Question de M. RENAR Ivan (Nord - CRC) publiée le 31/10/1996

M. Ivan Renar attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation du Soudan. Le Soudan est aujourd'hui dirigé par une junte islamiste fondamentaliste. Depuis cette prise de pouvoir par coup d'Etat, ce régime terrorise ses concitoyens et massacre une partie de la population dans la guerre civile qu'il mène contre une opposition armée. Ce conflit a déjà fait deux millions de morts civiles et près de quatre millions et demi de personnes déplacées ou réfugiées. On compte par dizaines de milliers le nombre de femmes et d'enfants réduits à l'esclavage. Le régime soudanais est également un fervent soutien du terrorisme international. Les médiateurs de l'IGADD (Inter-Gouvernemental Authority on Drought and Development), Erythrée, Ethiopie, Kenya et Ouganda ont recommandé en 1994 l'établissement d'un Soudan démocratique, fédéral, laïque ou, à défaut, un droit à l'autodétermination qui inclut la possibilité d'indépendance pour les régions, Sud et autres, qui la souhaiteraient. Les oppositions armées et les partis au pouvoir avant le coup d'Etat ont accepté ces conclusions ; l'OUA les soutient. Le régime de Khartoum les a bien entendu refusées, le but du coup d'Etat ayant été d'arrêter les pourparlers de paix. La France a voté au sein de l'Union européenne et de la commission paritaire UE/ACP l'exclusion du Soudan des accords de Lomé et l'embargo sur les armes ; elle a voté maintes fois à la commission des Nations unies pour les droits de l'homme la condamnation du Soudan ; elle a également voté au conseil de sécurité des Nations unies des sanctions contre le Soudan pour son action terroriste, qui inquiète également l'Organisation de l'unité africaine (OUA). Elle participe à l'action humanitaire. Cependant, de nombreuses sources françaises, soudanaises et autres affirment que depuis 1990 la France soutient la politique du Gouvernement soudanais par des aides militaires, policières et diplomatiques dont la Commission nationale consultative des droits de l'homme s'est émue dans un avis du 23 mai 1996. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser la position de la France vis-à-vis du Soudan.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 05/12/1996

Réponse. - L'évolution de la situation au Soudan, et en particulier du conflit persistant dans le sud du pays, fait l'objet d'une attention soutenue de la part de la France. La position de la France s'inscrit notamment dans le cadre des décisions prises par l'Union européenne. La déclaration européenne du 21 février 1994 pose le principe de l'établissement d'un dialogue " franc " avec les autorités soudanaises sur " tous les points politiques et humanitaires " préoccupant la communauté internationale. Simultanément, il a été décidé de " poursuivre les contacts avec les factions du sud ". M. Caspar Biro, représentant spécial de la commission des Nations unies pour les droits de l'homme, interdit de séjour au Soudan jusque récemment, vient d'être autorisé à s'y rendre. Le rapport de la mission qu'il y a faite du 31 juillet au 8 août 1996 est attendu. La France respecte strictement la décision du Conseil de l'Union européenne du 15 mars 1994, qui invite les Etats membres à appliquer un embargo sur l'exportation d'armes à destination du Soudan. De même, lors des sessions annuelles de la commission des droits de l'homme des Nations unies, la délégation française coparraine la résolution condamnant les violations des droits de l'homme au Soudan. La France a voté, en janvier 1996, la résolution 1044 du Conseil de sécurité, dont elle est un membre permanent, qui a enjoint à ce pays de livrer trois des auteurs présumés de l'attentat commis le 26 juin à Addis-Abeba contre le président Moubarak. Notre pays a également voté en avril la résolution 1044, par laquelle le Conseil de sécurité, agissant sous le chapitre VII de la Charte des Nations unies, a adopté les premières sanctions à l'encontre du Soudan, les autorités de Khartoum n'ayant pas adopté de réponses satisfaisantes aux demandes de la résolution précédente. Conformément à cette résolution, la France a invité les autorités soudanaises à réduire les effectifs de leur ambassade à Paris et renforcé sa politique déjà restrictive en matière de délivrance de visa à des personnalités officielles soudanaises. Enfin, le 16 août dernier, la France a voté la résolution 1070, qui envisage de nouvelles sanctions si le Soudan ne se conforme pas à la résolution 1044 dans un délai de trois mois. Dès l'arrivée au pouvoir à Khartoum du régime islamique, en 1989, la France a suspendu son aide au développement en faveur du Soudan. La seule aide qu'elle dispense aujourd'hui est desinée aux populations civiles, y compris celles qui sont déplacées, notamment dans la région de Khartoum. Cette aide est accordée soit à titre bilatéral, soit par le canal des programmes de l'Union européenne (ECHO) et du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Comme peut le constater l'honorable parlementaire, la position de la France à l'égard du Soudan ne se distingue donc en rien de celle adoptée par l'ensemble de ses partenaires européens et occidentaux. Dans ces conditions, l'on ne peut qu'être surpris de voir que, sous couvert d'une " campagne européenne de solidarité avec le peuple soudanais ", certaines allégations sont répandues sur un prétendu soutien militaire, policier et diplomatique au régime de Khartoum et dont la Commission nationale consultative des droits de l'homme se serait émue dans son avis du 23 mai 1996. Or, le texte incriminé ne critique nullement le Gouvernement français ; il se borne à appeler son attention sur un certain nombre de points qui constituent déjà les grandes lignes de l'attitude de la France et de ses partenaires européens au regard du Soudan. ; européens au regard du Soudan.

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