Question de M. LE JEUNE Edouard (Finistère - UC) publiée le 15/11/1996

M. Edouard Le Jeune attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur l'avenir de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL). Selon le dernier rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, le déficit de trésorerie de la CNRACL devrait atteindre 8 milliards de francs à la fin de 1997. Le Gouvernement a décidé, dans le cadre de la loi de finances pour 1997, d'affecter l'essentiel de l'excédent du régime de l'allocation temporaire d'invalidité des agents des collectivités locales (4,5 milliards de francs) à la CNRACL. Mais il s'agit d'une opération ponctuelle qui ne pourra pas, par définition, être répétée les prochaines années. Il lui demande donc ce qu'il entend faire afin d'assainir de manière plus durable la situation financière de la CNRACL.

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Réponse du ministère : Fonction publique publiée le 18/12/1996

Réponse apportée en séance publique le 17/12/1996

M. Edouard Le Jeune. Monsieur le ministre, comme vous le savez, les élus locaux sont de plus en plus inquiets face au
déficit de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL.
Conformément à l'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale récemment adoptée par le Parlement, l'équilibre
de la CNRACL devrait être établi en 1997 sans recourir à une augmentation des cotisations, grâce à la mobilisation des
réserves structurelles du fonds des allocations temporaires d'invalidité. Pour parler familièrement, c'est là un « tour de
passe-passe ».
Le fonds des allocations temporaires d'invalidité des agents des collectivités locales est alimenté par les cotisations
patronales des collectivités locales et des hôpitaux publics, et ses réserves s'élèvent, en l'état, à 5 milliards de francs.
Sur ce total, une enveloppe de 4,5 milliards de francs sera mobilisée au profit de la CNRACL.
Or, selon les indications fournies par la caisse, ses besoins en trésorerie au 31 décembre 1997 s'élèveraient, en fait, à 7,7
milliards de francs. L'apport de 4,5 milliards de francs annoncé par le Gouvernement ne permettrait donc, en l'absence
d'un relèvement des cotisations, d'honorer les versements dus au titre de la surcompensation entre régimes spéciaux de
salariés qu'en début d'année seulement.
Si le Gouvernement respecte effectivement sa parole de ne pas majorer la participation des collectivités locales au
financement de la caisse, il devra ainsi accepter le report sur l'exercice 1998 d'une partie des acomptes, soit 3,2 milliards
de francs qui auraient dû être versés en 1997 au titre de la surcompensation.
Enfin et surtout, la solution mise en oeuvre en 1997 ne pourra pas être reconduite en 1998 : la question d'un éventuel
relèvement des cotisations ou d'un allégement des contraintes liées à la surcompensation au profit des autres régimes
risque donc de se poser à nouveau, même si un important pas en avant a pu être accompli grâce au Sénat qui a voté, dans
le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, un plafonnement de la surcompensation à 25 % du montant des
prestations servies.
Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin de redresser durablement la situation
financière de la CNRACL ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.
Monsieur le sénateur, comme vous l'avez rappelé, le Gouvernement a souhaité que, pour 1997, soit respecté le pacte de
stabilité pour ce qui concerne les recettes transférées de l'Etat aux collectivités territoriales et qu'en même temps l'Etat
n'impose pas une charge supplémentaire sous forme de relèvement des cotisations aux collectivités territoriales, ce qui
aurait déséquilibré l'ensemble du dispositif.
Pour y parvenir, nous avons trouvé une solution temporaire qui consiste à prélever des recettes qui avaient été stockées
sur le fonds des allocations temporaires d'invalidité. Ces recettes étant, je le rappelle, le fruit des cotisations payées par les
collectivités territoriales, elles leur appartiennent, en quelque sorte. Dans la mesure où ces fonds n'étaient pas utilisés, il est
donc logique que, grâce à cette mesure, les collectivités territoriales ne voient pas leurs cotisations relevées en 1997.
S'agissant des chiffres, je sais que certains, à la CNRACL, développent depuis des semaines l'argument selon lequel 4,5
milliards de francs ne suffiraient pas. Or, avec la direction générale des collectivités locales et avec mon collègue chargé
du budget, j'ai vérifié les comptes, refait les estimations et je puis vous assurer que ces 4,5 milliards de francs suffiront : 3
milliards de francs permettront de faire face au financement du déficit prévu pour l'exercice et 1,5 milliard de francs seront
consacrés à la nécessaire trésorerie de l'établissement. Pour 1997, il n'y aura donc pas de difficultés.
Cela étant, votre seconde question reste tout à fait pertinente : que va-t-il se passer à partir de 1998 ?
Nous devrons - dans l'esprit, d'ailleurs, de la décision que le Sénat a prise à l'occasion du vote de la loi de financement de
la sécurité sociale - réfléchir dans deux directions.
En premier lieu, nous devrons essayer de déterminer quel est le niveau pertinent de cotisation pour un régime qui, s'il a
connu une structure extrêmement favorable jusqu'à aujourd'hui compte tenu des recrutements qui ont suivi la
décentralisation, va évoluer maintenant d'une manière moins favorable puisque la population concernée va commencer à
vieillir. Cela implique donc nécessairement une certaine charge supplémentaire pour la caisse nationale.
En second lieu, nous devrons savoir comment traiter dans ce pays la compensation ou la surcompensation, c'est-à-dire
l'effort de solidarité entre les régimes de retraite. C'est une vieille tradition dans notre pays, mais ce domaine mérite un peu
plus de transparence.
Nous devrons faire ce double travail pour, d'ici à la fin de l'année 1997, parvenir à des solutions afin de déterminer, à
partir de 1998, comment nous ferons évoluer le fonctionnement de la caisse, quel devra être le niveau pertinent et justifié
des cotisations et comment cela sera compatible avec le maintien du pacte de stabilité.
M. Edouard Le Jeune. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Le Jeune.
M. Edouard Le Jeune. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Cependant, la CNRACL, malgré les
promesses, pose tous les ans des problèmes, vous en conviendrez. Je reste donc assez sceptique et, si cela s'avère
nécessaire, j'interviendrai une fois de plus pour défendre les intérêts des collectivités locales.

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