Question de M. DEMUYNCK Christian (Seine-Saint-Denis - RPR) publiée le 30/05/1996

M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre délégué à la ville et à l'intégration concernant un projet d'aide au retour et à l'installation de jeunes étrangers dans leur pays d'origine. En effet, de nombreux jeunes étrangers ou Français d'origine étrangère sans emploi ou n'ayant que de petits boulots rencontrent des difficultés dans nos banlieues et ont souvent le mal du pays. Certains ont un projet défini pour retourner dans leur patrie, s'y installer et développer une activité économique. Il ne leur manque souvent qu'un appoint financier ou une aide logistique pour y parvenir, ce qui serait possible en leur maintenant, par exemple, le RMI s'ils le touchent, et en débloquant une aide financière dont le montant serait à définir suivant les dossiers. Il lui demande s'il serait possible de monter une opération pilote sur quelques cas précis de jeunes de Seine-Saint-Denis dont les projets sont bien avancés, avec un financement du ministère.

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Réponse du ministère : Ville publiée le 26/06/1996

Réponse apportée en séance publique le 25/06/1996

M. Christian Demuynck. Monsieur le ministre, ma question concerne une proposition que j'ai déjà eu l'occasion de
développer devant vous dans cet hémicycle, ainsi qu'auprès de certains de vos collègues. Elle concerne la mise en oeuvre
d'une aide au retour et à l'installation de jeunes étrangers ou de Français d'origine étrangère dans leur pays.
En effet, j'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de m'entretenir avec des jeunes étrangers ou des Français d'origine
étrangère qui sont sans emploi, qui n'ont exercé que des petits boulots, qui rencontrent les pires difficultés et qui ont
parfois aussi le mal de leur pays d'origine. En discutant avec eux, j'ai compris que certains d'entre eux avaient un projet
bien défini pour s'en sortir : ils voulaient retourner dans leur pays pour s'y installer et pour développer une activité qui leur
permettrait, d'une part, de trouver un emploi et, d'autre part, de participer ainsi à l'essor économique de leur nation.
Mais il leur manque souvent un appui financier et une aide logistique pour y parvenir, ce qui serait possible à moindre frais
en leur maintenant une allocation de type RMI durant les premiers mois de leur installation et en étudiant avec eux la
possibilité d'une prime d'installation, dont le montant serait à définir en fonction des dossiers.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir s'il serait possible de monter une opération pilote sur quelques
cas précis concernant des jeunes de Seine-Saint-Denis dont nous connaissons les projets déjà bien avancés, et si votre
ministère pourrait participer au financement de ces expériences.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Eric Raoult, ministre délégué à la ville et à l'intégration. Monsieur le sénateur, je connais votre attachement aux
problèmes de la jeunesse et de l'intégration.
La question que vous posez concernant un projet d'aide au retour et à l'installation de jeunes étrangers ou de jeunes
Français d'origine étrangère dans leur pays d'origine appelle les éléments de réponse suivants.
Ce projet passerelle, qui pourrait être appelé le projet pilote « Demuynck », soulève deux difficultés.
Il existe actuellement deux dispositifs d'aide au retour volontaire pour les étrangers qui veulent se réinstaller dans leur
pays. Le premier existe depuis 1984 et s'adresse aux étrangers en situation régulière menacés de licenciement
économique ; le second a été mis en place en 1987 et concerne des chômeurs indemnisés par le régime des ASSEDIC,
privilégiant la réinsertion économique au moyen d'un projet personnalisé. Il s'agit donc d'un dispositif visant les travailleurs
de tous âges et non pas d'un projet spécifiquement adapté aux jeunes.
S'agissant des jeunes Français d'origine étrangère dont vous parlez et qui ne peuvent bénéficier des dispositions
réglementaires de 1984 et de 1987, une expatriation peut être envisagée. En effet, vous le savez, monsieur le sénateur, il
existe à l'étranger des capacités de création d'emplois par le biais de sociétés françaises et de leurs filiales.
Par ailleurs, l'Office des migrations internationales intervient dans ce domaine et pourrait donc procéder à l'évaluation des
possibilités d'emploi à l'étranger de cette population, plus particulièrement s'agissant des jeunes.
Les opérations pilotes que vous souhaiteriez monter en direction de jeunes de Seine-Saint-Denis, département qui vous
est cher, pourraient tout à fait être envisagées en Afrique subsaharienne, d'une part, et au Maghreb, d'autre part.
Sachez d'ores et déjà que le programme « Développement Migration », lancé et co-animé par le ministère de la
coopération et par le ministère de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration en direction du Mali, de la
Mauritanie et du Sénégal, offre un cadre dans lequel votre proposition pourrait être prise en considération.
En ce qui concerne le Maghreb, les dispositifs pour l'aide aux projets de développement et de réinsertion mis en place par
des associations, en direction du Maroc principalement - et de la Tunisie depuis peu - pourraient constituer également un
cadre répondant à vos préoccupations.
C'est dire que votre projet peut d'ores et déjà être mis en place de manière expérimentale dans le cadre des dispositifs
existants.
Enfin, votre proposition consistant à conserver le bénéfice du revenu minimum d'insertion à ceux qui auront choisi de
retourner dans leur pays d'origine implique qu'une des règles de base du RMI soit modifiée. En effet, vous le savez,
monsieur le sénateur, cette prestation ne peut être versée que sur le territoire français et, actuellement, la condition de
territorialité est très strictement respectée.
Cela étant, monsieur le sénateur, votre question pose plus globalement le problème de notre politique de développement,
que nous cherchons à orienter vers les pays les plus sensibles en terme d'immigration pour rendre ainsi plus efficace notre
dispositif d'aide au retour.
Quoi qu'il en soit, je considère que vos réflexions sont tout à fait intéressantes et j'ai donc demandé au président de
l'OMI, qui vient d'être nommé, de vous recevoir prochainement. Je suis tout à fait prêt à créer, sous votre impulsion, un
groupe de travail spécialisé sur cette question. Nous pourrions y associer le secteur privé, notamment dans le domaine
des transports et du tourisme, pour que la proposition Demuynck d'aide au retour des jeunes étrangers puisse être
concrétisée dans le département de la Seine-Saint-Denis, mais aussi dans un certain nombre d'autres sites, dans le cadre
de la politique de la ville.
M. Christian Demuynck. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et je suis, bien entendu, tout à fait
prêt à participer au groupe de travail que vous souhaitez mettre en place.
La difficulté que les jeunes rencontrent tient, comme vous l'avez dit, au fait que les moyens actuellement mis à leur
disposition ne concernent que ceux d'entre eux qui ont déjà un emploi. Or les jeunes qui sortent du système éducatif sont
complètement perdus, et rien ne permet de les aider.
Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de la proposition que vous m'avez faite, et je participerai à ce groupe de
travail.

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