Question de Mme LUC Hélène (Val-de-Marne - CRC) publiée le 05/02/1997

Mme Hélène Luc tient à attirer l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les conditions d'études et de fonctionnement qui ne cessent de se dégrader pour les instituts universitaires de technologie (IUT) du fait des insuffisances de dotation budgétaire se cumulant d'année en année. Au moment où la voie technologique est présentée comme étant prioritaire dans les études supérieures et alors que les IUT ont apporté la preuve de leur efficacité et de leur performance en la matière, on ne peut que s'étonner d'un tel traitement de la part des pouvoirs publics. C'est pourquoi elle lui demande de lui faire part de ses intentions quant à la demande exprimée par la communauté des étudiants et des enseignants et à laquelle elle souscrit totalement, d'un plan d'urgence et de rattrapage pour les IUT dès le premier trimestre 1997, qui constitue la condition indispensable pour rétablir la situation de ces établissements.

- page 597


Réponse du ministère : Éducation publiée le 26/03/1997

Réponse apportée en séance publique le 25/03/1997

Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, avec plus de 100 000 étudiants, des demandes d'inscription qui ne cessent de
croître - plus 4 % en 1996-1997, et les préinscriptions pour la rentrée prochaine sont déjà très nombreuses - les
quatre-vingt-quinze IUT que compte notre pays ont apporté la preuve de leur efficacité et de leur performance, de
l'adéquation qu'ils assurent entre les besoins économiques et les besoins des jeunes, de leur capacité à évoluer et à
innover en fonction des mutations technologiques.
De nombreux indicateurs en attestent : ainsi, le taux de chômage des anciens élèves titulaires d'un diplôme universitaire de
technologie est parmi les plus faibles de toutes les formations, et le temps de recherche du premier emploi est parmi les
plus courts. Une pédagogie originale dans laquelle les stages en entreprise, conçus comme de véritables séquences
interactives avec l'enseignement en IUT, aux antipodes des stages des contrats d'insertion professionnelle de triste
mémoire, constitue à l'évidence l'une des clés de la réussite des IUT.
Depuis plusieurs années, par des restrictions budgétaires successives et un véritable désengagement de l'Etat, la situation
des IUT s'est particulièrement dégradée, au point que beaucoup d'entre eux ne sont plus en mesure de délivrer tous les
enseignements conduisant à la délivrance d'un diplôme défini par les programmes pédagogiques nationaux.
Le renouvellement du matériel pédagogique, la maintenance et l'entretien des bâtiments sont remis en cause par ces
restrictions budgétaires drastiques. Cela est inacceptable.
Vous le savez, monsieur le ministre, à l'annonce des dotations pour 1997, en baisse très sensible par rapport à l'année
précédente, l'émotion et la colère furent grandes parmi les directeurs des IUT, les étudiants et dans toute la communauté
éducative. Comment ne pas les comprendre et partager, comme je le fais, leur indignation ?
Je prendrai l'exemple de l'IUT de Paris XII, dans le Val-de-Marne, que le membre du conseil d'administration que je suis
connait bien et pour lequel je vous ai écrit le 29 janvier dernier : il manque 4 millions de francs de moyens sur les 13
millions de francs nécessaires au regard des effectifs étudiants.
L'indignation - celle du président du conseil général Michel Germa, celle de nombreux élus du Val-de-Marne et la mienne
- est d'autant plus forte que le conseil général, bien que ce ne soit pas de sa compétence, a tenu à effectuer un effort
particulier en finançant la réalisation d'un nouveau département d'IUT à Vitry, qui a été crédité de 33,5 millions de francs.
Bien évidemment, la configuration de l'IUT de Paris XII, dont les enseignements sont répartis sur quatre sites, comme
c'est le cas de beaucoup d'autres IUT ayant des formations diversifiées, entraîne un besoin légitime de crédits
supplémentaires pour couvrir les frais fixes et de logistique d'autant plus importants.
Dimanche, je participais avec des dizaines de milliers d'enseignants, de jeunes et de parents, à un puissant mouvement
ayant pour exigence une formation de qualité conduisant à un emploi pour chaque jeune. Les IUT répondent pleinement à
cet objectif.
Avec ces dizaines de milliers de parents, d'enseignants et de jeunes, les sénateurs du groupe communiste républicain et
citoyen vous demandent d'établir un plan d'urgence et de rattrapage immédiat, afin de mettre en place les crédits dont ces
établissements ont un impérieux besoin pour l'année 1997 et d'annuler les fermetures de classes prévues.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame le
sénateur, je tiens tout d'abord à rappeler la dimension exceptionnelle de l'effort décidé pour l'ensemble du monde
universitaire en cette période de restrictions budgétaires : avec 6,8 % d'augmentation, c'est le budget de l'enseignement
supérieur qui a le plus progressé de tous les budgets.
Ce budget a donné lieu à la création de 7 000 postes sur deux ans, alors que le nombre des étudiants restait stable : d'une
part, 3 500 postes d'enseignants et d'enseignants-chercheurs et, d'autre part, pour la première fois, 3 500 postes de
personnels IATOS, les personnels ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers et de service. L'équilibre entre les
personnels IATOS et les enseignants et enseignants-chercheurs constitue une novation à mon avis bien reçue par la
communauté universitaire.
Souvenez-vous, madame le sénateur, que, lors de ma prise de fonctions, un certain nombre d'universités n'obtenaient pas
même 50 % de leur dotation théorique. Au bout d'un an, comme vous avez pu le constater, il n'y a plus d'université
disposant de moins de 90 % de sa dotation théorique. C'est dire que nous avons conduit un très grand effort de remise à
niveau.
J'en viens aux IUT.
Vous avez souligné à juste titre le rôle éminent qu'ils jouent dans la formation. Je pense qu'ils seront le socle de la nouvelle
voie technologique que nous allons construire à l'université. En effet, c'est bien naturellement à partir des réussites que l'on
construit ; or les IUT sont un succès.
En liaison avec les universités - les IUT appartiennent en effet aux universités - sachez qu'un plan a été mis en place pour
que, comme les universités, tous les IUT puissent obtenir leur dotation théorique.
Dès cette année, quarante IUT bénéficieront d'attributions complémentaires de crédits pour un montant global de 16,5
millions de francs. L'IUT de Créteil recevra quant à lui une dotation complémentaire de 1,71 million de francs.
Ce plan devrait nous permettre de faire jouer aux IUT le rôle précieux qui doit être le leur en vue tant de la formation
technologique des jeunes que d'un meilleur équilibre à l'intérieur des formations universitaires.
Je compte sur les IUT pour prendre leur place dans la réforme de l'université que nous allons mettre en oeuvre dès la
rentrée prochaine, c'est-à-dire pour permettre aux jeunes de se poser au moment pertinent la question de leur orientation
et pour pouvoir leur donner des choix nouveaux, que ces jeunes prennent la voie technologique ou celle de l'enseignement
général et souhaitent en changer. C'est dire à quel point les IUT sont une pièce précieuse de l'architecture de notre
université.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, vous évoquez les restrictions budgétaires. Je les connais, hélas ! et j'ai d'ailleurs
voté contre, car je ne peux les accepter à un moment où une augmentation des crédits publics est indispensable à la
France. Je les accepte d'autant moins quand elles concernent le budget du ministère de l'éducation nationale, qui devrait
être prometteur pour l'avenir de la jeunesse en France. Vous me répondez en me présentant ce que vous appelez un plan
de rattrapage pour les IUT ; mais il s'agit plutôt, pour moi, de premières mesures d'urgence qui restent très en deçà des
besoins !
Ainsi, ce que vous annoncez pour l'IUT de Paris XII situé à Créteil, par exemple, est loin de correspondre à la nécessité :
alors que les besoins du seul IUT de Paris XII s'élèvent à 20 millions de francs, une dotation de 4 millions de francs est
vraiment insuffisante, d'autant plus que les IUT n'ont pas bénéficié du plan d'urgence pour les universités.
Une précision s'impose : les engagements que vous annoncez sont-ils à effectifs constants d'étudiants, comme cela doit
être le cas ? Par ailleurs, qu'est-il prévu pour l'encadrement des projets de tutorat et des stages, qui font partie des actes
pédagogiques prévus par l'arrêté du 20 avril 1994 et qui devraient, à ce titre, recevoir des moyens en heures et en postes
correspondants ?
Monsieur le ministre, je doute que les directeurs d'IUT, les enseignants et les étudiants se satisfassent des mesures que
vous annoncez, même si elles constituent un premier déblocage. Eu égard à leurs performances, les IUT méritent vraiment
mieux !
Est-ce ainsi que vous construirez la grande filière technologique qui a été annoncée voilà peu ? Certainement pas ! A cet
égard, je vous suggère aujourd'hui qu'un débat soit organisé au Parlement sur cette filière, sur la formation spécifique en
IUT, voire sur l'enseignement supérieur, comme nous en avions parlé. Cela intéressera le pays tout entier.

- page 1607

Page mise à jour le