Question de M. CARRÈRE Jean-Louis (Landes - SOC) publiée le 07/02/1997

Question posée en séance publique le 06/02/1997

M. le président. La parole est à M. Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
J'aurais pu, bien sûr, monsieur le ministre, vous parler de la réduction du nombre de postes ouverts aux épreuves de
recrutement.
M. René-Pierre Signé. On en parlera plus tard !
M. Jean-Louis Carrère. J'aurais pu aussi vous parler de la violence à l'école et de l'absence, selon moi, de solutions
concrètes proposées.
Mais aujourd'hui, je vous parlerai d'une question qui préoccupe beaucoup les lycéens, les parents d'élèves, les
professeurs et les chefs d'établissement, et qui a été longuement abordée par l'Observatoire national de la sécurité des
établissements scolaires : je veux parler des machines dans les lycées d'enseignement professionnel et technique.
En ma qualité de rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles sur le budget de l'enseignement technique,
j'avais attiré votre attention et celle du Gouvernement à cet égard.
L'Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires, créé par décret en 1995, a procédé, lors de sa séance
inaugurale du 12 juillet, à la mise en place de groupes de travail. L'un d'entre eux a notamment la charge du suivi de
l'application des règles de sécurité dans les ateliers. Cette mission peut éventuellement être étendue à l'ensemble des
mesures de sécurité relatives aux bâtiments.
Le constat est alarmant : près de 60 % des quelque 30 000 machines-outils recensées dans 1 933 établissements ne
seraient pas conformes aux normes de sécurité définies par un décret du 11 janvier 1993 pris en vertu d'une directive
européenne du 30 novembre 1989, qui est entrée en application depuis le 1er janvier.
En outre, monsieur le ministre - M. le Premier ministre le sait également puisqu'il a été destinataire de ces conclusions -
près de 30 % de ces machines, essentiellement dans les secteurs de la mécanique et de la métallurgie, devraient être
supprimées. Ce constat est d'autant plus inquiétant que les machines, selon l'Observatoire national de la sécurité des
établissements scolaires, sont à l'origine de 20 % des accidents dont sont victimes les lycéens ; mais cette proportion est,
en fait, beaucoup plus importante puisqu'un quart seulement des élèves fréquentent les ateliers des établissements
techniques.
Alors, monsieur le ministre, qu'avez-vous fait et qu'allez-vous faire ? Contraindrez-vous les régions à réaliser les
investissements nécessaires, alors que, comme vous le savez, elles n'ont prévu que 900 millions de francs sur les 2 100
millions de francs nécessaires ?
Etes-vous le gouvernement de la République le mieux placé...
M. René-Pierre Signé. Non !
M. Jean-Louis Carrère. ... et ce au moment où vous différez l'application des contrats de plan, alors même que
certaines régions, comme la région Aquitaine, ont contracté avec l'Etat ?
Ensuite, monsieur le ministre, élaborerez-vous un plan d'urgence, comme vous le fîtes naguère afin de réaliser ces mises
aux normes ?
M. Josselin de Rohan. Et la question ?
M. Alain Vasselle. Y a-t-il une question ?
M. Jean-Louis Carrère. Quelles réponses allez-vous apporter, quels engagements allez-vous prendre à l'endroit des
élus, des parents, des enseignants, mais aussi des proviseurs qui, compte tenu de leur responsabilité pénale, s'impatientent
légitimement, et des enfants, qui, s'ils voient leurs cours supprimés, éprouveront encore, plus de difficultés d'insertion qu'ils
n'en éprouvent déjà quand il n'y a pas de problème ? (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jacques Mahéas. Avec la croissance, il ne devrait pas y avoir de problème !

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Réponse du ministère : Éducation publiée le 07/02/1997

Réponse apportée en séance publique le 06/02/1997

M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur
Carrère, je ferai une réponse beaucoup plus courte que la question que vous avez posée (Rires sur les travées de
l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants. - Exclamations sur les travées socialistes), question
dont je ne crois d'ailleurs pas que l'objet essentiel était d'interroger le Gouvernement !
M. Bernard Piras. Cela vous gêne !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. C'était
plutôt une diatribe, et je vais donc gommer tout aspect polémique dans ma réponse.
Permettez-moi tout d'abord de vous dire que vos amis ont exercé la responsabilité du pouvoir pendant la plus grande
partie de la période que vous avez évoquée. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées de l'Union centriste
et du RPR, ainsi que sur certaines travées des Républicains et Indépendants. - Protestations sur les travées
socialistes.)
M. Yann Gaillard. Tiens, tiens !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur
Carrère, ce n'est pas facile, c'est vrai, et cela s'impose de soi-même. (Brouhaha sur les travées socialistes.) Je vais en
donner la preuve :...
M. Bernard Piras. C'est un peu facile ! Regardez plutôt devant vous !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. ... la
directive européenne que vous avez évoquée date de 1989 !
M. Jean-Louis Carrère. Heureusement que vous écartez la polémique !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le texte
réglementaire qui a fixé une date limite a été signé par vos amis en 1993. Vous avez donc mis quatre ans pour faire entrer
dans un texte cette directive européenne ! Que je sache, vous ne vous êtes pas préoccupés à l'époque des financements
et des conséquences des textes que vous avez pris. (Protestations sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Mais si !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Alors,
monsieur le sénateur, c'est très simple !
Le Gouvernement pouvait-il en conscience changer autoritairement la date d'application du texte,...
M. Jean-Louis Carrère. Ce n'est pas ce que je vous ai demandé !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. ... et donc
lever les conditions de sécurité ?
Ma réponse est non.
M. Claude Estier. Ce n'est pas la question !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Sept
années se sont écoulées. Il était normal que le Gouvernement maintienne la date et, d'ailleurs, il n'avait pas, je crois, les
moyens juridiques de changer cette date prise en vertu d'une directive européenne.
Par ailleurs, qu'avons-nous fait ? Nous avons demandé aux proviseurs et aux recteurs, en concertation avec les présidents
de région, de vérifier quel était le degré d'urgence de la mise aux normes. En effet, dans ces dernières figurent non
seulement ce qui touche à la sécurité et qui ne peut être différé, mais aussi d'autres aspects qui intéressent le confort des
conditions de travail et qui peuvent être un peu étalés dans le temps.
C'est cette hiérarchie de la sécurité qui est en train d'être mise en place : partout, des accords et des conventions sont
passés entre les établissements, le rectorat et les régions pour que les travaux indispensables et urgents soient effectués.
C'est ainsi que, à court terme, nous allons pouvoir achever ce plan.
Je trouve heureux que les machines de l'éducation nationale, comme d'autre machines, soient soumises aux règles de
sécurité et que chacun fasse l'effort de compréhension nécessaire pour que ne soient pas confondues les dispositions
relevant de la sécurité et les mesures ressortissant à la mise aux normes, qui peuvent attendre sans doute un peu plus
longtemps. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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