Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 25/07/1996

M. Nicolas About attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation en Irlande du Nord. Le week-end des 13 et 14 juillet aura été marqué par la résurgence de l'intolérance et de la violence, après deux années de trêve. Les images de guerre civile en provenance de Londonderry nous ont rappelé qu'au coeur de l'Union européenne la haine et l'incompréhension entraînent l'homme dans des affrontements meurtriers, dignes des conflits interethniques que les Balkans nous ont offerts ces dernières années. On salue habituellement l'apport de la construction européenne sur le plan de la coopération et de la paix entre les nations européennes qui se sont affrontées pendant plusieurs siècles. On peut à ce titre regretter que l'adhésion à l'Union européenne n'ait pas apporté la paix et la réconciliation nationale à l'ensemble des Irlandais, citoyens européens à part entière quelle que soit leur religion. L'Europe repose sur le respect de ses diversités culturelles et religieuses, elle ne peut admettre l'expression de toute forme d'ostracisme tel que le continent l'a vécu sous l'Inquisition. A l'heure où l'Union des Quinze tente de définir une politique étrangère et de sécurité commune, susceptible de prévenir les conflits en Europe, et à la veille de son élargissement à l'Est où certains pays ont de fortes différences culturelles (problème des minorités), elle doit se pencher sur ce dossier irlandais et en faire un laboratoire de règlement pacifique des conflits d'origine culturelle. La position actuelle de chacun des acteurs du jeu ulstérien empêche toute direction objective des négociations. On peut envisager que l'Union européenne, par l'intermédiaire d'une troïka dont les membres ne seraient pas liés à l'affaire irlandaise, offre ses bons offices aux différents protagonistes pour présider une commission chargée d'établir un calendrier des négociations, devant aboutir à un accord qui devra être soumis aux électeurs de l'Ulster. L'indépendance et l'objectivité de cette troïka européenne offriraient une assurance quant à l'application pacifique de l'accord. Il demande au Gouvernement ce qu'il entend faire au niveau de l'Union européenne pour favoriser la reprise des négociations en Irlande du Nord, trop de sang ayant été versé. Enfin, il lui demande ce qu'il pense de sa proposition visant à faire parrainer ces négociations par des membres " neutres " de l'Union européenne. En ce qui concerne l'Ulster, il ne s'agit pas seulement d'une affaire intérieure, c'est aussi la responsabilité de l'ensemble des membres de l'Union européenne que de promouvoir la paix et la coopération entre les différentes communautés qui la composent, c'est en fait devenu une affaire intérieure européenne.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 19/09/1996

Réponse. - La France suit avec la plus grande attention l'évolution de la situation en Irlande du Nord. Elle a marqué sa préoccupation face au regain de tension observé au cours des derniers mois et a déploré la recrudescence de violences qui vont à l'encontre du processus de paix initié par la déclaration anglo-irlandaise de décembre 1993. Comme le sait l'honorable parlementaire, le Royaume-Uni et la République d'Irlande ont, d'un commun accord, défini une procédure de négociation visant à un règlement du conflit en Irlande du Nord. A cet effet, des élections ont été organisées en Ulster, le 30 mai dernier, et des pourparlers ont été engagés le 10 juin entre les représentants des différents partis issus de ces élections, à l'exception du Sinn Fein, dont la présence demeure subordonnée à la restauration du cessez-le-feu par l'IRA. Les discussions devraient reprendre en septembre. Cette volonté commune des gouvernements britannique et irlandais de réactiver le processus de négociation doit naturellement être privilégiée et encouragée par l'Union européenne. Il n'est pas de règle, en revanche, que les Etats-membres de l'Union interviennent directement dans un contentieux politique interne à un pays-membre ou qui implique deux de leurs partenaires, et ceci d'autant plus qu'un processus visant à promouvoir une solution négociée au conflit en Ulster est actuellement en cours. La France a, dans le cadre de l'Union européenne, apporté son ferme soutien aux efforts déployés par les gouvernements britannique et irlandais afin de rechercher une solution politique à la question nord-irlandaise. Elle considère en effet que le meilleur espoir de voir s'imposer une dynamique de paix réside dans l'inébranlable détermination des deux gouvernements à surmonter, ensemble et durablement, les antagonismes qui viennent à nouveau de s'exprimer dans les récentes éruptions de violence. Il convient par ailleurs de rappeler que l'Union européenne contribue activement au rétablissement de la paix en apportant une aide significative au développement économique de l'Irlande du Nord grâce aux différents crédits communautaires et par l'attribution de ressources financières supplémentaires spécifiques. Cette aide comporte un important volet relatif à la coopération transfrontalière et pose les bases d'un partenariat entre les différentes communautés visant à favoriser un climat d'apaisement et de réconciliation dans la Province. La France continuera, en concertation avec ses partenaires européens, d'appuyer cette action ainsi que les initiatives mises en oeuvre par les autorités britanniques et irlandaises pour relancer le processus de paix en Irlande du Nord. Elle souhaite que les discussions engagées à Belfast puissent permettre de faire prévaloir une logique de paix, conforme aux aspirations profondes de l'immense majorité de la population en Ulster.

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