Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 10/10/1996

M. Nicolas About attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conclusions du dernier conseil des ministres des finances des Quinze, appelé l'ECOFIN, relatives à la mise en place des différentes phases de l'UEM (Union économique et monétaire). Le compromis qui s'en est dégagé souligne à l'évidence la victoire des arguments allemands qui par certains aspects méritent une étude critique. La première critique s'adresse évidemment au Gouvernement français qui n'a pas su mettre en exergue les risques que comportaient certaines décisions adoptées, émanant des propositions allemandes ; en psychologie on aurait recours à l'expression " complexe d'infériorité " pour décrire l'attitude française. Les décisions prises lors de cet ECOFIN doivent être réexaminées car le système adopté pour la mise sur pied de l'UEM est trop rigide, si bien que nos économies nationales n'auront aucune marge de manoeuvre en cas de récession économique (une hypothèse qu'il faut sérieusement envisager). Le Gouvernement français doit représenter son projet concernant l'institution d'un " Conseil de stabilité ", sorte de gouvernement économique qui puisse constituer un contre-poids politique à la puissante Banque centrale européenne. Sans lien avec le politique, il est à craindre que cette banque soit victime du même syndrome technocratique dont souffre l'actuelle Commission européenne. Si nous voulons obtenir le soutien des populations européennes sur ce projet dont la symbolique politique est fondamentale, il faut qu'il soit perçu comme transparent et démocratique et comme non susceptible de mettre en place un nouveau pouvoir technocratique éloigné des réalités économiques et sociales de l'Union européenne. Enfin, il semble incongru et grotesque de faire sanctionner les Etats qui dépasseraient les fameux 3 % du PIB (produit intérieur brut), aggravant ainsi la situation de leurs finances publiques . Derrière la froideur des chiffres, il ne faut pas oublier l'actuelle situation économique et sociale en Europe qui nécessitera peut-être quelques ajustements entraînant un dépassement de ce critère qui économiquement n'a aucun fondement. L'Europe ne réussira que si elle participe à l'élévation du niveau de vie de ses citoyens, c'est la seule voie pour obtenir leur indispensable adhésion. Il lui demande ce que le Gouvernement entend faire pour que ces décisions soient réexaminées sérieusement. Il lui demande de défendre auprès de l'Allemagne son projet de création " d'un conseil de la stabilité " qui assurera un équilibre des pouvoirs avec la Banque européenne centrale dans la future UEM. Le prétendu " miracle allemand " sur le plan monétaire et économique ne doit pas être un prétexte pour accepter tout ce que nous proposent nos partenaires allemands.

- page 2608


Réponse du ministère : Économie publiée le 16/01/1997

Réponse. - Le pacte de stabilité et de croissance sur lequel les ministres ont travaillé à Dublin, lors du conseil Ecofin informel, et qui vient d'être approuvé par le Conseil européen, n'introduit pas de contraintes supplémentaires par rapport au traité de Maastricht. Ce dernier, approuvé par référendum, fixe déjà le plafond de 3 % pour le déficit public, le principe et la nature des sanctions. Le pacte se contente de décrire les procédures qui seront employées pour la mise en oeuvre du traité. Il garantit trois actions collectives indispensables au respect de la stabilité budgétaire : la prévention, la réaction et la sanction comme ultime recours dissuasif. L'idée même du pacte de stabilité et de croissance correspond à l'objectif de prémunir la France contre une gestion budgétaire qui pourrait s'avérer peu rigoureuse de tel ou tel partenaire. Ce pacte est donc destiné à protéger les Français, à protéger leur épargne, dans un nouveau contexte où ils risqueraient de subir très directement les effets de dérapages budgétaires d'autres Etats membres. Cela ne signifie pas pour autant que les économies européennes n'auront pas de marge de manoeuvre en cas de récession économique. La situation actuelle, caractérisée par un déficit public très élevé, est exceptionnelle : depuis le début des années 60, le déficit public français n'a pratiquement jamais dépassé les 3 % du PIB. Elle témoigne d'une dérive structurelle des comptes publics bien au-delà de ce qui aurait été justifié par la conjoncture. La France doit viser le retour vers l'équilibre de ses finances publiques, ce qui lui permettra non seulement d'assurer les conditions d'une croissance saine et équilibrée, mais également, si besoin est, de faire face aux effets du cycle économique sans compromettre pour autant la bonne santé des finances publiques. Dans les négociations intervenues en marge du Conseil européen de Dublin, la France s'est attachée, avec succès, à garantir la pleine souveraineté du Conseil, organe politique de l'Union, dans la mise en oeuvre des décisions d'application à chaque Etat membre des dispositions du pacte de stabilité et de croissance. Le traité a déjà prévu les instruments nécessaires au bon fonctionnement de l'Union monétaire dans sa composante économique sous la forme du Conseil formel des ministres de l'économie et des finances. Au-delà, la France a proposé la création d'un conseil informel de stabilité et de croissance à ses partenaires. La France est très attachée à cette proposition et entend poursuivre son action en ce sens. Un tel conseil doit permettre aux Etats membres participants à l'Union monétaire une coopération approfondie sur les politiques macro-économiques et budgétaires. Tout en préservant la souveraineté nationale dans la définition et la conduite desdites politiques, il permettra de s'assurer que chaque Etat membre participant agira dans l'intérêt de la zone monétaire européenne et que les politiques économiques respectives des Etats concernés seront concertées. Il permettra également d'incarner, dans le total respect de l'indépendance de la Banque centrale européenne, la responsabilité politique dans l'Union monétaire.

- page 126

Page mise à jour le