Question de Mme DUSSEAU Joëlle (Gironde - RDSE) publiée le 10/10/1996

Mme Joëlle Dusseau attire l'attention de M. le ministre délégué au budget sur la suppression de l'abattement fiscal supplémentaire de 30 % appliqué aux journalistes. Elle s'interroge sur la suppression d'une disposition très ancienne (lois du 29 mars 1935 et du 4 juillet 1974) jusqu'ici uniquement réduite sous Vichy et dont la philosophie s'inscrit dans le dispositif d'aide à la presse. La remise en cause de la dérogation fiscale est décidée sans que ce système global d'aide soit mis à plat et éventuellement rééquilibré. La suppression de cet abattement 30 % se traduirait par une baisse du pouvoir d'achat équivalente à un mois de salaire. Cette mesure, prise sans discernement, pénaliserait surtout les revenus moyens et aggraverait des situations souvent précaires. En effet, les effectifs permanents des rédactions se réduisent et seul un noyau restreint de journalistes perdure en interne. Le métier de rédacteur en particulier connaît une précarisation sans précédent. Les journalistes pigistes ou sous contrats temporaires représentent une part sans cesse accrue des effectifs (20 % en moyenne). Cette catégorie de journalistes " hors les murs des entreprises " constitue aujourd'hui des " intermittents de l'information ", souvent condamnés à accepter du travail aux conditions de l'employeur. Pour eux, qui doivent investir et supporter des frais professionnels difficiles à se faire rembourser par leurs employeurs, la suppression de l'abattement supplémentaire serait catastrophique et précariserait encore plus leur situation. Enfin, les journalistes engagent quotidiennement des dépenses importantes inhérentes à leur métier (documentation, transport, téléphone), sans en avoir compensation. Certains frais ne peuvent pas entrer dans le réel remboursable, sans que la confidentialité de l'exercice de leur profession soit menacée (justificatifs trop explicites par exemple). Cette réforme n'en tient pas compte et limite indirectement la liberté de la presse. Elle lui demande donc de prendre des dispositions et des garanties qui tiennent compte de ces situations.

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Réponse du ministère : Budget publiée le 06/03/1997

Réponse. - Les déductions forfaitaires supplémentaires pour frais professionnels ont été instituées à l'origine, c'est-à-dire le plus souvent il y a cinquante ans, pour prendre en compte la situation des salariés appartenant à des professions supportant des frais plus élevés que la moyenne des salariés. C'est ainsi que les journalistes bénéficient d'une déduction forfaitaire supplémentaire de 30 % en application d'un arrêté de 1934. Ces déductions supplémentaires avaient alors une légitimité qu'elles ont perdue au fil du temps dès lors que les conditions d'exercice des activités concernées ont considérablement évolué et surtout que les frais auxquels ces déductions étaient réputées correspondre sont pour l'essentiel désormais pris en charge par les employeurs. Leur suppression, qui a été adoptée par le Parlement dans le cadre de la loi de finances pour 1997 publiée au Journal officiel du 31 décembre 1996, s'effectuera progressivement à compter de l'imposition des revenus de l'année 1997. Elle concerne plus d'une centaine de professions et s'inscrit dans le cadre de la profonde réforme de l'impôt sur le revenu engagée sur cinq ans par la loi de finances précitée, qui vise tout à la fois à alléger, simplifier et rendre plus équitable cet impôt. Cela étant, le Gouvernement a reconnu que la situation des journalistes présente des particularités au regard de cette mesure d'application générale. C'est pourquoi, bien que les effets de la suppression de la déduction forfaitaire supplémentaire de 30 % dont bénéficient les intéressés soient sensiblement atténués par la baisse de l'ensemble des taux du barème de l'impôt sur le revenu, l'article 88 de la loi de finances pour 1997, qui résulte d'un amendement du Gouvernement, a créé un fonds budgétaire dont la vocation est de compenser la hausse de leur impôt que subiront au terme de la réforme certains journalistes, principalement les journalistes célibataires. Les modalités pratiques d'application de ce mécanisme de compensation font actuellement l'objet d'une concertation, menée sous l'égide de M. Jacques Bonnet, président de chambre à la Cour des comptes, avec les organisations représentatives des journalistes, dont les résultats seront portés à la connaissance de la représentation nationale. Enfin, il est rappelé que la suppression des déductions forfaitaires supplémentaires pour le calcul de l'impôt sur le revenu sera sans incidence pour celui des cotisations sociales à la charge tant des entreprises de presse que des journalistes. Un arrêté en ce sens a été conjointement pris le 30 décembre 1996 par le ministre du travail et des affaires sociales et par le ministre délégué au budget. Cet arrêté est publié au Journal officiel du 31 décembre 1996.

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