Question de M. ROUQUET René (Val-de-Marne - SOC) publiée le 22/01/1997

M. René Rouquet appelle l'attention de Mme le ministre de l'environnement sur les conséquences de l'alerte à la pollution de niveau 2 déclenchée par Airparif le 13 janvier dernier, qui a mis directement en cause la centrale à combustion EDF de Vitry-sur-Seine, celle-ci se voyant immédiatement contrainte de réduire sa production de moitié. Incriminée comme lors d'une précédente alerte au dioxyde de soufre intervenue en novembre 1995, cette centrale est située dans le périmètre direct d'une zone fortement urbanisée, sur un secteur où sont déjà concentrées de nombreuses industries polluantes, et qui est voué à accueillir prochainement, outre une turbine à combustion, une usine d'incinération dont le principe vient d'être voté par l'assemblée départementale. Face à une telle concentration de nuisances atmosphériques qui portent une atteinte grave à la santé de milliers d'habitants de ce secteur, et plus particulièrement, des communes d'Alfortville, de Choisy-le-Roi, de Maisons-Alfort et de Vitry, il lui demande si elle est déterminée à mener le combat, avec les élus et les populations concernées, pour s'opposer à la construction de cette usine d'incinération.

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Réponse du ministère : Environnement publiée le 05/02/1997

Réponse apportée en séance publique le 04/02/1997

M. René Rouquet. Madame le ministre, je voudrais une nouvelle fois appeler votre attention sur les problèmes de
pollution atmosphérique qui se posent de façon de plus en plus criante autour du site Arrighi de Vitry-sur-Seine.
Comme vous le savez, l'alerte récente à la population au dioxyde de soufre déclenchée en région parisienne a de nouveau
directement mis en cause la centrale à combustion EDF établie sur ce site : comme l'a rappelé ici, le 23 janvier dernier, le
porte-parole du Gouvernement, M. Lamassoure, cette centrale à combustion s'est vue immédiatement contrainte, face au
taux alarmant de SO2 rejeté dans l'atmosphère, de réduire sa production de moitié. Sachant que ce gaz irritant est connu
pour ses graves conséquences sur la santé publique et qu'il serait, selon des études scientifiques, la cause de certains
décès prématurés chaque année en France, cet incident établit de façon irréfutable, s'il en était encore besoin, le caractère
éminemment dangereux de cette unité de production.
Cette nouvelle alerte renforce les craintes avérées que j'ai déjà eu l'occasion de vous exprimer à maintes reprises, ici
même, sur les dangers pesant sur les milliers d'habitants d'Alfortville, de Choisy-le-Roi, de Maisons-Alfort et de
Vitry-sur-Seine, autant de communes situées dans le périmètre direct de ce site, qui est maintenant voué à accueillir, outre
une nouvelle turbine à combustion, une usine d'incinération.
Aussi, madame le ministre, je vous demande aujourd'hui de bien vouloir m'accorder votre soutien face à cette décision
lourde de conséquences d'implanter une nouvelle unité polluante dans ce secteur, ce qui ne manquerait pas de poser un
problème grave de santé publique.
M'accorder votre soutien, en venant constater par vous-même sur le terrain le caractère inadmissible d'une telle
accumulation de nuisances en milieu urbain auxquelles sont confrontés les habitants de ce secteur, qui n'en peuvent plus de
vivre indéfiniment au rythme des alertes à la pollution et qui, aujourd'hui, attendent des actes, ce serait montrer, comme
vous l'avez déjà prouvé précédemment, à quel point vous êtes soucieuse des problèmes de pollution atmosphérique.
M'accorder votre soutien, madame le ministre, ce serait dire enfin que vous êtes déterminée à mener sans plus tarder le
combat aux côtés des populations concernées et de leurs élus, en vous opposant, avec nous, à la construction de cette
usine d'incinération, et ce avant qu'il ne soit trop tard et que l'on ne nous dise un jour : « Vous saviez tout cela :
qu'avez-vous fait ? »
Avant d'envisager un tel scénario catastrophe, madame le ministre, je vous demande aujourd'hui de nous accorder votre
soutien.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Monsieur le sénateur, je comprends tout à fait votre inquiétude,
et je vais donc m'efforcer de répondre à la question que vous m'avez posée.
Le projet d'implantation d'un centre de valorisation des déchets ménagers à Vitry-sur-Seine, comprenant la construction
d'une déchetterie, d'un centre de tri et d'une unité d'incinération, a été intégré au projet de plan départemental d'élimination
des déchets ménagers et assimilés du Val-de-Marne approuvé par le conseil général du Val-de-Marne, le 9 décembre
1996. Il a, depuis, reçu un avis favorable du conseil départemental d'hygiène et de la commission du plan régional
d'élimination des déchets industriels spéciaux. Il est actuellement soumis pour avis aux conseils généraux des départements
limitrophes.
Le dossier de demande d'autorisation d'exploiter le centre de valorisation de Vitry-sur-Seine a été déposé à la préfecture
du Val-de-Marne le 17 décembre 1996. Le dossier étant incomplet actuellement, il devra donc être complété avant de
pouvoir faire l'objet de la procédure prévue par la réglementation relative aux installations classées, qui comporte
notamment une enquête publique.
L'utilisation d'un modèle mathématique a permis d'évaluer l'impact du projet sur la qualité de l'air ambiant dans le
voisinage du projet du centre de valorisation. L'étude de dispersion montre que le centre devrait affecter très faiblement la
qualité de l'air, ce qui peut être attribué à la mise en place sur l'usine d'incinération d'équipements particulièrement
performants de traitement des fumées.
La réduction des émissions de la centrale thermique de Vitry-sur-Seine a d'ores et déjà été entamée par l'équipement de
l'une de ses trois tranches de brûleurs bas NOx. Par ailleurs, EDF s'engage à réduire de moitié la production de sa
centrale en cas de pointe de pollution de niveau 2 et à arrêter toute production en cas de pointe de pollution de niveau 3.
Enfin, la loi du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie impose l'élaboration, dans toutes les
agglomérations de plus de 250 000 habitants, de plans de protection de l'atmosphère. Un décret en Conseil d'Etat
précisera les mesures qui pourront être mises en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés par ces plans, notamment en ce
qui concerne les règles de fonctionnement et d'exploitation de certaines catégories d'installations et l'augmentation de la
fréquence des contrôles des émissions des installations. En Ile-de-France, l'élaboration du plan de protection de
l'atmosphère pourra se fonder sur les travaux déjà menés en vue de la modification de la zone de protection spéciale
contre les pollutions atmosphériques.
Néanmoins, monsieur le sénateur, je suis très sensibilisée par les questions de pollution de l'air dans ce secteur.
Aussi ai-je demandé à l'inspection générale de procéder à une étude spécifique sur l'état actuel de la pollution
atmosphérique dans cette zone précise de manière à avoir une vue tout à fait exhaustive, non par modèle mathématique,
mais dans la réalité, de la pollution cumulée qui peut aujourd'hui exister autour de la centrale de Vitry-sur-Seine. Ainsi,
nous serons à même de discuter à partir de bases particulièrement précises.
Telles sont, monsieur le sénateur, les informations que je suis à même de vous donner, étant entendu que j'attendrai les
conclusions de ce rapport pour délivrer les autorisations.
M. René Rouquet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Rouquet.
M. René Rouquet. Madame le ministre, votre conclusion me rassure, car vous avez répondu en partie à ma question,
s'agissant du soutien que vous pouvez apporter à des populations, qui ne s'expriment pas encore en manifestant, même si
certaines organisations écologistes se sont réunies cette semaine à Paris.
Aujourd'hui, les élus et les populations concernées ont la possibilité, me semble-t-il, d'entamer avec vous un dialogue.
Vous avez indiqué que vous alliez lancer une étude ; je la réclame depuis bien longtemps, et je suis donc satisfait. J'espère
que, lorsque vous disposerez des résultats de cette étude, vous pourrez alors engager une concertation avec les maires du
secteur concerné. A ce moment-là, nous pourrons peut-être progresser tous ensemble, sans que les populations ne
ressentent le besoin de s'exprimer dans la rue, comme c'est le cas aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées
socialistes.)

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