises par le Parlement dans le cadre de la loi du 24 juin 1996 portant diverses mesures en faveur
des associations ont permis à la fois de favoriser leur financement par la générosité publique et de réduire leurs charges.
En effet, cette loi favorise le développement des ressources versées aux associations par les particuliers en portant à 50 %
du don le montant de la réduction d'impôt sur le revenu, à 1,75 % et à 6 % du revenu imposable les plafonds de prise en
compte de ces dons. Elle favorise également le financement par les entreprises, dans la mesure où celles-ci peuvent
désormais déduire de leur résultat les versements effectués en période déficitaire et où les limites de déductibilité des dons
ont été portées à 2,25 et à 3,25 du chiffre d'affaires.
Par ailleurs, ces organismes bénéficient d'un abattement sur la taxe sur les salaires dont ils sont redevables. Cet
abattement a été porté à 28 000 francs dès 1996. Il est indexé et sera donc relevé dans la même proportion que la limite
supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu pour les années suivantes.
Je vous précise, en outre, que le projet d'instruction fiscale dont vous faites état a pour objet de clarifier les règles
applicables à la détermination du régime fiscal des associations. S'appuyant sur la jurisprudence claire du Conseil d'Etat, il
précise, à droit constant, les critères qui permettent de s'assurer du caractère non lucratif de l'activité d'une association et
ne modifie en rien la loi fiscale, sur laquelle le Parlement s'est déjà prononcé.
En effet, le régime fiscal favorable des associations est réservé aux activités qui sont étrangères à celles que réalisent
habituellement les entreprises industrielles et commerciales.
Ainsi, lorsqu'une association réalise une activité lucrative, elle est assujettie à l'ensemble des impôts commerciaux, à savoir
l'impôt sur les sociétés, la taxe sur la valeur ajoutée et la taxe professionnelle, puisque la notion pertinente pour
l'assujettissement à ces trois impôts se trouve être le caractère lucratif de l'activité exercée.
Tel est le cas lorsqu'une association réalise des actes de même nature que ceux qui sont, ou pourraient être, effectués par
des professionnels, dans des conditions analogues au regard des prix pratiqués, du public accueilli et des modalités de
mise en oeuvre de l'activité telles que, par exemple, les conditions d'un éventuel recours à la publicité.
Lorsque les associations, c'est le cas de la majorité d'entre elles, poursuivent une activité désintéressée conforme à l'esprit
de la loi du 1er juillet 1901, elles n'acquittent aucun des impôts commerciaux au titre de leur activité et supportent
seulement un impôt sur les sociétés à taux réduit sur leurs seuls revenus à caractère patrimonial.
J'ajoute enfin que ce projet d'instruction fiscale a été élaboré dans le cadre des travaux des différents groupes de travail
relatifs à la vie associative composés de représentants de l'administration fiscale, des ministères de tutelle des associations
et des membres du Conseil national de la vie associative, mis en place par le Premier ministre. Ce projet a notamment
pour objet d'apporter aux associations la sécurité juridique qu'elles souhaitent à juste titre.
J'espère, monsieur le sénateur, vous avoir convaincu de la nécessité de cette instruction, laquelle a été largement débattue
entre les représentants du monde associatif et ceux de l'administration.
M. Marcel Charmant. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Charmant.
M. Marcel Charmant. Tout en remerciant M. le ministre de l'économie et des finances d'avoir reconnu que l'aide
publique aux associations avait diminué à partir du budget de 1997, je dirai, monsieur le secrétaire d'Etat, que les propos
que vous avez tenus concernant l'instruction fiscale et le régime de TVA applicable aux associations ne me rassurent pas.
Compte tenu des services que rendent les associations, il serait logique que, pour compléter la loi de 1901, le Parlement
soit saisi des projets de nature fiscale.

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