Question de M. TÜRK Alex (Nord - NI) publiée le 09/05/1996

M. Alex Türk attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence sur le problème des mines antipersonnel dont nous connaissons la gravité tant sur le plan humain (800 personnes sont tuées par an, des milliers de personnes sont mutilées), sur le plan économique (non-exploitation des terres) et sur le plan social. La France a été le premier pays à exiger l'interdiction totale des mines antipersonnel. Compte tenu des débats récents de la conférence de Genève, il lui demande quelles sont les positions de la France sur ce dossier, quand celle-ci procédera à la destruction de ses propres mines et les moyens qu'elle entend mettre en oeuvre pour multiplier les équipes de déminage, les équipes médicales mais aussi la modernisation des méthodes de détection des mines non métalliques.

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Réponse du ministère : Action humanitaire d'urgence publiée le 06/06/1996

Réponse. - La conférence d'examen de la convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques a clos ses travaux le 3 mai dernier à Genève, au terme de trois ans de négociations particulièrement difficiles. La France est à l'origine de la révision du protocole II sur les mines antipersonnel. Dans les négociations, la France visait le renforcement du protocole II sur 4 points principaux : 1o l'extension de la portée du protocole aux conflits internes ; 2o l'interdiction des mines les plus dangereuses ; 3o le soutien aux opérations de déminage et la protection des missions humanitaires ; 4o l'introduction d'un mécanisme de consultation associé à un régime de sanctions. Par ailleurs, la France proposait que la convention dans son ensemble soit soumise à révision tous les 5 ans à la demande d'un Etat partie. Le compromis adopté à Genève représente une étape importante vers l'objectif d'interdiction des mines antipersonnel. On relève des progrès majeurs par rapport au texte actuel : 1o l'extension de la portée du protocole aux conflits internes ; 2o l'interdiction immédiate des transferts de mines non détectables, décision dont l'application est immédiate ; 3o l'interdiction de l'emploi des mines non détectables, après une période de transition pour certains Etats ; 4o le principe de consultations régulières et transparentes entre les Etats parties ; 5o le principe de sanctions nationales en cas de violation des dispositions du protocole II, avec l'obligation de poursuivre pénalement les responsables de ces violations, et celui de l'engagement de consultations entre les Etats parties sur toute question soulevée par l'interprétation et l'application du protocole ; 6o le renforcement de la protection des missions humanitaires dans les zones où des mines ont été utilisées ; 7o le renforcement des mesures concernant la coopération technique, en particulier concernant le déminage. Les résultats de cette négociation ne sont pas entièrement satisfaisants dans la mesure où l'application de l'interdiction d'emploi des mines antipersonnel non détectables pourra être différée par certains Etats pendant une période de neuf ans sans contrainte particulière sur les conditions d'utilisation. La France espère que ces Etats exerceront la plus grande retenue à cet égard. D'autre part, il n'a pas été possible de parvenir à un accord sur un dispositif de contrôle de l'application du protocole par le biais d'enquêtes en cas d'allégations de violation des engagements pris. Au total, l'adoption de ce protocole devrait faciliter encore davantage les opérations de déminage, permettre d'interdire à terme l'utilisation des mines les plus dangereuses et donner une nouvelle impulsion à la lutte contre la prolifération de ce type d'armes. Il offre enfin une sécurité juridique qui devrait réduire le nombre de victimes des mines antipersonnel à l'avenir. Plus largement, les nombreuses mesures unilatérales annoncées par les Etats pendant la conférence, à l'exemple de l'annonce du moratoire français, marquent un véritable renversement de tendance dans l'opinion publique internationale. Cette dynamique internationale en faveur de l'interdiction, lancée par la France, permet d'envisager avec optimisme la possibilité de relever le défi de l'élimination totale des mines antipersonnel. Au plan français, cet objectif passe par la mise en oeuvre de l'engagement à réduire par destruction les stocks de mines existants. Une récente étude menée par le ministère de la défense a permis de fixer le début de la destruction au deuxième semestre 1996. Pour ce qui concerne la philosophie qui anime les projets de déminage financés par la France au Cambodge, en ex-Yougoslavie, au Mozambique, en Angola, au Tchad, l'approche retenue est la suivante. Le déminage est un processus lent, coûteux et dangereux. Les mines constituent autant un problème humanitaire qu'un problème de développement : les pays les plus touchés vont devoir vivre avec ce fléau pendant de longues années. L'approche de la France est donc une approche de long terme, intégrant la prévention, le déminage et l'assistance aux victimes. La prévention passe par la sensibilisation des populations, en particulier des enfants, au risque présenté par les mines. Pour empêcher les accidents, le secrétariat d'Etat à l'action humanitaire d'urgence souhaite également développer la cartographie des zones minées, afin d'en permettre le marquage et la signalisation. Le déminage proprement dit doit avant tout renforcer les capacités locales. Les projets qu'appuie la France visent à soutenir les institutions nationales en charge du problème des mines, en particulier en formant des équipes de démineurs. L'ampleur des budgets nécessaires au développement de nouvelles techniques de déminage est telle que c'est seulement dans un cadre européen qu'il est envisageable de financer des programmes de recherche. La France sensibilise ses partenaires européens (Office humanitaire européen, directions en charge de l'aide au développement) pour qu'un effort conjoint de recherche soit entrepris sur le long terme. L'assistance aux victimes dépasse les aspects médicaux. Il faut certes soigner les blessés, appareiller les mutilés, mais aussi soigner le traumatisme psychologique et donner aux handicapés les moyens de subvenir à leurs besoins en les réinsérant dans leur société, car on sait que la mutilation est source d'exclusion (femmes et enfants abandonnés par leur famille), et en leur donnant une formation, car un paysan qui perd un membre perd tout moyen de survie. ; fixer le début de la destruction au deuxième semestre 1996. Pour ce qui concerne la philosophie qui anime les projets de déminage financés par la France au Cambodge, en ex-Yougoslavie, au Mozambique, en Angola, au Tchad, l'approche retenue est la suivante. Le déminage est un processus lent, coûteux et dangereux. Les mines constituent autant un problème humanitaire qu'un problème de développement : les pays les plus touchés vont devoir vivre avec ce fléau pendant de longues années. L'approche de la France est donc une approche de long terme, intégrant la prévention, le déminage et l'assistance aux victimes. La prévention passe par la sensibilisation des populations, en particulier des enfants, au risque présenté par les mines. Pour empêcher les accidents, le secrétariat d'Etat à l'action humanitaire d'urgence souhaite également développer la cartographie des zones minées, afin d'en permettre le marquage et la signalisation. Le déminage proprement dit doit avant tout renforcer les capacités locales. Les projets qu'appuie la France visent à soutenir les institutions nationales en charge du problème des mines, en particulier en formant des équipes de démineurs. L'ampleur des budgets nécessaires au développement de nouvelles techniques de déminage est telle que c'est seulement dans un cadre européen qu'il est envisageable de financer des programmes de recherche. La France sensibilise ses partenaires européens (Office humanitaire européen, directions en charge de l'aide au développement) pour qu'un effort conjoint de recherche soit entrepris sur le long terme. L'assistance aux victimes dépasse les aspects médicaux. Il faut certes soigner les blessés, appareiller les mutilés, mais aussi soigner le traumatisme psychologique et donner aux handicapés les moyens de subvenir à leurs besoins en les réinsérant dans leur société, car on sait que la mutilation est source d'exclusion (femmes et enfants abandonnés par leur famille), et en leur donnant une formation, car un paysan qui perd un membre perd tout moyen de survie.

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